Synopsis : À une centaine de kilomètres de Kaboul, Salim Shaheen, l’acteur-réalisateur-producteur le plus populaire et prolifique d’Afghanistan, est venu projeter quelques-uns de ses 110 films et tourner le 111ème au passage. Ce voyage dans lequel il a entraîné sa bande de comédiens, tous plus excentriques et incontrôlables les uns que les autres, est l’occasion de faire la connaissance de cet amoureux du cinéma, qui fabrique sans relâche des films de série Z dans un pays en guerre depuis plus de trente ans. Nothingwood livre le récit d’une vie passée à accomplir un rêve d’enfant.
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Sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs, le premier long-métrage de Sonia Kronlund, Nothingwood, est un documentaire sur une personnalité totalement hors-norme, le réalisateur et comédien afghan Salim Shaheen. Véritable star dans son pays, Shaheen, charismatique et charmeur, serait un peu l’équivalent afghan de ce qu’est Sharu Khan à Bollywood. Avec plus de 110 films au compteur, il possède également une notoriété qui lui permet de tourner là où il le veut, en particulier dans ces magnifiques paysages montagneux. Mais cela reste un cinéma fauché et doit tourner des « films d’action » ou des « comédies musicales » parfois avec l’aide des techniciens du documentaire de Kronlund et le plus souvent avec seulement trois comédiens dont l’un est son fils et l’autre le dialoguiste. Le troisième, absolument génial, est une sorte de grande girafe efféminée dont le jeu corporel, quasi burlesque, lui confère pratiquement tous les premiers rôles, en particulier les rôles féminins, surveillés de très près, voire complètement interdits pour les femmes. Et enfin, il y a le fameux Shahee. Atypique, rocambolesque, omnipotent, enfantin et autodidacte, il est, sous la caméra de Kronlund, un bloc brut et massif d’énergie et d’enthousiasme, à la fois désarmant, désopilant et démagogue. Il nous ferait presque croire que ce qu’il filme est d’une qualité supérieure à de la série Z. Mais une chose est sûre, ils s’éclatent tous, lui, ses acteurs, sa dizaine de fils qu’il a fait jouer dans ses films alors que les filles n’ont même pas le droit d’apparaître dans le documentaire, et les nombreux curieux qui viennent les observer durant les tournages. Alors c’est vrai que le décalage est immense entre les images d’archives, de massacres ou d’attentats subies par l’Afghanistan depuis 30 ans, et l’aventure merveilleuse de Shaheen et de ses proches – bien que ses films ont une approche biographique proche de la catharsis – mais son histoire offre un autre regard sur le pays et nous donne le sourire, non moqueur, mais partagé et lieur, comme preuve que le cinéma, par-delà les cultures et les langues, est bel et bien le langage universel par excellence, celui des émotions humaines.
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- NOTHINGWOOD écrit et réalisé par Sonia Kronlund en salles le 14 juin 2017
- Avec : Salim Shaheen
- Production : Laurent Lavolé
- Photographie : Alexander Nanau, Eric Guichard
- Montage : Sophie Brunet, George Cragg
- Distribution : Pyramide Films
- Durée : 1h25
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