Synopsis : Dans sa deuxième année de lutte contre le crime, Batman explore la corruption qui sévit à Gotham City et comment elle pourrait être liée à sa propre famille, les Wayne. En parallèle, il enquête sur les meurtres d’un criminel qui pose des énigmes dans ses lieux de crimes, nommé Riddler.
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Parmi les films les plus attendus de 2022, The Batman faisait clairement partie des premiers noms. Même les tribulations hasardeuses de la Warner qui, à la poursuite du succès du Marvel Cinematic Universe, auront mené à l’échec de Justice League, n’auront su faire oublier le héros de la trilogie du Dark Knight de Christopher Nolan. Et il y avait de quoi placer de hautes attentes dans le film. À à la réalisation, nul autre que Matt Reeves, à l’origine de la brillante résurrection de La Planète des Singes, qui s’était payé le luxe de démarrer sa carrière avec rien de moins que Cloverfield. Comme dans ses précédentes œuvres, Reeves explore ici la bestialité de ses personnages : Ici, Batman n’a que deux ans d’activité. Il est encore marqué par le traumatisme de la mort de ses parents, que tout le monde connaît suffisamment pour que le film s’en économise la rediffusion. Il est en proie à une sévère dépression, qui est aussi celle qui envahit toute l’œuvre dès son magistral quart d’heure d’ouverture. Car la noirceur du héros va ici de pair avec son environnement. Quand Nolan montrait une ville rongée par le crime, mais peuplée de gens de bonne volonté, prêts à aller dans le sens de l’homme-chauve-souris, The Batman arrive dix ans après, dans des États-Unis où le traumatisme n’est plus une attaque de terroristes afghans mais une prise d’assaut de son Capitole par sa propre population. En résulte une figure de Batman toujours à deux doigts de sombrer dans le côté obscur, opposé à une population dans laquelle le mal peut se nicher absolument partout. Vient s’ajouter à cette vision profondément nihiliste une enquête centrée sur la profonde corruption qui régit toutes les institutions de la ville de Gotham, allant jusqu’à remettre en question la figure ô combien tutélaire de Thomas Wayne.
Car jamais Batman n’a été autant ancré dans sa définition initiale, à savoir celle du « meilleur détective au monde ». Pour ce faire, Reeves est allé puiser chez les meilleurs, depuis le film noir classique jusqu’au polar fincherien, tout en osant la violence graphique en mettant en scène un Riddler glaçant qui allie l’esthétique du tueur du Zodiaque au machiavélisme de Jigsaw. Il en résulte un Batman qui se mêle beaucoup plus des scènes de crimes, déchiffre les indices, et pas seulement dans le confort de sa Batcave aux côtés d’Alfred.
Matt Reeves ne se refuse pas non plus d’étincelantes scènes d’action, que ce soit l’incroyable course-poursuite avec la Batmobile présente dans la bande-annonce, ou bien des scènes de corps-à -corps que la caméra de Matt Reeves explore dans les moindres recoins. Toutes subliment une ville de Gotham entre rétro-futurisme et gothisme à la Burton, dans laquelle Batman s’affirme comme une sorte d’alter ego au Rorschach de Watchmen, commentant en voix-off ses mésaventures au sein d’une ville où, faute de justice, il cherche sa vengeance, jusqu’à en faire son nom quasi-unique dans tout le film.
Cette noirceur désespérée qui transparaît dans tout le film doit beaucoup à son casting, impeccable à tous les niveaux. Outre le terrifiant Riddler de Paul Dano, Zoë Kravitz incarne une Catwoman qui parvient assez bien à casser avec l’image de faire-valoir dont le personnage pouvait pâtir auparavant, Colin Farrell donne à son Pingouin truand des accents DeNiro-esques, Andy Serkis convainc en Alfred, mais c’est bien Jeffrey Wright qui s’impose incontestablement comme le meilleur commissaire Gordon depuis Gary Oldman. Quant à Robert Pattinson dans le rôle-titre, s’il marque clairement moins les esprits en Bruce Wayne, son implication tantôt brutale tantôt élégante dans le costume de Batman rend évident son choix pour qui pouvait encore en douter.
Tout ce casting est mis en ténèbres par la photographie de Greig Fraser, que Reeves a rencontré sur ses Planète des Singes, et accompagné par l’incroyable bande originale de Michael Giacchino, qui signe des thèmes iconiques, pour un film appelé à le devenir tout autant.
Théotime Roux
- THE BATMAN
- Sortie salles : 2 mars 2022
- Réalisation : Matt Reeves
- Avec : Robert Pattinson, Zoë Kravitz, Paul Dano, Colin Farrell, Jeffrey Wright, Andy Serkis, John Turturro, Peter Sarsgaard…
- Scénario : Matt Reeves et Peter Craig
- Production : Matt Reeves et Dylan Clark
- Photographie : Greig Fraser
- Costumes : David Crossman, Glyn Dillion et Jacqueline Durran
- Musique : Michael Giacchino
- Distribution : Warner Bros.
- Durée : 2h55
- Site officiel du filmÂ