Résumé : Depuis les années 2000, la fiction s’est peuplée de créatures artificielles et d’humains augmentés, de mondes virtuels ou parallèles, d’intelligences artificielles et de mondes postcataclysmiques qui renouvellent les questionnements sur l’identité humaine. Avec l’avènement des séries à narration complexe, la fiction explore à l’écran les possibles devenirs de l’humain. En s’appuyant sur des séries qui hybrident science-fiction et récit policier, ce livre étudie les représentations du posthumain à l’écran. De Fringe à Westworld, de Person of Interest à Sense8, Mr Robot ou The Expanse, des héros faisant office de détectives du futur croisent androïdes, cyborgs, robots et clones dans des séries télévisées qui nous interrogent sur l’avenir de l’être humain.
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C’est une évidence qui explique l’origine de cet ouvrage, telle qu’ainsi énoncée par l’auteure dès ses premières pages : « les séries télévisées sont devenues omniprésentes dans le paysage culturel contemporain ». Professeure en Études anglophones à l’Université de Bretagne Occidentale, spécialiste de littérature policière, fantastique et de fiction spéculative de la fin du XIXe siècle, Hélène Machinal propose d’ouvrir ce constat à une série de pistes interprétatives aussi intéressantes que précises dans leur développement. En interrogeant le post-humain et les figures qui lui sont rattachées (du robot totalement régi par une intelligence artificielle à l’androïde partiellement humanisé), cette étude prouve qu’au-delà du simple renouvellement d’une typologie déjà éprouvée en littérature et au cinéma, les séries contemporaines parviennent à interroger les nouveaux modes d’existence qui fondent nos rapports aux machines. Car en choisissant de se concentrer sur la figure du détective, Machinal met à jour les singularités de productions qui ont toutes en commun un désir de déchiffrer et de décrypter l’évolution de l’humain et de ses représentations. Altered Carbon, Dark Matter, Westworld, Scherlock, Person of Interest, Black Mirror, Mr. Robot, ou encore Leftlovers se proposent comme des réflexions sur une humanité décomposée et dont les lambeaux s’apparentent à une série d’indices.Â
L’intérêt de la réflexion de Machinal est de ne jamais s’abandonner à une analyse factuelle. Si chaque série du corpus profite de prolongements uniques, l’auteure n’oublie jamais de faire de leurs récits et de leurs mises en scène un moyen de revenir à une préoccupation plus générale qui concerne nos rapports aux écrans, aux interfaces et à nos existences (dé)doublées par le virtuel. Parce que scientifiquement poussée, l’écriture se veut exigeante et prend parfois le risque d’exclure le lecteur non-averti.
Il convient cependant de remarquer que Machinal évite soigneusement toute posture jargonneuse, une habilité qu’accompagne directement la mise en page et la structure des Presses universitaires François-Rabelais dont on a déjà loué ici l’excellence éditoriale. La présence d’encarts permet ainsi de revenir sur certains concepts ou certaines formules développés à travers des définitions claires et concises. Le recours aux illustrations permet de son côté de vivifier la réflexion et d’en matérialiser les enjeux les plus importants.
Ces différentes qualités font de cette étude aussi profuse que cohérente une authentique réussite pluridisciplinaire, touchant à la fois aux questions relatives aux images et à leur forme (sérielle), ainsi qu’à nos propres pratiques d’usagers écraniques.
- POSTHUMAINS EN SÉRIE. LES DÉTECTIVES DU FUTUR
- Autrice : Hélène Machinal
- Éditions : Presses universitaires François-Rabelais
- Collection : Sérial
- Date de parution : 26 novembre 2020
- Langues : Français uniquement
- Format : 390 pages
- Tarifs : 28 €