Synopsis : Journaliste politique en disgrâce placée à la rubrique football, Mademoiselle Pove est sollicitée pour suivre l’entre-deux tours de la campagne présidentielle. Le favori est Pierre-Henry Mercier, héritier d’une puissante famille française et novice en politique. Troublée par ce candidat qu’elle a connu beaucoup moins lisse, Mademoiselle Pove se lance dans une enquête aussi étonnante que jubilatoire.
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Albert Dupontel revient sur le devant de la scène tel un funambule en équilibre sur le fil du discours politique et social et de la screwball comedy. Il aime confronter les riches et les pauvres, les gens « normaux » et les bizarres. Second Tour, dont le titre est sans doute le plus austère et le plus parlant de sa filmographie, semble être une sorte de suite logique à Adieu les Cons (2020). La saveur aigre du dénouement de son dernier film présage l’humeur sombre du début de Second Tour. Nous sommes dans l’entre-deux -tours de l’élection présidentielle, Pierre-Henry Mercier est le favori du scrutin, il reste quatorze jours pour gagner. Après un grave accident de voiture, qui s’avère être une tentative d’assassinat dont il sort indemne, une journaliste, placardisée aux actualités du football, est rappelée pour suivre la campagne. Elle va découvrir les secrets les plus enfouis du candidat. Ces derniers vont éloigner le film du récit politique pour le rapprocher progressivement de ce que Dupontel aime le plus : les relations humaines et leurs problématiques sous-jacentes. Sans se départir de sa patte comique cinglante et ironique, Second Tour prend des airs de thriller, voire de film d’action. À travers un montage dynamique, qui rappelle cette course frénétique au vote et à la gloire présidentielle, Dupontel dépeint un environnement chaotique et absurde du monde dans lequel nous vivons. Sans en faire un discours purement engagé, le réalisateur sème, ici et là, des idées écologiques sur l’état d’urgence de la planète et sa vision des autorités politiques et des médias.
En incluant dans son récit un apiculteur autiste, qui prend toute son importance dans la deuxième moitié du film, Albert Dupontel lance quelques piques, toujours teintées d’humour. Les médias, eux, sont mis à mal à travers deux personnages loufoques, assurant la part humoristique. Deux journalistes, Melle Pove (Cécile de France) et son collègue Gus (Nicolas Marié), mènent l’enquête sur le candidat. À l’image d’un récit cartoonesque, les deux protagonistes se trouvent à maintes reprises empêchés par des ennemis, mais finissent par découvrir une histoire complexe et touchante.
Si l’on peut reprocher l’humour très peu subtil de ce duo, notamment celui de Gus qui ne se prive pas de lancer des jeux de mots lourdauds, Dupontel gagne toujours son pari personnel de divertissement. À l’instar du très célèbre Le Dictateur ou Les temps modernes de Charlie Chaplin, Second Tour pince le public comme pour réveiller les consciences, sans jamais tomber dans le propos moralisateur. Au travers de personnages attachants, dont il est lui-même l’excellent interprète, il réussit à trouver l’équilibre entre le discours politique et le divertissement burlesque, le sérieux et la fantaisie, l’inquiétude et l’espoir. Comme l’évoque la citation mise en exergue de son film, tiré du documentaire sur Robert Kennedy, qui a été l’une de ses plus grandes inspirations, « La seule façon de renverser le système, c’est d’appartenir au système ».
Eugénie Le Quillec
- SECOND TOUR
- Sorties salles : 25 octobre 2023
- Réalisation et Scénario : Albert Dupontel
- Avec : Cécile de France, Albert Dupontel, Nicolas Marié, Uri Gavriel, Philippe Uchan, Catherine Schaub-Abkarian, Gilles Gaston-Dreyfus, Scali Delpeyrat…
- Photographie : Julien Poupard
- Production : Catherine Bozorgan
- Décors : Mathieu Junot
- Montage : Christophe Pinel
- Costumes : Mimi Lempicka
- Musique : Christophe Julien
- Distribution : Pathé Films
- Durée : 1 h 35