Synopsis : Vétéran de la guerre du Vietnam, John Rambo va devoir affronter un cartel mexicain après l’enlèvement de la fille d’un ami.
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Avec Rambo : Last Blood, cinquième épisode de la saga, Adrian Grunberg (Kill the Gringo) s’attaque au légendaire soldat américain imaginé par le romancier David Morrell dans First Blood publié en 1972, et se voit attribuer la lourde tâche de diriger l’infatigable Sylvester Stallone qui, trente-sept ans après avoir incarné le héros dans le premier volet, est parvenu à conserver son trône sur l’autel de la pop culture. En effet, c’est en 1982 que le vétéran du Vietnam, devenu l’un de ses personnages fétiches, trouve le chemin des écrans. Héritier du Nouvel Hollywood, Rambo explore la part d’ombre et le traumatisme d’une Amérique défaite qui doit se reconstruire en oubliant ses héros sacrifiés. Nombreuses sont les légendes qui capitulent : Dustin Hoffman, Al Pacino, Steve McQueen, Clint Eastwood, Nick Nolte, Robert de Niro et Michael Douglas lisent le scénario avant de le refuser, le jugeant trop violent, trop brutal, trop dérangeant. Le cinéaste australien Ted Kotcheff confie alors le rôle à Stallone, la star de Rocky sorti en 1977. L’acteur italo-américain accepte, à condition de transformer le personnage – décrit dans le script comme un psychopathe – en victime de l’armée et de la société. Il veut montrer un homme perdu, hanté par les souvenirs de la guerre, qui, ne parvenant pas à se réinsérer, dissimule son humanité derrière une extrême brutalité. La photographie d’Andrew Laszlo et la musique de Jerry Goldsmith contribueront à faire de Rambo un classique du septième art, succédant à l’explosif Voyage au bout de l’enfer de Micheal Cimino.
Après trois suites à la fois maladroites, patriotiques et pyrotechniques (un retour spectaculaire dans la jungle vietnamienne dans Rambo II, un détour cartoonesque en Afghanistan dans Rambo III ou une véritable boucherie commise en Birmanie dans John Rambo), l’ex soldat, fatigué et désabusé, tente de refaire sa vie chez lui aux États-Unis. Installé dans un ranch de l’Arizona, il lutte contre son stress post-traumatique et doit délivrer sa nièce enlevée par les membres impitoyables d’un cartel mexicain. Fustigé par la critique, Rambo V n’est pas à la hauteur des espérances et embarrasse même le créateur du surhomme armé jusqu’aux dents. Si Adrian Grunberg et « l’Étalon italien » s’inspirent ici de mythes tels que John Wayne ou Clint Eastwood pour tenter de bousculer John Rambo, (anti)héros vieillissant et figure complexe qui fascinent toujours, les personnages manquent cruellement d’épaisseur et ce revenge movie semble prisonnier du matériau dont il s’inspire.
Cet épilogue sombre et sanglant, qui se veut pourtant en phase avec son époque, tombe dans les travers du western moderne caricatural, piégé par un enjeu scénaristique bien maigre et une mise en scène fonctionnelle soumise au surdécoupage de l’action. Car Rambo se doit de ne jamais être un simple guerrier mais plutôt l’immortel symbole d’une réalité politique. La toute-puissance écrasante de l’Amérique reaganienne dépeinte dans Rambo III fait place aux divagations de l’ère trumpienne à travers la symbolique appuyée de la frontière américano-mexicaine. Hélas, là où First Blood montrait le revers de la médaille du rêve américain, Grunberg brûle toutes ses cartouches, ne sachant que faire de la psychologie de cet homme dressé pour tuer, véritable machine faite pour combattre, qui s’use lors d’une grotesque traque souterraine. Colère vengeresse et violence pulsionnelle ensanglantent le décor, brouillent le propos, si bien que Rambo : Last Blood se traîne, s’embourbe et témoigne de l’épuisement de la franchise qui ambitionnait de repousser les limites du film d’action. Un chant du cygne malheureusement raté.
- RAMBO : LAST BLOOD
- Sortie : 25 septembre 2019
- Réalisation : Adrian Grunberg
- Avec : Sylvester Stallone, Paz Vega, Sergio Peris-Mencheta, Adrianna Barraza, Yvette Monreal, Óscar Jaenada, Rick Zingale, Fenessa Pineda, Marco de la O, Sheila Shah, Louis Mandylor, Diana Bermudez, Manuel Uriza, Nick Wittman, Aaron Cohen…
- Scénario : Matt Cirulnick, Sylvester Stallone d’après les personnages de David Morrell
- Production : Avi Lerner, Kevin King Templeton, Yariv Lerner, Les Weldon
- Photographie : Brendan Galvin
- Montage : Carsten Kurpanek, Todd E. Miller
- Décors : Franco-Giacomo Carbone
- Costumes : Cristina Sopeña
- Musique : Brian Tyler
- Distribution : Metropolitan FilmExport
- Durée : 1h40