Synopsis : Un critique redouté, une galerie glaçante et une assistante ambitieuse s’emparent des tableaux d’un peintre récemment décédé… avec des conséquences funestes.
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En 2014, Night Call avait marqué les esprits par sa critique acerbe et terriblement sombre de la course à l’audimat, tout en livrant une interprétation impeccable d’un Jake Gyllenhaal envoûté. C’était la première réalisation du scénariste Dan Gilroy. Il était donc émoustillant de les voir à nouveau réunis dans Velvet Buzzsaw, un film d’horreur dans le milieu de l’art contemporain estampillé Netflix. Velvet Buzzsaw, c’est le nom d’un groupe de rock punk auquel Rhodora Haze (Rene Russo, aussi vue dans Night Call) avait appartenu avant de devenir une galerie ambitieuse, sans scrupules et dictatoriale. Elle gravite dans l’intelligentsia artistique de Miami Beach, avec le critique d’art glacial et redouté Morf Vandewalt (Jake Gyllenhaal) et l’agent arriviste et snob Josephina (Zawe Ashton, Fresh Meat). Cette dernière découvre, dans son immeuble, l’œuvre d’un artiste reclus fraîchement décédé, Vetril Dease, qu’elle vole. Ses peintures glauques et envoûtantes deviennent vite la coqueluche du monde de l’art, mais les cadavres commencent à s’amonceler… Autant Night Call était sombre et poisseux, autant Velvet Buzzsaw est lumineux et éclairé, mais ce clinquant n’est que le reflet de la superficialité d’un milieu où l’art n’est plus qu’une banale marchandise et où les critiques à l’emporte-pièce font et défont les artistes, où la relation humaine n’est qu’artificielle. Cette critique du milieu est hélas vue et revue. The Square par exemple a bien mieux su la sublimer. Les personnages se contentent ici d’être des caricatures et manquent de développement. Lorsque l’horreur commence, les meurtres ont l’inventivité d’un Destination Finale mais se reposent trop souvent sur le jump scare pour réellement angoisser le spectateur, qui reste sur sa faim.
On a faim parce que la fin est trop vite arrivée, puisque Dan Gilroy sait capter l’intérêt tout au long de son œuvre, qui demeure plaisante, multiplie les sous-intrigues sans perdre son public et saute sans ciller entre slasher et comédie. Velvet Buzzsaw est impeccablement servi par son casting. Outre son trio de tête, dominé par un Gyllenhaal impérial en critique qu’on adore détester, le film regorge de seconds rôles capables de capter l’attention. Citons Toni Collette (Hérédité), superbe en conservatrice aux dents longues, Tom Sturridge (Good Morning England), impeccable en galeriste sournois, Natalia Dyer (Stranger Things) remarquable en assistante paumée, et John Malkovich (qu’on ne présente plus), tout en retenue en artiste sur le retour, mélancolique et porté sur la bouteille. Il faut ajouter une photographie somptueuse, dont certains plans tiennent du tableau.
Que tirer d’un film aussi inégal que Velvet Buzzsaw ? Une moralité où l’art véritable brûle ceux qui veulent l’exploiter sans vergogne, tel Icare face au soleil ? Dan Gilroy a raconté avoir été inspiré par l’échec du projet Superman Lives qui devait être réalisé par Tim Burton avec Nicolas Cage, et auquel il avait contribué au scénario. Il explique avoir décidé de ne plus tenir compte « des critiques ou du succès commercial, mais de créer pour [lui] avant tout (…) puisqu’il aurait mieux fait d’écrire des mots sur le sable pour les voir se faire emporter par les vagues ». Ce qui est justement ce que fait le personnage de John Malkovich durant le générique de fin… Pas de morale pour un milieu sans morale, donc…
Arthur de Boutiny
- VELVET BUZZSAW
- Diffusion : 1er février 2019
- Chaîne / Plateforme : Netflix
- Réalisation : Dan Gilroy
- Avec : Jake Gyllenhaal, Rene Russo, Toni Collette, Zawe Ashton, Tom Sturridge, Natalia Dyer, Daveed Diggs, Billy Magnussen, John Malkovich…
- Scénario : Dan Gilroy
- Production : Jennifer Fox
- Photographie : Robert Elswit
- Montage : John Gilroy
- Décors : Jim Bissell
- Costumes : Iris Mussenden, Trish Summerville
- Musique : Marco Beltrami, Buck Sanders
- Durée : 1h43