Résumé : Au-delà des connaissances techniques et scientifiques, du savoir-faire professionnel, le soin est une relation entre corps, entre personnes, entre présences, dont la contribution à la guérison ou, du moins, à la participation à la vie est d’autant plus efficace qu’elle est authentique. Elle peut dans ce sens emprunter des voies étonnantes, non conformistes, fantaisistes, mais toujours dans la perspective d’une rencontre. Les œuvres cinématographiques rappellent souvent cette vérité avec justesse et sensibilité. Le cinéma nous interpelle tous parce qu’il est une fenêtre sur le monde, sur des mondes plus ou moins éloignés du nôtre, et parce que le film est un espace-temps qui nous est proposé pour observer ces mondes de près. Le cinéma et ses fictions sont de bonnes occasions pour mener personnellement ou en groupe des exercices d’interprétation, un travail réflexif, pour apprendre, débattre, confronter ses idées et mettre à l’épreuve ses propres positions. C’est à ce cinéma que cet ouvrage fait appel pour réfléchir sur la santé et la maladie, la souffrance et les soins, la médecine et les pratiques hospitalières, le corps et l’expérience vécue. De « Vol au-dessus d’un nid de coucou » à « Intouchables », ses leçons peuvent inspirer aussi bien l’enseignement et la pratique professionnelle que l’intelligence commune.
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Plutôt que d’appréhender la santé et la maladie par le prisme du cinéma, cette étude se propose de déployer ses arguments à l’intérieur d’une synthèse pluridisciplinaire tout à la fois insolite et éclairante. De l’handicape physique à son malaise social, du corps souffrant à son versant médical, Nicolas Vonarx, professeur à l’université Laval (Québec), infirmier et anthropologue de la santé, noue les liens d’une réflexion éthique qui s’articule autour de notions générales (l’altérité, la subjectivité, l’identité, le corps, l’humain…) et de cas particuliers. Ces derniers se concentrent principalement sur les films qui structurent l’ouvrage chapitre par chapitre. American Beauty, Vénus noire, Knock, Elephant Man, ou Intouchables s’offrent comme des points d’entrée permettant d’approfondir certaines thématiques transversales (la nature sociale de la souffrance, la chosification du corps, le pouvoir institutionnel de la santé ou les chemins de traverse de la médecine) tout en illustrant certaines pathologies (la dépression nerveuse, le cancer) ou pratiques thérapeutiques. Bien que ces exemples occupent une place centrale, le lecteur pourra regretter la place mineure accordée aux analyses de séquences dans l’édification théorique entreprise par l’étude, un manque d’autant plus regrettable que les éditions Liber ont eu la bonne idée d’enrichir leur mise en page de différentes captures d’écran noir et blanc et couleur. Le cinéphile pourra ainsi se sentir un peu lésé, la perspective de Vonarx préférant s’appuyer sur les films pour dégager des problématiques qui, sans leur être totalement étrangères, dépassent souvent leur structure initiale. On notera par ailleurs l’absence de tout annexe qui aurait pourtant permis de prolonger les différents axes scientifiques promulgués par l’ouvrage. Au mérite de celui-ci reste l’aboutissement d’une approche qui parvient avec originalité à concilier épistémologie et déontologie au profit d’une connaissance définitivement plurielle.
- SANTÉ ET MALADIE AU CINÉMA – L’éclairage des sciences humaines et sociales
- Auteur : Nicolas Vonarx
- Éditions : Liber
- Date de parution : 10 janvier 2019
- Format : 236 pages
- Tarif : 23 €