Résumé : Et si le cinéma puisait ses origines dans le sport ? C’est en tout cas dans le cadre de ses recherches sur les performances sportives que Georges Demenÿ fut amené à pousser la capture d’images plus loin que jamais. Avec Étienne-Jules Marey, il perfectionna le procédé de la chronophotographie et mena des recherches sur le mouvement des sportifs, soucieux de perfectionner les aptitudes physiques de tous. Ainsi, grâce à la chronophotographie, il mit en évidence l’univers fascinant de l’étude du corps humain en pleine action. De ses recherches va naître une véritable encyclopédie visuelle de la mécanique des corps. D’une inaptitude certaine aux exercices physiques dans sa jeunesse, Georges Demenÿ fit preuve en revanche d’une réelle aptitude à analyser et à décortiquer le détail des mouvements. Il breveta en 1892 sa grande invention : le phonoscope, appareil capable de projeter un mouvement sur écran. Menant toute sa vie deux carrières de front, il occupa une place éminente, tant par son apport aux débuts du cinéma que par ses travaux scientifiques en éducation physique. Contemporain des frères Lumière et associé de Léon Gaumont, Demenÿ est considéré par beaucoup comme un précurseur dans le monde du cinéma, par certains même comme son inventeur.
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Le cinéphile consciencieux a sans doute déjà entendu parlé de Georges Demenÿ. On oublie pourtant souvent le rôle essentiel joué par ce drôle de scientifique, fasciné par la physiologie et la pratique sportive, dans la création du cinéma. L’un des grands mérites de ce bel ouvrage est donc de rendre à Demenÿ la place qui lui revient dans l’histoire du Septième art. De sa relation professionnelle et amicale aux côtés de Étienne-Jules Marey, inventeur de la chronophotographie, à sa collaboration avec Léon Gaumont, en passant par son travail au sein de la Station qui aboutira à l’invention du phonoscope, l’étude, placée sous la direction de Patrick Diquet, responsable de l’iconothèque à la Direction de la performance sportive, revient sur l’ensemble de la carrière de Demenÿ. À l’histoire personnelle de l’inventeur répond le récit détaillé de ses créations. Sa fascination pour l’étude du corps en mouvement, le conduit à développer la chronophotographie de Marey en lui apportant plus de netteté, avant de développer sa propre machine enregistreuse qui, sur bien des points, apparaît aux côtés du zootrope et du praxinoscope, comme le véritable précurseur du dispositif cinématographique que l’on connaît actuellement. La présentation du phonoscope lors de la première Exposition internationale de la photographie en 1892 remporte un succès international, et Edison lui-même reconnaîtra sa dette envers cette incroyable invention. Avec le temps, Demenÿ perfectionne son mécanisme : la pellicule remplace les plaques de verre, un système de came permet un défilement plus fluide de la pellicule lors du tournage, un nouveau type d’obturation offre la possibilité d’être réglé en fonction de l’intensité du jour, la taille de l’appareil se voit considérablement réduite. Ce qui facilite la praticité de son utilisation. En 1894, le phonoscope prend le nom de Vita, nouveau dispositif qui, hypothétise Diquet, a pu être à l’origine du cinématographe des frères Lumière venus rendre visite à Demenÿ le 15 décembre 1894, soit un an avant la première présentation publique de leur célèbre invention. En explorant le contexte scientifique de l’époque, l’ouvrage propose un panorama très instructif d’une période féconde en développements techniques. Avec clarté, l’étude décrit les différents aspects technologiques des inventions de Demenÿ, les comparant à celles de ses contemporains, revenant sur leur originalité et leurs probables prolongements. L’un des nombreux intérêts de cette étude est d’offrir une place importante aux illustrations. Profitant du grand format du livre (24,6 x 28 cm), Christophe Meunier, chargé de l’iconographie, s’est employé à illustrer de la façon la plus précise possible les différentes recherches de Demenÿ à partir de nombreux documents d’archive tout à la fois magnifiques et insolites. On ne saurait donc que trop recommander la lecture de cet ouvrage dont l’importance dans la connaissance de l’histoire du cinéma se doit d’être soulignée.