Synopsis: François, petit dealer, a un rêve : devenir le distributeur officiel de Mr Freeze au Maghreb. Cette vie, qu’il convoite tant, vole en éclat quand il apprend que Dany, sa mère, a dépensé toutes ses économies. Poutine, le caïd lunatique de la cité propose à François un plan en Espagne pour se refaire. Mais quand tout son entourage : Lamya son amour de jeunesse, Henri un ancien beau-père à la ramasse tout juste sorti de prison, les deux jeunes Mohamed complotistes et sa mère chef d’un gang de femmes pickpockets, s’en mêle, rien ne va se passer comme prévu !
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Présenté à la Quinzaine des réalisateurs 2018, le second long-métrage de Romain Gavras, dont la réputation n’est plus à faire à la réalisation de clip, n’a pas manqué de faire son petit effet. Fort d’un casting cinq étoiles et d’une mise en scène jouissive, Le monde est à toi est une pépite visuelle qui peut se targuer d’apporter quelque chose de frais à la comédie française. Avec pour titre la version francophone de The World is yours, maxime culte de Tony Montana, héros du Scarface de Brian De Palma et presque gourou des criminels actuels, Le monde est à toi convoque violence et personnages improbables dans leur poursuite poétique d’une place au soleil. L’histoire est celle de François (Karim Leklou), au prise avec une mère castratrice cheffe d’un gang de pickpocket (hilarante Isabelle Adjani) qui rêve de devenir le distributeur officiel de la franchise Mr. Freeze au Maroc et de reconquérir son amour de jeunesse et michetonneuse de haut-vol Lamya (Oulaya Amamra). Afin de financer un projet qui a la beauté de paraître presque ringard au regard des activités de ses amis, il accepte de réaliser un gofast jusqu’en Espagne pour Poutine (Sofian Khammes), un gros caïd. Vincent Cassel, après avoir incarné Mesrine, l’un des plus grands bandits français, offre une superbe prestation comique en beau-père à côté de la plaque pris d’une fièvre conspiratrice, motivée par les deux jeunes paumés qui l’accompagnent, Mohammed (Mounir Amamra) et Mohammed (Mahamadou Saengare).
François semble être le seul sain d’esprit, raisonnable au milieu d’une galerie de personnages qui s’opposent, s’arnaquent sans vergogne et se rabibochent. Chacun dans un but et une destinée propre à l’écriture impeccable qui n’est pas sans rappeler l’oeuvre de Guy Ritchie. Le monde est à toi, c’est le tableau d’une vie de gangster avec la preuve à grand renfort de ratés que cette vie n’est pas enviable et amène beaucoup plus d’ennuis que de siestes paresseuses sur des montagnes de dollars. C’est aussi l’occasion de prestations internationales comme celle de Sam Spruell ou encore un cameo savoureux de Miles Kane -dont Romain Gavras a réalisé le clip The Age of the Understatement en 2008- en chanteur de karaoké dans un bar miteux de la Costa Del Sol.
Très graphique, le film propose une photographie saturée dont certains plans rappellent le traitement de la piscine par David Hockney. On apprécie les plans d’ouverture au drone qui filme les cités de banlieue avec fraîcheur et franche beauté ou encore les plans larges zoomés comme interprétation du regard. Dans une histoire somme toute simple et à la mise en scène cacophonique et parfois grandiloquente, Gavras distille tout de même les ingrédients efficaces d’une comédie dont certains moments resteront cultes. Le rythme est bon et le réalisateur fait montre d’une maîtrise de son sujet en s’autorisant même quelques irrévérences. Qu’il s’agisse des théories du complot diffusées sur Youtube et qui trouvent public dans les zones laissées-pour-compte, d’une Adjani en Burkini ou d’un “Allah Akbar” crié afin de détourner l’attention et attirer toutes les polices alentours. Enfin, l’utilisation d’une BO éclectique et qui sert souvent le propos, Le monde ou rien de PNL ou La vie ne m’apprend rien de Balavoine en final ajoute un plaisir immersif qu’on ne peut pas bouder.
- LE MONDE EST A TOI
Sortie salles : 15 août 2018 - Réalisation : Romain Gavras
- Avec : Isabelle Adjani, Vincent Cassel, Oulaya Amamra, Karim Leklou, François Damiens, Philippe Katerine, Gabby Rose, Sam Spruell, Mounir Amamra, Mahamadou Saengare
- Scénario : Karim Boukercha, Noé Debré, Romain Gavras
- Production : Charles-Marie Anthonioz, Mourad Belkeddar, Jean Duhamel, Nicolas Lhermitte, Vincent Mazel, Hugo Sélignac
- Photographie : André Chemetoff
- Montage : Benjamin Weill
- Décors : Clara Alvarez
- Costumes : Hannah Edwards
- Musique : Jamie XX
- Distribution : Studiocanal
- Durée : 1h34