Synopsis : Une jeune américaine fraîchement arrivée à Berlin connaît un amour impossible avec un grand chef d’orchestre ; un odieux gosse de riche découvre par amour le sens du don et de l’abnégation ; deux héros de la lutte irlandaise pour l’indépendance de leur patrie vivent des aventures palpitantes… Trois films de Douglas Sirk, deux mélodrames et un film d’aventures, à (re)découvrir en DVD.

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Les Amants de Salzbourg, Le Secret magnifique et Capitaine Mystere de Douglas Sirk

Les Amants de Salzbourg, Le Secret magnifique et Capitaine Mystère de Douglas Sirk

Elephant Films poursuit son travail d’édition de l’oeuvre de Douglas Sirk en faisant paraître trois nouveaux titres en version restaurée inédite à partir du 4 avril 2017 : Les Amants de Salzbourg, Le Secret magnifique et Capitaine Mystère. Si le second était déjà disponible chez Carlotta, le premier n’était disponible qu’en coffret (chez Carlotta toujours) et le troisième était jusque-là inédit en DVD. Douglas Sirk aimait préciser que l’étymologie du mot mélodrame vient du terme grec mélos, qui désigne une phrase musicale. Le mélodrame serait donc un drame avec de la musique. De fait, la musique joue un rôle primordial dans Les Amants de Salzbourg. Elle est non seulement présente dans le récit, puisqu’un des personnages est un chef d’orchestre, mais elle s’invite également dans chaque scène, jusque dans les moments de dialogue les plus anodins (qu’elle concurrence presque), pour envelopper les personnages dans une atmosphère dramatique. Le film, comme son titre français ne l’indique pas, se déroule à Munich. On y suit l’arrivée en ville de l’américaine Helen Banning, interprétée par la formidable June Allyson, dont la voix à la fois douce et un brin nasillarde évoque lointainement celle, inoubliable, de Jean Arthur. Elle y rencontre un autre américain, Morley Dwyer, jeune carabin et ami de la famille, qui lui fait la cour. Elle passe avec lui du bon temps sans se laisser séduire. C’est en faisant la connaissance de Tonio Fischer, chef d’orchestre à la réputation internationale, qu’elle tombe finalement amoureuse (à l’occasion d’un voyage à Salzbourg, ce qui justifie le titre français). Mais Tonio est marié à une femme qui sombre depuis quelques années dans la folie…

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Les Amants de Salzbourg est un mélodrame d’une grande simplicité, peut-être l’un des plus beaux de Sirk, même s’il n’est pas le plus réputé. D’abord grâce à son récit, aussi limpide qu’inextricable, d’un amour impossible. Grâce à sa mise en scène ensuite, simple, efficace et élégante. Le traitement du personnage de la femme de Tonio est exemplaire de la finesse et de la force de Sirk. La première fois qu’elle apparaît, nous n’avons jamais entendu parler d’elle, et c’est à peine si on la voit. La comtesse qui loge le maestro vient prévenir celui-ci que June Allyson demande à le voir. Tout juste l’aperçoit-on dans la surface vernie du piano ouvert où s’exerce le musicien, assise sur une chaise, en train de l’écouter. Dans ce même plan, dans ce même reflet, on perçoit son mouvement d’inquiétude quand son mari se lève brutalement et quitte la pièce, la quitte. On ne sait alors rien d’elle. Elle n’est qu’un visage aux contours vagues dans l’eau noire d’un quart de queue. Sa seconde apparition intervient au bout d’une heure de film. Les deux amants ont passé ensemble leur première nuit et passent au matin chez la comtesse.

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Helen visite le salon de musique de celui à qui elle vient d’avouer son amour. Elle ignore qu’il est marié. Sa femme apparaît alors au second plan, toujours dans le même fauteuil, comme un fantôme, comme un meuble, et semble moins vivante que son portrait peint qui trône au-dessus d’elle. Quand elle s’éveille pour apostropher Helen, c’est tout son être, tous ses souvenirs qui s’éveillent. Elle se lève et l’invective. Pour la première fois, Sirk ne cadre plus deux interlocuteurs dans le même plan, mais dans deux plans montés consécutivement. Ce simple champ-contrechamp, qui intervient après une heure où Sirk a pris soin de toujours embrasser deux personnages dans un même cadre, suffit à faire sentir toute la violence de la confrontation. À la fluidité de l’amour naissant, souligné par une mise en scène économe, succède la rudesse du conflit, et Sirk élève une notion élémentaire de grammaire cinématographique au rang de figure de style. Dans le dernier tiers du film, Helen lutte entre la tentation de vivre son amour et son sens du devoir, qui lui intime de laisser la place. C’est après avoir sauvé sa malheureuse rivale d’une tentative de suicide, lors d’une scène où la musique de Frank Skinner atteint des sommets, que notre héroïne décide de s’effacer et de rentrer au pays avec son compatriote.

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Le Secret magnifique est l’un des films les plus célèbres de son auteur. C’est une adaptation du roman de Lloyd C. Douglas, pasteur reconverti dans l’écriture de best-seller. On y suit l’histoire de Bob Merrick (Rock Hudson), un jeune fils de famille, égocentrique et riche à million, qui, à la suite d’un grave accident, est sauvé grâce au défibrillateur du docteur Phillips. Mais le docteur est cardiaque, et il succombe lui-même à une crise pendant que son équipe est occupée à sauver le jeune chien fou. Merrick se sent d’autant plus coupable qu’il tombe amoureux de la veuve du bon docteur (Jane Wyman). Il décide de mériter celle qu’il convoite en reprenant le flambeau de son défunt mari, qui avait pour sacerdoce d’aider autrui dans toute la mesure de ses possibilités, sans jamais s’en targuer auprès de quiconque (c’est le secret magnifique du titre). Malheureusement, d’abord mal à l’aise dans le rôle du bon samaritain, il cause un nouvel accident qui fait perdre la vue à sa bien-aimée. Il n’a alors de cesse de lui faire garder l’espoir de recouvrer un jour la vue…

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Le Secret magnifique, réalisé en 1954, est le premier grand mélodrame sirkien. Il souffre en partie de son matériau de départ, un roman indigent qui réduit le message du Christ à une stratégie de boy-scout. Mais Sirk parvient, comme John M. Stahl avant lui (il avait adapté le roman en 1935), à transcender une vision un peu simpliste en mélodrame flamboyant. La recette sirkienne du mélodrame fait mouche et la musique fait beaucoup pour le film. C’est là encore Frank Skinner qui la compose, réarrangeant des lignes mélodiques de célèbres morceaux de classique, comme L’Hymne à la joie de Beethoven ou Tristesse de Chopin. Des morceaux dont les titres résument à eux seuls l’ambition de Sirk : bouleverser son spectateur. Il y parvient en faisant moins cas du principe du récit que des acmés dramatiques qu’il permet. Le film fait d’ailleurs penser, dans sa seconde partie, à l’un des plus grands mélodrames de l’histoire du cinéma : Elle et lui. Renversant la cruauté de McCarey (l’homme, qui ne sait pas que la femme est handicapée, se montre injuste), Sirk met quant à lui en scène un homme qui profite du handicap de la femme (Jane Wyman, aveugle, ignore – du moins c’est ce que l’on suppose – que l’homme qui la charme et lui rend visite chaque jour est le même qui l’a rendu aveugle et qu’elle déteste) pour enfin mériter un pardon auquel il aspire plus que tout. L’histoire se conclut par un happy-end à la fois convenu, rocambolesque et convaincant. Une étrange réussite.

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Capitaine Mystère est le moins célèbre des trois films réédités par Elephant Films. Et pour cause, le maître du mélodrame signe ici un film d’aventures en costume, dans lequel Rock Hudson, encore lui, incarne un célèbre révolutionnaire irlandais au XIXème siècle, entouré de son maître (Jeff Morrow) et de la fille de ce dernier (Barbara Rush – excellente jeune comédienne qui jouait déjà la fille de Jane Wyman dans Le Secret magnifique). Évidemment, il va en tomber amoureux et la conquérir pour finir par l’embrasser sur une plage au soleil couchant. Tiré d’un roman de William R. Burnett, l’un des auteurs les plus adapté par le cinéma américain, Capitaine Mystère a le charme des naïves réécritures hollywoodiennes de l’Histoire. C’est un film captivant et drôle dont l’extrême légèreté séduit. Les extérieurs, très nombreux, ont été tourné en Irlande. Jean-Pierre Dionnet nous raconte dans les bonus comment le chef opérateur, Irving Glassberg, a dû redoubler d’astuce pour donner à voir un pays ensoleillé en tournant constamment sous la pluie. Anecdotes savoureuses en ce qu’elle résume ce film dont les artifices font tout le charme.

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DVD : Ces trois films sont présentés, comme il a été dit plus haut,  par le sympathique Jean-Pierre Dionnet, qui délivre face caméra nombre d’informations éclairantes sur les conditions de production des films, la place qu’ils occupent dans l’oeuvre du cinéaste, ainsi que des anecdotes de tournage. Il présente également Douglas Sirk lui-même dans une vidéo de dix minutes. L’ensemble est un peu court mais pertinent, et Jean-Pierre Dionnet sait faire partager ses enthousiasmes.

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  • LES AMANTS DE SALZBOURG, LE SECRET MAGNIFIQUE, CAPITAINE MYSTÈRE de Douglas Sirk disponibles en DVD et combo Blu-ray & DVD, en version restaurée inédite, dans la Collection CMC (Cinema Master Class), La Collection des Maîtres depuis le 4 avril 2017.
  • Le Secret magnifique (Magnificent Obsession) – 1954 – 1h48
  • Capitaine Mystère (Captain Lightfoot) – 1955 – 1h27
  • Les Amants de Salzbourg (Interlude) – 1957 – 1h29
  • Tarif DVD : 16€99
  • Edition : Eléphant Films

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