Livre / Sous la peau de Scarlett Johansson : critique

Publié par Jacques Demange le 10 juillet 2020

Résumé : Scarlett Johansson. On entend déjà la star à l’intérieur de ce patronyme. Quelques lettres apposées simplement les unes aux autres et qui veulent pourtant tout dire. Une combinaison parfaite de syllabes lascives, qui rejoindront les combinaisons de cuir ou de peau pixélisées qu’elle portera au plus près d’elle devant nos yeux beaucoup trop éloignés.  Scarlett Johansson. On entend les courbes serpentines des lettres qui se répercuteront sur les courbes de son corps. Un nom quasiment performatif. Si je le répète une troisième fois, la verrais-je apparaître derrière moi ?  Scarlett Johansson… Raté. On entend les origines danoises, les voix de ces sirènes mythologiques d’Andersen, envoûtantes de gravité, nous chantant un Summertime qui nous fera désirer nous noyer directement dans l’abîme de l’écran. Pauvres marins cinéphiles que nous sommes, nous nous trouvons déjà égarés alors que le film n’a même pas encore commencé. Scarlett Johansson. On entend la fascination. Celle des réalisateurs. La vôtre. La mienne. La nôtre donc. Fascination face à cet être constamment amputé de ses parties mais qui reste capable d’incarner un tout. Le corps et la voix. La chair et l’esprit. L’auteure tente de saisir ce petit plus qui permet à un simple être humain de devenir une déesse au sein du panthéon des stars de cinéma.

♥♥♥♥

 

Sous la peau de Scarlett Johansson

Sous la peau de Scarlett Johansson

À l’origine de l’ouvrage de Céline Staskiewicz, ancienne étudiante en cinéma à l’université Panthéon-Sorbonne et employée au sein des sociétés de production The Film et The Film Tv, il y a le mystère dispensé par la vision d’un corps et l’écoute d’une voix. Corps sensuel, voix cassée, corps qui se dérobe à la vue, voix qui s’impose au regard. Il y a donc, au cœur de la persona de Scarlett Johansson un paradoxe à la fois identitaire et esthétique que l’auteure parvient à développer et décrypter d’une brillante manière. S’inscrivant la perspective des star studies (champ d’études consacré aux stars de cinéma), cet essai dévoile différentes facettes d’une figure majeure du cinéma contemporain pour réactualiser certaines problématiques de mise en scène. Façonnée par le cinéma de Woody Allen qui sut valoriser ses différents atouts, Johansson propose une filmographie à la croisée des tendances. Entre blockbusters (la franchise des Avengers, Lucy, Ghost in the Shell) et cinéma d’auteur (Her de Spike Jonze, Under the Skin de Jonathan Glazer, Marriage Story de Noah Baumbach…), la star déborde les carcans établis pour affirmer l’éclectisme de sa présence. Cette défiance à l’égard des normes, Staskiewicz la perçoit comme un acte de résistance. Au-delà des atours de la star mythifiée par le classicisme hollywoodien, Johansson exprime une volonté d’indépendance qui lui permit de dépasser sa fonction de Galatée allenienne. L’idée est intéressante, d’autant plus que son analyse n’est jamais forcée, le cadre théorique semblant toujours partir des films et non l’inverse. De fait, ses limites sont suffisamment souples pour s’ouvrir sur différentes pistes de réflexion. Ainsi de la question du numérique comme principe de remodelage et d’évanescence du corps mis au service d’un discours purement formel ou directement critique.

 

La réussite de l’entreprise menée par Staskiewicz oblige pourtant à regretter qu’elle ne soit pas allée un peu plus loin. La question du jeu de Johansson reste ainsi en berne (quelles sont en effet ses spécificités en tant qu’actrice au-delà du simple motif réflexif de la blondeur ?), de même que la lignée généalogique reprise et/ou débutée par la star (certains modèles sont ainsi esquissés, à l’image de Nicole Kidman, mais il aurait été intéressant d’interroger les possibles héritières de Johansson, comme Margot Robbie, par exemple).

 

Ces petits écueils restent pourtant mineurs au regard de la clarté d’un exposé qui ne manque pas de profondeur. La qualité d’analyse de l’auteure est par ailleurs parfaitement relayée par la mise en page des éditions Rouge Profond qui, comme à leur habitude, ont agrémenté l’écriture de nombreuses captures d’écran de bonne qualité.

 

 

 

  • SOUS LA PEAU DE SCARLETT JOHANSSON
  • Autrice : Céline Staskiewicz
  • Éditions : Rouge Profond
  • Collection : Raccords
  • Date de parution : 18 juin 2020
  • Langues : Français uniquement
  • Format : 142 pages
  • Tarif : 19 €

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