Synopsis : une veuve mono-parentale hérite de la garde de son fils, un adolescent TDAH impulsif et violent. Au cœur de leurs emportements et difficultés, ils tentent de joindre les deux bouts, notamment grâce à l’aide inattendue de l’énigmatique voisine d’en face, Kyla. Tous les trois, ils retrouvent une forme d’équilibre et, bientôt, d’espoir.
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Déjà cinquième long métrage pour le jeune réalisateur canadien de 25 ans, Xavier Dolan. Après Laurence Anyways et Les Amours Imaginaires sélectionnés dans la section Un Certain Regard, il est revenu sur la Croisette pour concourir pour la première fois en compétition officielle de cette dernière 67e édition. La majorité de la presse critique française à Cannes fut enthousiaste. Oui Mommy, reparti avec le Prix du Jury ex-aequo avec Adieu au Langage de Jean-Luc Godard, dégage ces ondes électrisantes et cette transcendance cinématographique, visuelle et émotionnelle. Hélas l’emballement ici n’est pas au rendez-vous et a même provoqué des effets contraires. Car dans cette volonté d’explorer les troubles déficitaires de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), mais avant tout les troubles de l’attachement, dont souffre le fils d’une mère désaxée et veuve, qui tente de gérer les situations face aux comportements bipolaires, violents et impulsifs de son enfant, avec l’aide de sa voisine bègue (Suzanne Clément), Mommy finit par brasser de l’air et devient sur 2h14, bien trop bruyant et surtout bien trop long. Pourtant à l’instar de ses personnages bien vivants, Xavier Dolan peaufine sa mise en scène. A la fois exaltée, virevoltante, enflammée, pleine de rage et d’ardeur, elle réussit à retranscrire leur existence et leurs états d’âme dans le cadre exigu d’un format 1/1 (carré parfait) sur grand écran. Il met ensuite les bouchées doubles avec pléthore d’effets entre les gros plans, la bande son FM (Dido, Céline Dion, Counting Crows, Oasis…), les jeux de lumière, de couleurs, de flous artistiques et de ralentis.
Sur la forme, Dolan est dans l’excès à l’image de ce garçon, incarné par Antoine-Olivier Pilon, envahi et prisonnier d’un trop plein d’émotions totalement ingérables. Le jeune cinéaste nous en met plein les mirettes et les oreilles. Dans ce manque volontaire d’espace et donc de liberté, il laissera même le soin à son personnage la possibilité d’élargir le cadre – au sens littéral du terme – au moment où sa relation symbiotique avec ces deux femmes, qui parvient à retrouver un certain équilibre et espoir, est à son point culminant. Mais sur le fond, le traitement narratif, marqué par des hauts et des bas permanents, s’étiole progressivement au détriment d’un propos psychologique oedipien quand même inconsistant. Toute cette mise en scène esthétique, énergique, créative et aux allures parfois clipesques se transforme alors en un écran de fumée pour camoufler l’absence d’objectifs de Mommy. Pourtant Dolan esquisse et magnifie un portrait de femmes-mères méritantes, dévouées, excentriques et indestructibles. On salue en outre la performance des deux actrices, Anne Dorval (la mère) et Suzanne Clément (la voisine), qui transcendent le film par leur performance jusqu’au-boutiste. Au final, si l’intention de Xavier Dolan – qui écrit, produit, réalise et se charge du montage et des costumes – était de pousser un grand cri d’amour ravageur, nous n’avons hélas entendu dans Mommy que des cris tout court.
- MOMMY écrit et réalisé par Xavier Dolan en salles le 8 Octobre 2014.
- Casting : Anne Dorval, Suzanne Clément, Antoine-Olivier Pilon, Patrick Huard, Alexandre Goyette, Michèle Lituac, Viviane Pacal, Nathalie Hamel-Roy
- Production : Xavier Dolan, Nancy Grant
- Photographie : André Turpin
- Musique : Noia
- Montage : Xavier Dolan
- Décors : Colombe Raby
- Costumes : Xavier Dolan
- Distribution : MK2 / Diaphana Distribution
- Durée : 2h14
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