Synopsis : Cuba. Jesus, un jeune homme qui coiffe les perruques d’artistes travestis, rêve de chanter dans leur cabaret. Mais son père, qui sort de prison, a d’autres rêves pour lui…
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Paddy Breathnach se distingue par une filmographie très éclectique ; l’Irlandais s’est en effet essayé au drame avecAlisa (premier long en 1994), à la comédie avec Coup de Peigne en 2000 et au film d’horreur avec Shrooms en 2006. Mais il s’est surtout fait connaître du grand public au Festival de Cannes en 1997 où Irish Crime, polar noir avec Brendan Gleeson, avait été présenté en avant-première, avant de glaner quatre récompenses internationales. Aujourd’hui, Viva nous emmène à La Havane où habite Jesus, brillamment incarné par le prometteur Hector Medina Valdes. Vivant seul dans l’appartement de son père, le jeune adulte se débrouille tant bien que mal entre ses amis et sa grand-mère. Il est coiffeur de métier et s’occupe des perruques portées dans le cabaret tenu par Mama. Son établissement nocturne propose des spectacles de travestis. Jesus les admire en secret ; il souhaite lui aussi se produire sur scène. Lorsque son père refait surface après de longues années d’incarcération, ses projets se mettent brusquement entre parenthèses. Évidemment, Viva se place dans la lignée d’autres grandes œuvres sur le thème des drag-queens. On pense à l’inoubliable Priscilla, folle du désert, Extravagances, Talons aiguilles ou encore Pédale douce chez nous. Cependant, Paddy Breathnach apporte sa touche personnelle et son point de vue sur le sujet. On retrouve l’humour et le côté décalé propre à cet univers mais aussi un aspect tragique voire sordide. Viva mélange astucieusement les deux tonalités. Si le rêve, les paillettes et le glamour sont bien présents, les protagonistes évoluent dans des décors glauques et flirtent en permanence avec la misère.
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Le cinéaste dresse une peinture sociale pertinente à travers les difficultés économiques que vivent les Cubains ; l’entraide et le système D font partie intégrante du quotidien à La Havane. La capitale constitue d’ailleurs un personnage à part entière. De jour comme de nuit, elle entraîne ces héros dans son tourbillon. De magnifiques images de la ville, bercées par une musique latine envoûtante, apportent aussi un réel atout esthétique. Viva doit sa belle réussite à son histoire forte où évoluent des personnages savoureux et attachants. Leurs dialogues percutants ne nous épargnent rien ; on se parle franchement et crûment. Les répliques naviguent ainsi entre drôlerie et profondeur. Paddy Breathnach dépeint également une relation tendue et forte entre Jesus et Angel, son père. Le scénario est habile, jouant sur les oppositions et les contrastes, notamment entre un père et son fils, entre l’univers idéal de la nuit et les difficultés du jour, entre les touristes et les habitants. Malgré quelques clichés et petites baisses de rythme, Viva arrive sans mal à emporter le spectateur grâce notamment à une intrigue riche et des comédiens convaincants. Le double voyage, à la fois à Cuba et dans le monde des travestis, garantit un dépaysement grisant.
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Christophe Binet
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- VIVA réalisé par Paddy Breathnach en salles le 6 juillet 2016.
- Avec : Hector Medina Valdès, Jorge Perugorria, Luis Alberto Garcia, Luis Manuel Alvarez, Renata Maikel Machin Blanco…
- Scénario : Mark O’Halloran
- Production : Cathleen Dore, Robert Walpole, Rebecca O’Flanagan
- Photographie : Cathal Watters
- Montage : Stephen O’Connell
- Décors : Paki Smith
- Costumes : Sofia Marques
- Musique : Stephen Rennicks
- Distribution : ARP Sélection
- Durée : 1h40
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