Résumé : Dans les années 1960, l’art cinétique s’impose partout en Europe avec ses peintures à illusions d’optique, reliefs à lumière motorisés, et environnements à vertige. Art du mouvement et de la lumière, le cinéma s’empare de l’Op art, produisant toute une gamme de réemplois, du décor à l’intrigue. L’exposition présente ces frictions entre les deux arts à travers 30 films et 150 oeuvres et documents.
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Si les influences réciproques entre arts plastiques et cinéma sont fréquemment soulignées au sein des ouvrages généraux ou consacrés à un réalisateur en particulier, la mention de l’Op Art reste plus discrète. Ce courant artistique qui prend son essor au tout début des années 1960 sous la férule du GRAV (Groupe de Recherche d’Art Visuel) connaît pourtant une popularité immense au sein d’une société de consommation friande de nouveautés et d’objets artistiques à l’identité sérielle. L’exposition « Le diable au corps » organisée au MAMAC de Nice (du 17 mai 2019 au 29 septembre 2019) et placée sous la direction d’Hélène Guenin, directrice du MAMAC, et Pauline Mari, historienne de l’art et déjà auteure d’un très bon ouvrage consacré à ce sujet (Le Voyeur et l’Halluciné. Au cinéma avec l’op art, Presses universitaires de Rennes, 2018), propose une exploration d’une relation dont la profondeur est parfaitement rapportée par la belle édition de son catalogue. Les trois essais constituant cet ouvrage rapportent les différentes caractéristiques d’une relation protéiforme voyant le cinéma se (re)saisir des œuvres de l’Op Art à travers un curieux jeu de citations, d’emprunts, de reprises plus ou moins conscientes et assumées. Car si l’Op Art participe de plein fouet à la révolution culturelle et politique des sixties, sa réception auprès des critiques et des cinéastes reste mitigée et ambiguë (exemple de Georges Clouzot de La Prisonnière à l’inachevé L’Enfer). C’est pourtant bien du côté du cinéma, que les plasticiens du mouvement trouvent une sorte de légitimité. Les œuvres hybrides de William Klein (Qui êtes vous Polly Magoo?), les allusions lointaines de Godard (Alphaville ; Pierrot le fou) ou directes d’Antonioni (Blow-Up) soulignent la valeur d’une posture artistique qui a toujours pris soin de considérer la perception d’un spectateur devenu sujet à part entière de dispositifs dont l’immersion oscille entre le plaisir ludique (Les 400 coups) et l’assujettissement oppressif (Orange mécanique). Du cinéma d’auteur aux productions plus populaires (les décors de L’Homme au pistolet d’or), les spirales kaléidoscopiques de l’Op Art creusent le mouvement de l’image projetée, magnétisant ses perspectives de lecture et d’écriture. À la qualité de ces différents écrits s’ajoute une illustration riche et somptueuse. Les nombreuses images retracent l’histoire du mouvement entre expositions, photographies de mode et évidemment reprises filmiques.
- QUAND L’OP ART ÉLECTRICE LE CINÉMA. LE DIABLE AU CORPS
- Autrices : Hélène Guenin et Pauline Mari (sous la direction de)
- Éditions : In Fine
- Date de parution : 30 mai 2019
- Format : 144 pages
- Tarif : 28 €