Synopsis: Alors qu’il pense passer une journée paisible et ordinaire, un vieil homme se rend dans un parc d’attractions pour y découvrir un véritable cauchemar.
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Présenté pour la première fois en France au Festival Lumière en 2020, The Amusement Park (1973) suscitera à coup sûr l’engouement des amateurs du cinéma de genre. Il faut dire que le film se présente comme un authentique inédit. Exhumé en 2018 des archives de George A. Romero par sa veuve, Suzanne Desrocher-Romero, The Amusement Park est une commande financée par la communauté luthérienne de Pittsburgh. L’idée ? Réaliser un film qui puisse ouvrir les yeux du public sur les conditions de vie difficiles des personnes âgées. Tout auréolé du succès de La Nuit des morts-vivants (1968), Romero profite de la charge critique de la commande pour prolonger certains de ses motifs et thématiques. Sang et ambiance malaisante auront finalement raison du projet, rebutant les commanditaires au point de les voir refuser de projeter le film. L’approche de Romero était pourtant intéressante. Évitant le didactisme du documentaire conventionnel, le cinéaste choisit de traiter son sujet sur un mode métaphorique. L’environnement forain du parc d’attractions crée un contraste avec la représentation du personnage principal dont l’apparence se dégrade au fur et à mesure de l’avancée de la journée. Chaque stand permet au cinéaste de répondre aux prérogatives de la commande. Le mépris affiché de la jeune génération pour les anciens se couple de la mise en scène d’une série d’injustices qui font apparaître la vieillesse comme un âge de la souffrance et de la solitude.
Placée dans le wagon d’un grand huit ou portée à l’épaule, la caméra se soumet à une mobilité constante qui permet de traduire le sentiment de désorientation ressenti par le protagoniste. Le mouvement est par ailleurs pris en charge par les incessants déplacements des figurants dans le cadre, participant à l’atmosphère asphyxiante qui traverse l’ensemble du film. Sur ce point, The Amusement Park se présente moins comme un chaînon manquant que comme le signe d’une continuité dans l’œuvre de Romero.
Le rapport de l’individu à la communauté, l’interrogation de la normalité à partir d’une mise en cause des conventions sociales, rejouent sur un mode délibérément critique le discours implicite de La Nuit des morts-vivants. À l’instar de La Nuit des fous vivants (The Crazies, 1972), Martin (1977), et bien évidemment Zombie (Dawn of the Dead, 1978), Amusement Park fait des figures du fantastique un moyen de développer un discours engagé sans pour autant perdre de vue le caractère ludique qui se rattache au genre. Bien que Tobe Hooper saura pousser plus loin la thématique de la fête foraine dans l’excellent Massacre dans le train fantôme (Funhouse, 1981), Romero rappelle à partir de celle-ci que si le cinéma d’horreur a pour but de créer un frisson de plaisir chez son spectateur, celui-ci n’est jamais aussi fort que lorsque le trouble d’une prise de conscience vient s’y immiscer sans que l’on s’y attende.
Au-delà du plaidoyer qui fonde le principe de son contenu, Amusement Park signe donc la réussite d’une manière qui fera la force du cinéma de Romero dans les années 1970. De quoi apprécier pleinement cette belle trouvaille qui profite en outre d’une belle restauration 4K pour sa sortie nationale et son édition prochaine en Blu-ray.
- THE AMUSEMENT PARK
- Sortie salles inédite : 2 juin 2021
- Réalisateur : George A. Romero
- Avec : Lincoln Maazel, Harry Albacker, Phyllis Casterwiler, Peter Chovan, Marion Cook, Sally Erwin, Michael Gornick, Jack Gottlob…
- Scénario : Wally Cook
- Producteur : Richard P. Rubinstein (producteur associé)
- Photographie : S. William Hinzam
- Montage : George A. Romero
- Distribution : Potemkine Films
- Durée : 53 minutes