Résumé : Qu’est-ce que le cinéma doit à la littérature ? Cette question, qui déborde de loin le cadre de l’adaptation, relève des études de réception. Le présent ouvrage examine donc ce que le cinéma a effectivement pris en compte des formes et genres de la littérature, de ses auteurs, quels qu’ils soient.
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Les études des rapports entre cinéma et littérature(s) ont depuis longtemps fait florès. Michel Serceau, docteur d’État, professeur émérite et essayiste, a déjà contribué à cette recherche par le biais d’articles et d’ouvrages (L’adaptation cinématographique des textes littéraires aux Éditions du Céfal paru en 1999), mais décide d’y revenir pour interroger la notion de réception qui apparaît à la fois comme l’objet et le modus operandi de sa recherche. Cette large étude se distingue d’abord par ses pré-requis théoriques. S’inscrivant dans la pensée de Christian Metz, Serceau privilégie le langage sur la langue pour qualifier les particularités du médium cinématographique. Réactivant une certaine approche structurale du cinéma, l’auteur cherche à battre en brèche les raccourcis qui ont depuis plusieurs années réduit les liens entre ces deux disciplines à un simple rapport de signifiants en excluant les hypothétiques et nombreuses portées de leurs signifiés respectifs et communs. Le lecteur prend ici immédiatement conscience de la densité théorique qui anime la réflexion de Serceau. Cette évidente qualité évite le risque de l’abstraction à travers le développement d’une expertise fouillée et prolixe en statistiques. Loin de s’enfermer dans une lecture formaliste et/ou dirigiste de son sujet, Serceau se propose en effet d’étudier la récurrence de phénomènes propres à éclairer les évolutions et constances de la réception de la littérature au sein des productions cinématographiques (les téléfilms et séries télévisées n’étant pas étudiées ici).
Deux principaux axes fondent donc la particularité du travail entrepris. Une approche synchronique qui prend corps à travers les problématiques de l’hybridation des catégories et celles, plus générales, de l’adaptation ; une approche diachronique, ensuite, qui permet de relire l’histoire du cinéma à l’aune de pistes de lecture particulièrement stimulantes. Cette interrogation sur les spécificités et partages des médiums envisagés (le cinéma, le roman, le théâtre, la poésie et l’ensemble de leurs déclinaisons génériques) se couple d’une étude sur certaines figures clés de ce dialogue (la ville, les justiciers et les super-héros, les personnages prométhéens). La richesse du contenu se retrouve encore dans les annexes particulièrement fournies qui clôturent l’ouvrage (bibliographie, index des écrivains et cinéastes).
L’érudition de cet ouvrage n’empêche néanmoins la présence de certaines lacunes. Ainsi de la présence de coquilles qui, ici et là, émaillent le texte, ou du peu de référencements de textes consacrés au seul cinéma (les ouvrages de Noël Burch, Jacques Aumont, ou Raymond Bellour, pour ne citer qu’eux, auraient pu enrichir les passages consacrés au dispositif cinématographique et au passage du classique au moderne). Ces remarques mises à part, ce Cinéma fait sa littérature offre un regard revigorant sur une relation qui ne cesse jamais de se réécrire.
- LE CINÉMA FAIT SA LITTÉRATURE. ÉTUDE DE LA RÉCEPTION DE LA LITTÉRATURE PAR LE CINÉMA
- Auteur : Michel Serceau
- Éditions : Classiques Garnier
- Collection : Recherches cinématographiques
- Langues: Français uniquement
- Date de parution : 20 novembre 2019
- Format : 536 pages
- Tarif : 59 €