Synopsis : L’histoire de Farinelli, célèbre castrat, devenu une légende de son temps et qui arrêta brusquement sa brillante carrière pour suivre le roi d’Espagne.
♥♥♥♥♥
D’abord documentariste pour la télévision avant d’acquérir une notoriété internationale en 1987 grâce à Le Maître de Musique, son premier long-métrage de fiction, Gérard Corbiau affiche dans ses œuvres une passion pour l’art lyrique. Profitant du regain de popularité des biopics de personnalités historiques dans les années 1980-1990, le cinéaste combine cette tendance à son domaine de prédilection, la musique. Une association se révélant gagnante pour Farinelli qui fait plus d’un million d’entrées au moment de sa sortie en salles. La BO composée par l’ensemble musical, Les Talents Lyriques, connaît le même succès et se vend à 800 mille exemplaires. En plus de sa popularité au box office, le biopic romancé sur le légendaire chanteur d’opéra baroque est récompensé par un Golden Globe du meilleur film étranger et nommé aux Oscars dans la même catégorie en 1995. Le récit , dans la lignée des œuvres cinématographique de la fin du XXème siècle, traite des sujets comme le prix de la gloire et la différence. Le castrat né Carlo Broschi dont le surnom est un hommage à ses mécènes, les Farina, une riche famille de magistrats napolitains, est interprété par Stefano Dionisi (Le Sang des innocents, Les Enfants du siècle, Padre e Figlio). Un rôle au mystère envoûtant, celui d’un eunuque grandement convoité par les cours à travers toute l’Europe pendant le siècle des Lumières, qui lance la carrière mondiale de l’acteur italien tout juste primé par un David di Donatello. Si Dionisi offre une performance remarquable sur scène comme dans les moments d’intimité, il ne va pas jusqu’à chanter les airs qui ont fait la célébrité de Farinelli. La restitution de la voix de l’artiste lyrique est obtenue par une équipe de l’IRCAM en associant les chants de la soprano colorature Ewa Malas-Godlewska à ceux du contre-ténor Derek Lee Ragin, une recomposition permettant au long-métrage d’obtenir un César pour le son. Cependant, on peut regretter l’absence d’un travail plus poussé autour de la voix du personnage lorsqu’il n’est pas en performance. Le comédien ne parlant pas un mot de français avant de débuter le tournage, ce qui était déjà un obstacle, un entraînement vocal pour lui faire adopter une tonalité plus aigüe semblait assez périlleux en termes de faisabilité et de délais. Ainsi, hors représentation, Farinelli a une voix commune pour un homme de son âge.
Farinelli est également récompensé par un César du meilleur décor attribué à Gianni Quaranta (Sacco et Vanzetti, 1900, Marquise). Outre l’élaboration de décors pour le cinéma, le chef décorateur travaille aussi sur des pièces de théâtre et des opéras, ce qui a certainement contribué à l’authenticité de l’univers dans lequel évolue le héros. La reconstitution excellente du milieu de la noblesse européenne du XVIIIe siècle est étayée par les magnifiques costumes d’époque d’Olga Berluti (Harem, De guerre lasse, Marquise) et d’Anne de Laugardière (Les exploits d’un jeune Don Juan). Malgré une grande fidélité au contexte historique, beaucoup de faits sont inventés parmi lesquels le pacte sexuel malsain qui régit la relation entre les deux frères Broschi. Cette prise de liberté quant aux évènements de la vie du protagoniste confère à celui-ci une aura mythique, laissant planer une part d’ombre sur sa nature et donnant du piquant à l’intrigue. Hommage à l’un des plus célèbres artistes lyriques du siècle des Lumières, Farinelli est un biopic, aussi classique qu’osé, à (re)découvrir pour le plaisir des passionnés d’opéra.
- FARINELLI
- Copie numérique
- Ressortie salles : 12 décembre 2018
- Réalisation : Gérard Corbiau
- Avec : Stefano Dionisi, Enrico Lo Verso, Elsa Zylberstein, Jeroen Krabbé, Caroline Cellier, Renaud du Peloux de Saint Romain, Omero Antonutti, Marianne Basler, Pier Paolo Capponi, Graham Valentine, Jacques Boudet
- Scénario : Gérard Corbiau, Andrée Corbiau, Marcel Beaulieu
- Production : Véra Belmont, Linda Gutenberg, Dominique Janne, Aldo Lado, Stéphane Thenoz
- Photographie : Walther Van den Ende
- Montage : Joëlle Hache
- Décors : Gianni Quaranta
- Costumes : Olga Berluti et Anne de Laugardière
- Son : Jean-Paul Mugel et Dominique Hennequin
- Musique : Christophe Rousset et « Les Talents Lyriques »
- Distribution : Mission
- Durée : 1h51
- Sortie initiale : 7 décembre 1994