Résumé : Dans Énigmes, cinéma, Olivier Maillart s’interroge sur notre expérience de spectateur et nous plonge dans les arcanes de l’image filmique. Le cinéma n’est pas qu’une surface fascinante, c’est un labyrinthe constitué d’énigmes où l’on court toujours le risque de se perdre. Arpentant un vaste champ qui va de Debord à Spielberg et de Balzac à Œdipe, en passant par l’étude de procédés cinématographiques singuliers comme le split-screen ou le found footage, l’auteur interroge notre regard sur les images. Sous sa plume, le cinéma se présente autant comme un mystère à décrypter qu’une clef pour comprendre le monde et ses artifices. Il est, en somme, une expérience qui doit nous apprendre à mieux lire les signes qui nous entourent – et donc à mieux vivre.
♥♥♥♥♥
La clé des nombreuses énigmes qui traversent les pages de ce formidable essai signé par Olivier Maillart, professeur, critique et traducteur, est d’emblée révélée par son titre : le cinéma et, partant, la relation qui se tissent entre ses images et le public. À l’instar de l’œil avide du Norman Bates de Psychose représenté en couverture, l’écriture de l’auteur est hantée par la présence d’une figure qui, par son acte même de voyeur, en vient à devenir le sujet d’une représentation constamment réfléchie. Cette auto-réflexivité créative se retrouve dans les nombreux exemples émaillant les propos de Maillart (de Blow Up à Minority Report, en passant par La Stratégie de l’araignée ou Phantom of the Paradise), mais aussi à travers la propre structure de l’ouvrage conjointement hanté par la revenance de séquences cinématographiques et littéraires qui constituent la singularité d’une interprétation labyrinthique. Cette approche pluridisciplinaire a le mérite d’explorer la totalité d’une ontologie qui se rattache autant aux représentations d’un médium qu’au rapport existentiel entre l’Homme et le monde. Ce monde justement, Maillart s’emploie à en explorer les enjeux à travers le prisme de procédés techniques invitant à une relecture de certains films. Ainsi du split-screen dont la puissance démultiplicatrice nourrit moins qu’elle efface la valeur discursive et analytique du regard. Progressivement alors, l’auteur emploie le ton du pamphlet, n’hésitant pas à revenir à la nécessité d’une redéfinition de la posture spectatorielle. L’ouvrage se rattache à l’actualité, accompagnant les réflexions de Jacques Aumont (Que reste-t-il du cinéma ?, J. Vrin, 2013 ; Le montage « la seule invention du cinéma », J. Vrin, 2015) ou de Jean-Louis Comolli (Daech, le cinéma et la mort, Éditions Verdier, 2016) dans une commune volonté de rétablir les assises formelles et romanesques d’un art dans lequel la passivité du spectateur se doit d’être interdite. À ce kaléidoscope de perspectives (une multiplicité qui n’enlève rien à la clarté de l’exposé), il faut remarquer l’élégance de la mise en page (trait caractéristique de la maison Marest), ainsi que la présence d’une bibliographie particulièrement fournie.
- ÉNIGMES, CINÉMA
- Auteur : Olivier Maillart
- Éditions : Marest Éditeur
- Collection : Domaine françaisÂ
- Date de parution : 15 janvier 2019
- Format : 120 pages
- Tarif : 9 €Â