Un vieil homme, persuadé qu’il a gagné le gros lot à un improbable tirage au sort pour correspondance, cherche à rejoindre le Nebraska pour y recevoir son gain. Sa famille, inquiète de ce qu’elle perçoit comme un début de sénilité, envisage de le placer en maison de retraite, mais de ses deux fils se décide à l’emmener en voiture pour récupérer ce chèque auquel personne ne croit. En chemin, le père se blesse les obligeant à s’arrêter quelques jours dans sa petite ville natale du Nebraska. Epaulé par son fil, le vieil homme retrouve tout son passé.
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Alexander Payne marque son retour avec un délicieux et mordant road movie familial dont il est coutumier, présenté en compétition officielle au dernier festival de Cannes. Après nous avoir fait voyager dans les caves de la Californie avec Paul Giamatti dans l’excellent Sideways, et à Hawaï avec George Clooney pour The Descendants, tous deux gagnants de l’Oscar des meilleurs scénarios, le cinéaste américain nous embarque cette fois dans le Nebraska avec l’excellent Bruce Dern, récompensé par la Palme de la meilleure interprétation masculine. L’acteur américain de 77 ans est exquis dans son rôle de Woody, un vieil homme triste, marié et père de famille, persuadé d’avoir gagné un million de dollars à un tirage au sort. Cela lui redonne la vitalité et un but dans sa vie : récupérer à tout prix son gain dans le Nebraska. Bien sûr sa femme et ses deux fils se rendent compte de la duperie de ce type de courrier, mais l’un de ses fils, incarné avec sensibilité et tendresse par Will Forte, qui semble le plus proche de lui et le mieux à même de le comprendre, décide malgré tout de l’emmener pour endiguer son obsession de prendre la route à pied. Dans cette escapade marquée par le détour inattendu dans le passé de cet homme dans sa petite ville natale, Alexander Payne, lui-même originaire d’Omaha dans l’État du Nebraska, nous trace surtout le portrait d’une famille qui va réapprendre à se retrouver et à se connaître.
Si sa femme à la répartie incisive, campée par la pétillante et mordante June Squibb, nommée à l’Oscar du meilleure second rôle – qui retrouve le cinéaste après Monsieur Schmidt aussi présenté à Cannes en 2002 -, et son autre fils, campé par Bob Odenkirk, le génial avocat mafieux de Breaking Bad, redoutent un début de sénilité, ils font néanmoins partie de l’aventure. Leurs personnages font d’ailleurs tout le sel de cette comédie dramatique. Au centre des retrouvailles avec les vieilles connaissances de Woody, ils ne manquent pas d’agir rapidement comme des rapaces à l’annonce de ce faux gain. Dotée d’une photographie brillante et intense en noir et blanc, Nebraska renoue ainsi avec un certain cinéma américain indépendant au cachet rétro où le temps semble s’arrêter. Si pour la première fois, Alexander Payne ne prend pas la plume avec son collaborateur habituel Jim Taylor, l’auteur Bob Nelson, qui signe son premier scénario de long, offre un voyage narratif touchant et émotionnel, nourri par de succulentes réparties dans certaines séquences particulièrement cocasses. On retient notamment la scène désopilante du vol du compresseur ou encore celle plus émouvante de l’achat de la camionnette. Le réalisateur livre une mise en scène toujours aussi fluide et aérée dans des plans d’ensembles éloquents et efficaces, mais Nebraska le présente ici surtout plus en forme et savoureux que jamais…
- NEBRASKA d’Alexander Payne en salles le 2 avril 2014.
- Avec Bruce Dern, Will Forte, June Squibb, Bob Odenkirk et Stacy Keach.
- Scénario : Bob Nelson.
- Producteurs : Ron Yerxa, Albert Berger.
- Photographie : Dennis Washington.
- Musique : Mark Orton.
- Montage : Kevin Tent.
- Son : Richard Ford, Frank Gaeta, Patrick Cyccone.
- Distribution : Diaphana
- Durée : 1h50.
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