Synopsis : Professeur de psychologie à Harvard dans les années 30, William Marston mène avec sa femme les recherches sur le détecteur de mensonges. Une étudiante devient leur assistante, et le couple s’éprend de la jeune femme. Un amour passionnel va les lier, et ces deux femmes deviennent pour Marston la source d’inspiration pour la création du personnage de Wonder Woman.
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Un an après le succès de Wonder Woman sort dans l’Hexagone un film sur la genèse du personnage intitulé My Wonder Women. Il est dirigé par Angela Robinson, qui a opéré sur des séries, telles The L Word ou True Blood en qualité de scénariste, productrice ou réalisatrice. Elle n’avait plus offert de film au cinéma depuis 2005 et La Coccinelle revient pour Disney. Il lui a visiblement fallu trouver un thème qui lui tenait à cœur pour revenir derrière la caméra et ça se ressent dans ce film sincère et touchant. Il nous plonge au cœur de l’Amérique conservatrice des années 30 où un couple de scientifiques brillants mène des études sur le détecteur de mensonges et tombe amoureux d’une étudiante devenue leur assistante. Ces sentiments nouveaux ébranlent leurs certitudes et vont à l’encontre des normes de la société, pas prête à accepter ce cas de figure. Cette situation met à mal la carrière professionnelle et la vie privée de chacun mais les deux femmes vont être une grande source d’inspiration pour le Professeur Marston, reconverti désormais en conteur d’histoires et plus précisément créateur de la bande dessinée mythique Wonder Woman. Ce qui frappe dans le film d’Angela Robinson, c’est la subtilité dont il fait preuve dans le traitement des relations entre ses personnages et l’infinie élégance de sa mise en scène, posée et sans artifices. Il aborde de nombreux thèmes, tels que l’émancipation de la femme, la libéralisation des mœurs ainsi que l’inspiration créatrice, en formant un patchwork pertinent qui émeut et donne à réfléchir. C’est un film féministe puissant vu par une réalisatrice qui met en exergue les paroles d’un homme profondément dévoué à cette cause.
Les personnages sont aussi très bien définis dans cette histoire écrite par Angela Robinson elle-même. Ils prennent corps via un trio de stars en état de grâce. Rebecca Hall et Bella Heathcote sont saisissantes dans leurs rôles de femmes aux personnalités diamétralement opposées et pourtant irrésistiblement attirées l’une par l’autre. Luke Evans effectue lui une de ses meilleures prestations dans la peau de cet homme qui va transposer son expérience personnelle dans une œuvre qui va marquer son époque. My Wonder Women retranscrit d’ailleurs très bien le tollé qu’a suscité le comics à sa sortie, graphiquement très inspiré des propres pulsions sexuelles de Marston avec de nombreux dessins considérés comme sadomasochistes par les autorités morales de l’époque.
Articulé autour de ses trois thèmes principaux, le film fait un parallèle parfait entre l’histoire intime de ses protagonistes et la création de la bande dessinée pour valoriser l’image de la femme forte, délivrée de la pression exercée par la société. Il met en avant la liberté des mœurs par le biais d’un ménage à trois difficile à assumer publiquement et parfois personnellement, mais qui paraît pourtant d’un naturel désarmant. Il expose aussi le parcours de personnages aspirant à une vie non conventionnelle, guidée par les sentiments sincères et non les contraintes imposées par une quelconque bienséance ou norme pré-établie. Enfin, il aborde très bien le sujet de l’inspiration créatrice par l’entremise de son personnage masculin clamant lui-même que Wonder Woman est « une déclaration d’amour » faite aux femmes, dont les deux compagnes, avec qui il a partagé la vie, en ont été l’essence. On salut également les cadrages et l’esthétique soignés, notamment la photographie de Bryce Fortner, qui finissent de confirmer toute l’implication que la réalisatrice a mis en œuvre dans My Wonder Women. On tient là un récit brillant sur les origines d’une figure de proue emblématique, toujours d’actualité près de quatre-vingt ans après sa création.
- MY WONDER WOMEN (Professor Marston & The Wonder Women)
- Sortie salles : 18 avril 2018
- Réalisation : Angela Robinson
- Avec : Rebecca Hall, Bella Heathcote, Luke Evans, Connie Britton, Oliver Platt, JJ Feild, Alexa Havins, Allie Gallerani, Chris Conroy, Maggie Castle…
- Scénario : Angela Robinson
- Production : Amy Redford, Terry Leonard
- Photographie : Bryce Fortner
- Montage : Jeffery M. Werner
- Décors : Carl Sprague
- Costumes : Donna Maloney
- Musique : Tom Howe
- Distribution : LFR Films
- Durée : 1h48