Livre/ Paul Verhoeven. À l’œil nu : critique

Publié par Jacques Demange le 9 avril 2017

Résumé : En 2016, le succès public et critique rencontré par Elle a remis Paul Verhoeven sur le devant de la scène internationale. Le cinéaste néerlandais raconte son parcours dans cet entretien exhaustif réalisé chez lui, à La Haye. Il évoque ses controverses et ses succès, Arnold Schwarzenegger, Sharon Stone et Isabelle Huppert, la Hollande et Hollywood, le triomphe de Basic Instinct et l’échec de Showgirls, la liberté de Starship Troopers et la vitesse de Black Book… Il revient sur ce qui le lie aux femmes — plus qu’aux hommes —, sur sa passion pour Jésus et pour Jean Moulin, ainsi que sur ses nombreux projets de films.

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Paul Verhoeven. A loeil nu - couverture

Paul Verhoeven. À l’oeil nu – couverture

Cet ouvrage porte bien son titre. Dans l’essai écrit par Emmanuel Burdeau, critique de cinéma et déjà auteur de plusieurs livres d’entretiens chez Capricci, précédent son long dialogue avec Paul Verhoeven, l’œuvre de celui-ci est décrite comme celle de la nudité la plus pure. Pas du dénudement mais bien de l’exposition sans artifices de la matière du plan. « Une image juste, juste une image », disait Jean-Luc Godard. Qu’importe en effet que celle-ci accueille effets spéciaux ou autres procédés techniques, Verhoeven n’est pas un réalisateur de l’illusion. Sa mise en scène est, pour reprendre le mot de l’auteur, « brusque », c’est-à-dire tournée vers le choc, la rencontre imprévue car non imprégnée du traditionnel rapport entre le montrer et le cacher. Cinéaste du contrechamp plutôt que du hors-champ, Verhoeven « choque », actualise sans cesse, ne métaphorise jamais. D’où le malaise qu’ont pu susciter ses films chez certains spectateurs. Avec sagacité, Burdeau pousse plus loin son analyse en usant de la forme comparative. L’originalité de Verhoeven se mesure à celle de ses contemporains ; et l’auteur de dresser des parallèles entre le style du cinéaste hollandais et celui de John McTiernan, Brian De Palma, ou encore Claude Chabrol. Cet essai est aussi un moyen de mieux comprendre la réhabilitation récente du statut de Verhoeven et de certains de ses films (Showgirls). En avance sur son temps, le réalisateur a incarné dès ses premières œuvres la figure d’un artiste pour qui le visible devait se prendre, se lire, et se (re)présenter, comme tel ; un trait d’esprit qui jusqu’à récemment prenait à contre-pied l’ensemble de la production cinématographique européenne et surtout américaine. Ces différents aspects expliquent sans doute l’admiration que Verhoeven voue au cinéma de Michael Haneke, avouant avoir été particulièrement impressionné par la séquence du meurtre amoureux d’Amour. Une scène qui dure, et qui par sa durée même, admet sa nudité. L’entretien de cent-vingt pages apparaît comme exhaustif.

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Paul Verhoeven - Elle

Paul Verhoeven – Elle

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Le réalisateur revient sur ses origines, son enfance, son goût pour la musique (et d’abord pour celle de Stravinsky), avant de s’attarder sur ses films, d’en expliciter les projets et les mises en œuvre. De ses relations avec Arnold Schwarzenegger (Total Recall), Sharon Stone (Basic Instinct), ou Isabelle Huppert (Elle) à l’ambiguïté idéologique de Starship Troopers, en passant par son ouvrage consacré à Jésus (Jésus de Nazareth paru en France en 2015 aux éditions Aux Forges de Vulcain), Verhoeven se livre comme jamais. Les fanatiques de son cinéma apprécieront, mais les autres aussi, tant le réalisateur n’hésite pas à développer ses propos, livrant le récit captivant d’un réalisateur européen arrivé en Amérique, conciliant avec difficulté son tempérament auteuriste au cahier des charges des grosses productions hollywoodiennes (Robocop), avant de revenir en Europe et d’obtenir, enfin, à 78 ans, une consécration unanime et méritée avec Elle. Le cinéaste en vient même à commenter ses futures ambitions, sa volonté de décrire avec précision la résistance française, ou certains aspects de la vie de Jeanne d’Arc. La densité historique et biographique de ces récits semble tout à fait convenir à ce travailleur acharné qui avait déjà su représenter avec talent l’époque de la Seconde Guerre mondiale (Black Book) ou celle de l’Europe de la fin du XIXe siècle (Katie Tippel). Avec une faconde tout à fait enthousiasmante, cet ouvrage permet de découvrir d’une nouvelle manière l’œuvre de Paul Verhoeven. À l’œil nu, sans aucun doute.

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  • PAUL VERHOEVEN. À L’OEIL NU. Entretien avec Emmanuel Burdeau, disponible aux éditions Capricci depuis le 6 avril 2017
  • 176 pages
  • 16 €

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