Résumé : Les combats héroïques de Garibaldi pour unifier l’Italie, le sacrifice exalté des légionnaires de Mussolini dans le désert de Libye, la vie quotidienne à Florence au temps de Dante… Mais aussi l’érotisme sulfureux des Amants diaboliques, les caprices des divas ou les crimes d’honneur napolitains. Le cinéma italien a fait preuve entre 1922 et 1945 d’une vivacité et d’une créativité qui n’ont rien à envier à ses homologues européens. Que l’on songe aux exploits du colosse Maciste, star mondiale des années 1920, aux superproductions comme Scipion l’Africain et sa troupe d’éléphants, à La Couronne de fer, étonnant film précurseur de l’heroic fantasy, et c’est un tout un continent oublié et poétique de l’histoire du septième art qui apparaît. Un cinéma de propagande aussi, mais non dénué de subversion, où la réalité et l’invention sont souvent bien plus fortes que tous les discours officiels. En plusieurs centaines d’entrées, ce dictionnaire propose pour la première fois au public français de découvrir une période fondatrice qui, de Luchino Visconti à Totò, en passant par Vittorio De Sica, Roberto Rossellini, ainsi que la création de Cinecittà et celle de la Mostra de Venise, porte en germe ce qui fera la gloire du cinéma italien d’après-guerre.
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Le premier intérêt de ce dictionnaire tient aux deux décennies qui encadrent son propos : 1922-1945, soit de l’arrivée de Mussolini au pouvoir jusqu’à la fin de la Seconde guerre mondiale et l’émergence du néoréalisme italien. Il faut en effet remarquer que cette période fut longtemps mise de côté par les critiques et les historiens du cinéma, à l’exception notable de Nino Frank et de son admirable Cinema dell’Arte (dont la première édition remonte tout de même à 1951) et des deux ouvrages de Jean A. Gili consacrés à la question (L’Italie de Mussolini et son cinéma, 1985 ; Le cinéma italien à l’ombre des faisceaux, 1922-1945, 1990). Alessandro Corsi, titulaire d’un master en terminologie et traductique de l’Inalco, professeur de langue italienne et traducteur indépendant, nous invite donc à découvrir la richesse d’une cinématographie que l’on a trop souvent limitée aux exemples des fameux « téléphones blancs ». Grandes figures, films, genres, institutions et événements historiques structurent les nombreuses entrées de l’ouvrage. L’exhaustivité encyclopédique dont profite celui-ci est encore renforcée par les longs développements apportés par Corsi. Loin de se limiter à une simple énumération de faits, de dates ou de noms, l’auteur envisage chacun de ses termes selon un panorama historique élargie qui permet de comprendre leurs fondements et leurs évolutions dans l’histoire. Ainsi, de la question des actrices et acteurs ou du réalisme qui permet de distinguer certains phénomènes typiques de l’art cinématographique transalpin (le « divismo » par exemple). Parallèlement, certaines entrées (le Centre expérimental de cinématographique, le documentaire) informent sur la conduite future des réalisateurs du néoréalisme, ou interrogent indirectement certaines problématiques contemporaines (la constante popularité de la Mostra de Venise, la désaffectation progressive de Cineccità). Cette érudition se retrouve dans les annexes de l’ouvrage. À la bibliographie sélective (dans laquelle manque l’ouvrage susmentionné de Nino Frank) s’ajoute une large filmographie qui revient de façon utile sur la disponibilité de chaque film mentionné (présence ou non d’une édition DVD ou VHS). On ne peut donc attendre qu’une chose de ce beau dictionnaire : la publication d’un second et d’un troisième volume qui permettront d’envisager l’ensemble de l’histoire du cinéma italien à la lumière de cette réflexion féconde.
- DICTIONNAIRE DU CINÉMA ITALIEN. DE LA MARCHE SUR ROME À LA RÉPUBLIQUE DE SALO (1922-1945)
- Auteur : Alessandro Corsi
- Éditions : Vendémiaire
- Collection : Dictionnaire cinéma
- Date de parution : 3 octobre 2019
- Format : 648 pages
- Tarif : 30 €