Synopsis : Des événements inquiétants surviennent dans la ville paisible de Centerville. Bientôt, les morts sortent de leurs tombes et menacent les vivants.
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Six ans après avoir imaginé des vampires décadents dans Only Lovers Left Alive, Jim Jarmusch (Stranger Than Paradise, Dead Man, Paterson), icône du cinéma indépendant américain depuis les années 1980, s’essaie au film de zombies. The Dead Don’t Die, présenté en ouverture du Festival de Cannes et en lice pour la Palme d’or, est une comédie autour de morts-vivants attaquant les habitants d’une paisible bourgade américaine répondant au doux nom de Centerville. Au menu de cette parodie sardonique et décapante : humour noir et casting hype. Une pleine lune tenace et des dérèglements climatiques inexpliqués annoncent une catastrophe ; les habitants assistent, médusés, au réveil des zombies venus les dévorer. La police est dépassée. Le shérif neurasthénique Cliff Robertson, son adjoint nonchalant Ronnie Peterson et leur collègue hypersensible Minerva Morrison sont désemparés. The Dead Don’t Die est porté par ce trio aussi efficace que loufoque formé par Bill Murray, Adam Driver et Chloë Savigny, trois grands habitués du cinéaste. On retrouve également d’autres fidèles comme Iggy Pop (Paterson) en zombie accro au café, Tom Waits en ermite errant dans les bois, Tilda Swinton (Only Lovers Left Alive) en samouraï bouddhiste ou encore le rappeur RZA. Néanmoins, l’apparition de la pop star Selena Gomez (Spring Breakers) – dont le jeu s’avère moins convaincant – vêtue d’un mini short en jean, semble tout à fait anecdotique.
Si la horde de créatures sanguinaires se fait attendre – il faut admettre que l’exposition est un peu lente –, on retrouve ici la mise en scène singulière et l’esthétique soignée du réalisateur, à savoir l’extrême composition du cadre, les dialogues ciselés, le ton ironique, ainsi que le recours au comique de répétition. La chanson The Dead Don’t Die, écrite et interprétée par le chanteur country Sturgill Simpson, conduit la narration de cette apocalypse pop à la fois absurde, décalée et déjantée. Pamphlet contre une Amérique trumpiste « pourrie » et chaotique, The Dead Don’t Die est truffé de références cinématographiques (Nosferatu, Halloween, la Nuit des Masques, Psychose, Star Wars…) : Jim Jarmusch détourne les codes, dissémine un grand nombre de clins d’œil qui raviront les initiés, mais rend surtout hommage au pape du genre en citant notamment La Nuit des Morts-Vivants, classique de George A. Romero.
En outre, si la charge anti-consumériste de The Dead Don’t Die est similaire à celle de Zombie (Dawn of the Dead), le cinéaste opte ici pour une mise en abyme à travers le prisme de la fatigue culturelle qui entoure la figure du mort-vivant affamé. Enfin, l’étrange musique composée par le groupe Sqürl scande le récit et répond de manière subtile au caractère quasi contemplatif de l’image jusqu’au final délirant. Le treizième long-métrage de Jarmusch, qui dénonce très nettement la surconsommation et la catastrophe écologique, engloutit tout sur son passage. Qu’on leur coupe la tête !!
- THE DEAD DON’T DIE
- Sortie : 14 mai 2019
- Réalisation : Jim Jarmusch
- Avec : Bill Murray, Adam Driver, Tilda Swinton, Chloë Sevigny, Danny Glover, Steve Buscemi, Tom Waits, Selena Gomez, Caleb Landry Jones, Austin Butler, Sara Driver, Carol Kane, Rosie, Perez, Iggy Pop, RZA…
- Scénario : Jim Jarmusch
- Production : Joshua Astrachan, Carter Logan
- Photographie : Frederick Elmes
- Montage : Affonso Gonçalves
- Décors : Kendall Anderson
- Costumes : Catherine George
- Musique : Sqürl
- Distribution :Â Universal Pictures International France
- Durée : 1h43