Synopsis : Formé par le vieux Merlin, l’illusionniste Corky Withers rencontre le succès à partir du jour où il introduit dans son spectacle une marionnette à son image, nommée Fats. Ventriloque, Corky détourne l’attention du public grâce aux plaisanteries de Fats : autant Corky est gentil et effacé, autant Fats est vulgaire et agressif. Bientôt possédé par sa marionnette, celle-ci l’entraîne à commettre des actes diaboliques et meurtriers.
♥♥♥♥♥
Soyons honnêtes, il est difficile de considérer Richard Attenborough comme un auteur à part entière. Sans doute plus reconnu pour ses seconds rôles d’acteur, le cinéaste britannique se présente comme un solide artisan, à l’aise avec l’épique et apte à superviser de grosses productions (Un pont trop loin ; Gandhi ; Cry Freedom ; Chaplin ; War and Destiny). Étonnant alors de le voir créditer comme réalisateur de ce singulier objet cinématographique qu’est Magic (1978), tant le film de genre semble éloigné de ses préoccupations premières. Et pourtant, la qualité du film tient peut-être justement à l’identité d’Attenborough. Comme si le cinéaste était parvenu à plier son tempérament académique aux exigences du registre horrifique. Magic relève d’une grande maîtrise qui s’exprime d’abord par l’extrême discrétion de sa mise en scène. Conscient des modulations rythmiques nécessaires à la réussite du sujet, Attenborough alterne magnifiquement les temps forts et les temps morts, laissant les premiers s’insinuer graduellement dans les seconds. Côté effets, le réalisateur a eu l’intelligence de s’en remettre à ses collaborateurs de création : Jerry Goldsmith qui propose une composition musicale nuancée accompagnant magnifiquement les accentuations dramatiques du scénario ; Victor J. Kemper dont la photographie confère une sorte d’unité aux séquences de jour et de nuit à travers son usage d’une lumière automnale ; et, bien sûr, Anthony Hopkins, interprète principal du film.
Seconde collaboration de l’acteur avec Attenborough après Un pont trop loin, Magic lui offre la possibilité d’asseoir la valeur d’un style de jeu fondé sur une profonde ambivalence. Avec sa coupe au bol et son regard plein de candeur, l’acteur pose les bases du charme magnétique qui fera la force de son futur Hannibal Lecter. Les éclats de colère ponctuant son interprétation laissent entrevoir une force pulsionnel qui s’imprime sur son regard, ses attitudes et ses gestes. Loin de s’en remettre à la seule fonction de ventriloque de son personnage, Hopkins parvient à intégrer le caractère maléfique du pantin à travers la fébrilité qui agite ses apparitions à l’écran, raidissant ses membres et les traits de son visage de manière à confondre la nature du marionnettiste avec celle de son instrument de travail.
En ce sens, il n’est pas anodin de remarquer que Magic soit sorti la même année que le Halloween de John Carpenter. Les deux films partagent en effet cette troublante association entre la caractérisation réaliste de la figure horrifique et le respect à l’ordre surnaturel du fantastique. Du masque dont s’affuble Michael Myers à la marionnette transportée par Corky Withers, le lien entre ces deux tendances s’établit à travers l’idée d’un transfert. Surtout, les deux films partagent ce goût pour la belle forme qui, à grands renforts d’élégants travellings, semble anoblir l’attrait exercé par le cinéma de genre, ouvrant la voie à une nouvelle décennie marquée par une stylisation extrême des effets horrifiques.
L’édition proposée par Rimini impressionne principalement par la grande qualité de ses bonus. Deux interviews de Hopkins permettent ainsi de comprendre l’intérêt qu’avait pu trouver l’acteur pour ce double rôle, ainsi que son implication pour sa préparation (s’efforçant de maîtriser quelques tours de magie, mais prenant aussi des cours de ventriloquie). À ces précieux témoignages s’ajoutent un entretien avec le directeur de la photographie Victor J. Kemper, ainsi qu’un documentaire sur le ventriloquisme qui permet de revenir sur l’histoire de cette pratique et comprendre les raisons pour lesquelles le genre fantastique en fit l’un de ses motifs de prédilection.
- MAGIC
- Édition : Combo Blu-ray + DVD + Livret / Master Haute Définition
- Date de sortie : 12 février 2021
- Réalisateur : Richard Attenborough
- Avec : Anthony Hopkins, Ann-Margret, Burgess Meredith, Ed Lauter, E.J. André, Jerry Houser, David Ogden Stiers, Lillian Randolph
- Scénario : William Goldman (adapté de son roman)
- Producteurs : Joseph E. Levine et Richard P. Levine
- Photographie : Victor J. Kemper
- Montage : John Bloom
- Musique : Jerry Goldsmith
- Distribution : Rimini Éditions
- Durée : 107 minutes
- Sortie initiale : 8 novembre 1978 (États-Unis)
- Tarifs : : 24,90 €