Au revoir là-haut de Albert Dupontel : critique

Publié par Cyril Perraudat le 25 octobre 2017

Synopsis : Novembre 1919. Deux rescapés des tranchées, l’un dessinateur de génie, l’autre modeste comptable, décident de monter une arnaque aux monuments aux morts. Dans la France des années folles, l’entreprise va se révéler aussi dangereuse que spectaculaire…

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Au-revoir la-haut de Albert Dupontel - affiche

Au-revoir là-haut de Albert Dupontel – affiche

Albert Dupontel est un véritable artisan du cinéma en évolution ; de Bernie en 1996 à Au revoir là-haut, il a exploré le domaine de la comédie grinçante et corrosive, qui a fait sa marque. Son précédent long métrage, 9 mois ferme fut une réussite critique et publique avec plus de 2 millions d’entrées dans l’hexagone en 2013. Fort de ce statut de réalisateur au succès populaire, il se voit désormais aux commandes d’une œuvre plus ambitieuse, adaptation du roman homonyme de Pierre Lemaitre, récipiendaire du Prix Goncourt en 2013, et déjà décliné en bande dessinée. Le budget ici équivaut au triple de son dernier film, de son propre aveu. Au revoir là-haut devrait s’inscrire comme l’un des événements cinématographiques français de l’automne 2017. Situé à la fin de la Première Guerre mondiale, ce drame s’ouvre sur un impressionnant champ de bataille d’une intensité remarquable, qui démontre toute la maîtrise technique d’Albert Dupontel. Il se montre en effet capable d’orchestrer des scènes à grand spectacle, qui prennent aux tripes par leur âpreté et leur immersion étouffante. On suit ainsi deux soldats qui se rapprochent par la force des choses (l’un est dévisagé, l’autre s’occupe de lui) et le parcours croisé d’un de leur ex-lieutenant détestable juste après la guerre. La réalisation est ample et fluide, conférant une réelle élégance à l’ensemble, et le grain de l’image ancre le film dans son époque. Dupontel parvient avec force à faire cohabiter la comédie, le souffle épique et la tragédie. Il dépeint efficacement une époque troublée où le chaos de la guerre laisse place à un retour à la vie normale, baignant dans une confusion globale dont certains savent tirer profit. Le contraste est justement souligné entre l’héroïsme et le sentiment de perdition qui s’en suit, entre l’intensité des combats et le désintérêt des anciens soldats perdus dans une société française en pleine mutation. La soif de commémoration du peuple est aussi parfaitement retranscrite à travers l’arnaque aux monuments aux morts, édifices très recherchés, fomentée par le duo principal. L’organisation de l’État français est épinglée avec férocité à travers la gestion calamiteuse de certains cimetières militaires où les corps n’étaient pas enterrés aux bons endroits.

 

Au-revoir la-haut

Au-revoir la-haut

 

À travers ses personnages, Au revoir là-haut montre les conséquences physiques terribles de la guerre, tout en donnant à voir la solidarité entre les individus. Mais aussi les petites bassesses et les procédés moraux les plus douteux. Il met ainsi en avant des figures archétypales marquantes, à commencer par un homme dévisagé ornant une multitude de masques, reflets de son état émotionnel (excellent Nahuel Perez Biscayart, vu dans le choc cannois 120 Battements par minute). Celui-ci expose le trauma physique et émotionnel causé par un passé familial lourd, lié à sa relation avec un père qui ne le comprend pas. Laurent Lafitte incarne un salaud de la pire espèce. Cet officier qui déclenche intentionnellement une dernière bataille suicidaire devient le parfait petit capitaliste arriviste avec son business lucratif de faux cercueils. Quant à Dupontel, toujours touchant lorsqu’il s’agit d’incarner des hommes un peu maladroit, il prête ses traits à un homme plein d’humanité confronté aux obstacles. Il a d’ailleurs remplacé quasiment au pied levé Bouli Lanners, prévu à l’origine mais forcé de renoncer peu avant le tournage. Et bien sûr Niels Arestrup, dont le charisme toujours aussi magnétique complète un casting de haute tenue. Mais le film se pare aussi d’un rôle féminin fort intéressant (Emilie Dequenne), pas aussi faible qu’il n’y paraît, et dont la relation avec son mari détourne les codes pré-établis. Son personnage est le moyen de critiquer habilement la condition de la femme docile de l’époque.

 

La bande son apporte un véritable souffle à l’ensemble, tout comme la photographie reste en tout point remarquable. Avec Au revoir là-haut, Albert Dupontel fait donc son entrée dans la cour des grands avec cette adaptation ambitieuse et pleine de justesse d’un succès littéraire.

 

 

 

  • AU-REVOIR LÀ-HAUT
  • Sortie salles : 25 octobre 2017
  • Réalisation : Albert Dupontel
  • Avec : Albert Dupontel, Laurent Lafitte, Nahuel Perez Biscayart, Niels Arestrup, Héloïse Blaster, Emilie Dequenne, Kyan Khojandi, Mélanie Thierry, André Marcon, Michel Vuillermoz, Kyan Khojandi, Gilles Gaston-Dreyfus…
  • Scénario : Albert Dupontel, Pierre Lemaitre d’après son oeuvre
  • Production : Catherine Bozorgan
  • Photographie : Vincent Mathias
  • Montage :  Christophe Pinel
  • Décors : Pierre Quefféléan
  • Costumes : Mimi Lempicka
  • Musique : Christophe Julien
  • Distribution : Gaumont
  • Durée : 1h55

 

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