Coffret 5 Pink films : critique

Publié par Jacques Demange le 10 octobre 2020

Résumé : Le pink film japonais (« pinku eiga » en version originale) est l’un des phénomènes les plus singuliers du cinéma mondial. Conçu pour séduire un public masculin avec son contenu érotique, ce genre a su attirer de nombreux jeunes réalisateurs qui ont tourné certains des films les plus radicaux et avant-gardes de l’Archipel. Ce coffret propose cinq grands classiques du pink film. L’occasion de mieux découvrir ce genre difficilement accessible en Occident à travers ces films totalement inédits en France et disponibles en Haute Définition.

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Coffret 5 Pink Films - jaquette

Coffret 5 Pink Films – jaquette

Attention OCNI (Objet Cinématographique Non Identifié) en vue. Avec la sortie de ce coffret « Pink Films », la maison Carlotta offre matière à se réjouir. Amateur ou non du cinéma nippon, le cinéphile se voit proposer la découverte d’une cinématographie aussi inédite qu’étonnante. Cinéma des marges qui se présente pourtant comme un authentique vivier de talents (Masahiro Kobayashi, Kiyoshi Kurosawa, Kohei Oguri, Masayuki Suo, ou encore Yojiro Takita ont tous fait leurs premières armes au sein du genre) et qui assura la survie d’un pan de l’industrie cinématographique japonaise à partir du début des années 1960, les productions Pink dépasse le cadre du simple cinéma de genre. Durant son âge d’or qui dura près de deux décennies (l’arrivée des vidéos pour adultes dans les années 1980 contribua fortement à son déclin), le genre fut d’abord une terre d’accueil pour de jeunes cinéastes formellement ambitieux, conjuguant la tradition du 35mm avec un désir de révolutionner les conventions établies. Pas étonnant alors que certains des enfants terribles du cinéma japonais de l’époque (Koji Wakamatsu en tête qui avec Les Secrets derrière les murs fait sortir le Pink des frontières du pays) se soient prêté au jeu. Cadre tremblotant, image granuleuse, passage du noir et blanc à la couleur et mouvements de caméra composent la première base grammaticale du genre (et que la restauration 4K à partir du positif original a pris soin de ne pas altérer), tandis que la représentation ponctuelle de scènes de sexe simulées assure son originalité.

 

 

L’intérêt ici se trouve dans le rejet constant de la codification. Chaque film proposé dans ce coffret assure le règne d’une inventivité débridée. Encouragé par la permissivité sexuelle qui leur a été octroyée, les cinéastes débordent d’imagination. Une poupée gonflable dans le désert (1967) d’Atsushi Yamatoya renvoie au Godard première manière (d’À bout de souffle à Alphaville). Chanson pour l’enfer d’une femme (1970) de Mamoru Watanabe se déploie à travers une plastification picturale des corps permise par les contrastes ou le motif du tatouage, tandis que Deux femmes dans l’enfer du vice (1969) de Kan Mukai et Prière d’extase (1971) de Masao Adachi s’inscrivent dans la mouvance psychédélique de la fin des sixties.

 

Dans un esprit différent mais non moins surprenant, Une famille dévoyée (1984) de Masayuki Suo se présente comme un pastiche (réussi) du cinéma d’Ozu, reprenant certains des tropes du maîtres et notamment son goût pour l’unité spatio-temporelle qui s’approfondit par le raccord constant à un hors-champ exposé sous toutes ses coutures.

 

UNE FAMILLE Devoyee

Une famille dévoyée

 

Volontiers erratique, la narration du cinéma Pink se développe à travers la dynamique d’un désir poussé jusque dans ses derniers retranchements. Les cadrages épidermiques et la promiscuité des corps dénudés sont sans cesse relativisés par un discours qui, tout en s’abandonnant parfois à la seule contemplation de la beauté physique (les vedettes du Pink risquant de faire tourner de nombreuses têtes) et à l’exploitation de certains clichés (voyeurisme et sadisme), ne cesse de questionner la nature du tabou en lui-même. L’exposition reste frontale mais le point de vue demeure. L’émoustillement est donc d’abord visuel, le plaisir, lui, toujours authentique.

 

Aux rapides mises en contexte proposées en introduction de chaque film s’ajoute la présence d’un instructif livret signé par Dimitri Ianni, critique, programmateur et spécialiste du cinéma japonais, qui offre un tour d’horizon à la fois synthétique et très complet d’un genre dont le présent coffret assure la pleine réhabilitation.

 

 

 

  • COFFRET 5 PINK FILMS
  • Édition : 3 Blu-ray Master haute définition ou 3 DVD nouveau master restauré
  • Date de sortie : 30 septembre 2020
  • Réalisateurs : Atsushi Yamatoya, Masao Adachi, Masayuki Suo, Kan Mukai, Mamoru Watanabe
  • Avec : Noriko Tatsumi, Yuichi Minato, Miki Watari, Shohei Yamamoto, Seigi Nogami, Michio Akiyama, Yuji Aoki, Masaaki Hiraoka, Susumu Iwabuchi, Makiko Kim, Ren Osugi, Miki Yamaji, Kei Shuto, Shiro Shimomoto, Mistugu Fuji, Ichiro Furuoka, Miki Hashimoto, Keisuke Kawahigashi, Tamaki Katori, Jun Yoshida, Rima Aoyama, Jiro Kokubu, Shusaku Muto
  • Scénario : Atsushi Yamatoya, Izuru Deguchi, Masayuki Suo, Yutaka So, Mamoru Watanabe
  • Editions : Carlotta Films
  • Durée : 376 minutes
  • Tarif : 40 €

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