Synopsis : Jean Douchet est un passeur. Depuis une cinquantaine d’années, il est un critique de cinéma influent. Il sillonne les cinémathèques du monde entier pour rencontrer le public et parler des films qui le passionnent. Par son intelligence, sa culture, son humour, il a influencé des générations de cinéastes et d’amoureux du cinéma. Un soir, trois amis, Vincent, Guillaume et Fabien croisent son chemin. Ils sont immédiatement fascinés et séduits par sa parole. Et bien que le trio développe une relation privilégiée et intense avec Jean Douchet, l’homme n’en demeure pas moins plein de mystères…
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Jean Douchet est un personnage que les cinéphiles français connaissent bien, chacun pour différentes raisons. Certains ont d’abord connu l’animateur de ciné-club –à la Cinémathèque française et au cinéma du Panthéon principalement, mais aussi en Province– quand d’autres le voient avant tout comme un critique des Cahiers du Cinéma. Certains connaissent l’homme dont on retrouve régulièrement les analyses –souvent d’une grande richesse– dans les bonus des DVD alors qu’il est pour d’autres le théoricien auquel on doit la formidable série d’émissions de radio, Une autre histoire du cinéma. Vincent Haasser, Fabien Hagege et Guillaume Namur, les auteurs de Jean Douchet, l’enfant agité, ont pour leur part croisé son chemin à l’occasion d’un ciné-club qui se tenait dans leur ville, quand ils étaient lycéens. Une rencontre comme Douchet en a connu des centaines, mais qui fut pour eux fondamentale. C’est pour mieux comprendre l’unité de son travail protéiforme, la cohérence interne d’une pensée qui se déploie sous maints aspects, qu’ils ont décidé de consacrer à Jean Douchet ce documentaire admiratif. C’est parce que son activité de critique, de passeur, est si hétéroclite que ce portrait intéresse d’abord. En effet, en nous présentant l’une après l’autre les différentes facettes du travail de Jean Douchet, il nous permet de l’appréhender dans sa totalité. C’est d’abord l’animateur de ciné-club que l’on voit à l’œuvre, notamment par le biais d’images d’archives, filmées au cours d’interventions assez anciennes. Le film nous montre également le processus de fabrication des bonus DVD qu’il réalise régulièrement. Assisté d’un film monteur, Douchet élabore ces analyses en collant toujours à l’image, en restant au plus près de l’oeuvre.
L’autre aspect passionnant de Jean Douchet, l’enfant agité est la façon dont il met en évidence l’influence primordiale qu’a eu le critique sur un nombre considérable de réalisateurs et de producteurs qui jouent un rôle prépondérant dans le cinéma français actuel. Noémie Lvovsky et Arnaud Desplechin évoquent les cours que donnait Jean Douchet quand ils étaient à l’IDHEC, au début des années 80 (Desplechin faisant notamment le récit d’une touchante anecdote qui pourrait valoir au héros de ce documentaire hagiographique les pires ennuis en ces temps de fièvre délatrice). Saïd Ben Saïd, l’un des derniers grands producteurs français, explique comment l’enseignement de Douchet l’a poussé dans la voie qui est la sienne, pour le plus grand bonheur des cinéphiles hexagonaux. Xavier Beauvois, last but not least, dépeint son rapport filial avec celui qui l’a accueilli comme son enfant quand il est arrivé à Paris.
Car ce n’est pas seulement le cinéphile que nous donne à voir ce film, mais aussi l’homme : hédoniste influencé par la pensée grecque, jouisseur rétif à l’hygiénisme moderne, il apparaît en dernière instance comme un être qui aime la vie, par-dessus tout. C’est d’ailleurs une chose qui revient fréquemment au fil des entretiens avec ceux qu’il a connu et influencé : Douchet ne leur a pas seulement appris à voir, il leur a aussi appris à mieux vivre. Ce qui est, in fine, le plus beau des éloges, et la plus grande des réussites.
- JEAN DOUCHET, L’ENFANT AGITÉ
- Sortie salles : 24 janvier 2018
- Réalisation : Fabien Hagege, Guillaume Namur
- Avec : Jean Douchet, Xavier Beauvois, Noémie Lvovsky, Barbet Schroeder, Arnaud Desplechin…
- Scénario : Vincent Haasser, Fabien Hagege, Guillaume Namur, Alexandre Moussa
- Production : Bastien Ahouzan
- Photographie : Amine Berrada
- Montage : Nicolas Ripoche
- Musique : Arthur Dairaine Andrianaivo
- Distribution : Carlotta
- Durée : 1h25