Synopsis : Peter et Sam arrivent dans un prestigieux lycée privé de Bellevue, dans l’État de Washington, pour documenter l’histoire d’un vandale abject surnommé le « Chieur masqué ».
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Sortie discrètement il y a environ un an, American Vandal, série originale Netflix créée par Tony Yacenda et Dan Perrault, surfe sur l’essor que connaissent les docu-séries criminelles ces dernières années. Construite sous forme de mockumentary, elle reprend les codes des documentaires d’enquête, notamment Making a Murderer, un autre produit de Netflix, pour en faire une parodie réaliste. Grâce au #whodrewthedick devenu viral sur le web, la série parvient à attirer des spectateurs intrigués par l’absurdité de son concept. Si la campagne de promotion laisse entendre l’utilisation d’un humour très puéril, ceci ne fait que confirmer le procédé génial sur lequel ce faux documentaire humoristique se construit. À partir d’actes de vandalisme particulièrement stupides, dont on se demande même comment ils peuvent donner lieu à une Å“uvre audiovisuelle, une intrigue avec une structure narrative particulièrement bien ficelée et captivante, pourtant basées sur des évènements banaux, se met immédiatement en place. Les réactions spontanées des personnages sont exagérées et les actes anodins détournés, montrant ainsi comment il est facile de sensationnaliser la banalité sur les écrans. Chaque saison aborde un nombre impressionnant de sujets de manière quasiment innée tout en conservant l’harmonie du fil narratif, ce qui relève de l’exploit pour un format aussi court (huit épisodes de trente-cinq minutes par saison). Dans la saison 2, Peter (Tyler Alvarez) et Sam (Griffin Gluck), les enquêteurs, quittent le lycée public d’Oceanside en Californie pour élucider une affaire au sein d’un établissement scolaire catholique de l’État de Washington. Il est cette fois question de démasquer le « Turd Burglar » qui terrorise les élèves et enseignants avec des actes de vandalisme de nature scatologique. Le casting pour cette seconde enquête est entièrement renouvelé, à l’exception de Tyler Alvarez et Griffin Gluck qui interprètent les investigateurs. Travis Tope, Melvin Gregg, Taylor Dearden, DeRon Horton, Adam Ray et Sarah Burns jouent les rôles des autres personnages centraux impliqués dans le nouveau mystère. La présence d’acteurs quasiment inconnus accentue le réalisme de l’investigation fictive. Â
La deuxième saison conserve la formule simple et efficace, mais dénotant pourtant d’un élan de créativité rare, qui a fait la réussite de la première, tout en changeant totalement le décor de la scène du crime. L’esthétique propre aux émissions d’investigation est maintenue, mais la brillance du soleil californien et des écrans omniprésents au quotidien laisse place à une image beaucoup plus sombre qui fait écho à l’ambiance stricte de cette école religieuse du Nord-Ouest américain pluvieux. La nouvelle saison s’amuse également du succès de la série, et à la même occasion celui de Netflix, avec de nombreuses auto-références. À titre d’exemples, l’un des documentaristes explique comment ils ont été approchés par les dirigeants pour diffuser leur projet scolaire sur la célèbre plateforme et DeMarcus Tillman (Melvin Gregg), le basketteur star du Lycée St. Bernardine salue la caméra qui s’approche de lui sur le terrain par un « Salut, Netflix ! ». En incluant ces auto-désignations dans la trame, American Vandal brouille encore plus les frontières entre fiction et réalité.
Avec un tout premier teaser dans lequel on pouvait voir un album d’élèves en uniforme d’école privée suivi de l’inscription « Peut-on naître au-dessus des lois ? », diffusé presque un an avant la sortie de la saison 2, la piste la plus probable semblait être une suite portant sur le thème des classes sociales. Bien que cette thématique soit présente, l’éventail des problématiques abordées est davantage vaste. En plus, de poursuivre la critique, déjà entamée au cours de la saison précédente, sur le système judiciaire et la célébrité virtuelle, la série s’attaque également ici au poids des valeurs judéo-chrétiennes dans la majorité des pays occidentaux, ainsi qu’à la ressource financière qu’est le sport pour les structures d’enseignement américaines. Cette deuxième saison confirme le prodige d’American Vandal à travers ce mockumentary, véritable prouesse sur plusieurs plans, toujours aussi singulier et chaque fois plus innovant dans son analyse cynique de la société actuelle.
Erica Farges
- AMERICAN VANDAL
- Diffusion : depuis le 14 septembre 2018
- Chaîne/Plateforme : Netflix
- Créateurs : Tony Yacenda et Dan Perrault
- Avec : Tyler Alvarez, Griffin Gluck, Travis Tope, Melvin Gregg, Taylor Dearden, DeRon Horton, Adam Ray, Sarah Burns, Rosario Maggio, Austin Kulman
- Saison 2
- Format épisodes : 8 épisodes de 35 minutes