Résumé : Jean-Luc Godard a emprunté à la philosophie avant d’être à son tour objet d’études et de colloques. Il s’agit ici de considérer la cinématographie de Jean-Luc Godard comme discours philosophique propre et de comprendre son mode opératoire. Cette proposition est exposée selon quatre approches qui travaillent sur les réalisations du cinéaste, y repèrent l’expression philosophique, en développent la réalité et argumentent ses conditions de possibilité.
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S’il ne fait aucun doute que le cinéma de Jean-Luc Godard donne à penser, les ouvrages cherchant à déceler les rapports entre ses productions et la philosophie ont souvent laissé à la parole du réalisateur le soin de résoudre les enjeux de cette rencontre (les aphorismes de Godard étant sur ce point nombreux). Il y a donc ici une volonté de résoudre cette relation à la lumière d’un retour salvateur aux films qui constituent le principal cheminement de ce collectif placé sous la direction de Louis-Albert Serrut, auteur, réalisateur, docteur en sciences de l’art, et déjà auteur de l’instructif Jean-Luc Godard, cinéaste acousticien (L’Harmattan, 2011). À raison, la référence centrale des différentes contributions reste Gilles Deleuze dont la conceptualisation du cinéma consignée dans ses deux volumes, L’Image-mouvement (1983) et L’Image-temps (1985), permit d’ouvrir la critique et la théorie à une nouvelle traversée des images en mouvement. La question du langage, les rapports établis par les outils communication, la figure de l’Amour, ou la dynamique temporelle du renouveau permettent de problématiser les formes-idées déployées par l’œuvre de Godard et d’expliciter les caractères de sa persona publique. Le recours à des notions savantes (la phénoménologie de Merleau-Ponty, la sémiologie de Barthes ou Metz, la morale de Jankélévitch) s’investit d’une méthode analytique articulée autour de la formation, de la déconstruction et de l’agencement des images et des sons. Le corpus filmique convoqué soutient l’originalité de ces approches. Six fois deux. Sur et sous la communication, Ici et ailleurs, Numéro Deux, Je vous salue Marie, Éloge de l’Amour, Nouvelle Vague… insistent sur le réseau de sens et de rapports conçu et entretenu par la mise en scène de Godard. Le lien philosophique se tisse en définitive à travers la confrontation à un environnement politique, social et culturel qui fonde notre perception du réel. L’engagement du cinéaste s’exprime par le biais d’une volonté de réfléchir par la production d’écarts ces modalités d’expression et de réception. En résulte une mise en abyme du dispositif cinématographique qui, loin de se retourner sur lui-même, réaffirme sa légitimité artistique, esthétique, et donc philosophique. Si la réussite du fond est certaine, on regrette que les éditions L’Harmattan n’aient pas proposé d’accompagner ces articles d’illustrations qui auraient permis de seconder le formidable apport théorique de cet ouvrage.
- LE CINÉMA DE JEAN-LUC GODARD ET LA PHILOSOPHIE
- Auteur : Louis-Albert Serrut (sous la direction de)
- Éditions : L’Harmattan
- Collection :Â Champs visuels
- Date de parution: 2 décembre 2019
- Langues : français uniquement
- Format : 176 pages
- Tarif : 18 € (print) -13,99 € (numérique)