Résumé : À onze ans, Jean Charles Tacchella avait vu tous les films ; à treize ans, sa décision était prise : il consacrerait sa vie entière au 7e art. Né en 1925, il devient, à la Libération, journaliste à L’Écran français. Quatre ans plus tard, il fonde, avec André Bazin, Alexandre Astruc, Claude Mauriac et d’autres, un ciné-club d’avant-garde baptisé « Objectif 49 », berceau de la Nouvelle Vague et dont le président est Jean Cocteau. Parallèlement, Jean Charles Tacchella entame une carrière de scénariste, notamment pour Yves Ciampi (Les héros sont fatigués, 1955 ; Typhon sur Nagasaki, 1957), Christian-Jaque (La loi c’est la loi, 1957) et Michel Boisrond (Voulez-vous danser avec moi ?, 1959). À partir de 1973, Tacchella passe derrière la caméra et va réaliser, en près de trente ans, une dizaine de longs métrages, parmi lesquels on retrouve de grands succès populaires comme Cousin Cousine (1975) et Escalier C (1985).
♥♥♥♥♥
Au-delà de leur seul intérêt biographique, ces mémoires signées Jean Charles Tacchella prennent tout au long de leur lecture la valeur d’un panorama historique particulièrement complet et instructif. Réfractaire au gouvernement de Vichy, le jeune Tacchella trouve dans les salles obscures un refuge qu’il ne quittera plus. Son amour pour le cinéma s’épanouit d’abord dans les colonnes de L’Écran français et de Ciné-Digest (revue qu’il co-fonde en 1949) avant de se porter vers l’écriture de scénarios pour ses amis Yves Clampi, Jean Dewever, ou Gérard Oury. Ses ambitions de réalisation attendront quant à elles les années soixante-dix pour se concrétiser avec Voyage en Grande Tartarie, puis Cousin, Cousine qui lui vaut une reconnaissance internationale et lui ouvre même les portes d’Hollywood. Le récit de ce parcours atypique, qui le mènera jusqu’à la présidence de la Cinémathèque française en 2001, est servi par la qualité d’une écriture limpide et lucide. Tacchella revient longuement sur ses relations amicales avec les acteurs, producteurs, et cinéastes qui ont marqué sa carrière, faisant dialoguer ses plus fidèles contemporains (Alexandre Astruc, Maurice Ronet, Toscan du Plantier, Jean Rouch) avec ses modèles et inspirateurs de toujours (Jean Renoir, Jean Vigo, Frank Capra, Henri Langlois). Ces rencontres bienheureuses côtoient certaines déconvenues (la sortie interdite Honneurs de la guerre de Jean Dewever par la censure gaulliste, l’absence d’Escalier C pour représenter la France au Festival de Cannes suite à une décision incompréhensible du ministère de la culture) et échecs personnels que Tacchella analyse dans le détail sans jamais se départir de sa subjectivité. Entre un regard amusé et désabusé, le réalisateur raconte la longue accession au poste tant convoité de metteur en scène, ainsi que les nombreuses difficultés rencontrées lors de la préparation de ses films, de la recherche de financements à la question des décors (le Paris de la Libération de Travelling avant), en passant par les problèmes de casting (ainsi du choix de l’acteur pour interpréter le Jésus de Tous les jours dimanche, se portant tour à tour sur Woody Allen, John Travolta, Roberto Benigni, Ennio Fantastichini pour finalement s’arrêter sur Maurizio Nichetti). Assorti d’illustrations en noir et blanc, ainsi que d’un index des noms fort utile, cet ouvrage s’offre en définitive comme le passionnant témoignage d’un esprit libre.
- JEAN CHARLES TACHELLA, MÉMOIRES
- Auteur.s : Jean Charles Tacchella
- Édition : Séguier
- Date de parution : 16 novembre 2017
- Format : 944 pages
- Tarif : 28 €