Synopsis : 1995, près de Rome, Vittorio et Cesare, qui se connaissent depuis 20 ans, sont comme des frères inséparables. Leur quotidien se résume aux discothèques, à l’alcool et aux trafics de drogues… Mais ils paient cher cette vie d’excès. Après avoir rencontré Linda, Vittorio semble vouloir changer de vie. Cesare, lui, plonge inexorablement.
♥♥♥♥♥
Décédé avant la fin du montage des suites d’une longue maladie à l’âge de 67 ans le 26 mai 2015, Claudio Caligari n’a pu donc terminer seul Mauvaise Graine, son troisième long métrage de fiction. C’est un de ses amis, acteur et producteur Valerio Mastandrea qui s’en est chargé. Claudio Caligari a commencé sa carrière à la fin des années 70, avec plusieurs documentaires sur le monde de la drogue et les collectifs militants italiens. Amore Tossico, son premier film sorti en 1983, est quasiment devenu culte de l’autre côté des Alpes, décrivant de manière crue et violente la dépendance à l’héroïne. Le cinéaste nous replonge ici dans l’univers des stupéfiants, comme une sorte de prolongement de Amore Tossico. Le récit, situé dans les années 1990, raconte le parcours chaotique de Vittorio, interprété par Alessandro Borghi (Suburra), et Cesare, joué par Luca Marinelli (LA GRANDE BELLEZZA – notre critique). Les deux jeunes hommes sont des amis d’enfance qui ne se quittent pratiquement jamais ; trafic et consommation de drogues constituent l’essentiel de leurs occupations. Claudio Caligari décrit avec justesse ce milieu de la drogue dans la banlieue romaine, qui fait partie intégrante du quotidien de la population. Il fait même vivre des familles entières, représentant une véritable économie. Le cinéaste narre ainsi le chemin tumultueux et désespéré de ses deux héros et dresse un portrait précis et intéressant de leurs personnalités complexes et assez opposées. Si Cesare agace par son arrogance et son impétuosité, il parvient à devenir attachant lorsqu’il s’occupe de sa mère et de sa nièce, une fillette orpheline et malade. Vittorio incarne, quant à lui, plutôt la voie de la sagesse, essayant de se sortir de la spirale infernale de la drogue. Sa rencontre avec Linda provoque le déclic ; il décroche un vrai travail de maçon et tente de faire revenir Cesare sur le droit chemin. Mais le côté écorché vif de son imprévisible ami complique tout. Si l’aspect obscur et brut de ce film posthume est totalement assumée, Claudio Caligari se laisse néanmoins enfermer par son sujet ; l’intrigue tourne parfois en rond et l’issue semble impossible. Il en résulte quelques longueurs et séquences superflues. Cependant, Mauvaise Graine tire son épingle du jeu grâce à un propos pertinent et au talent de ses comédiens. Caligari, qui se réclamait de l’héritage de Pasolini, dresse une peinture sociale aboutie respectant les thématiques et les codes du genre dans le cinéma italien, comme l’exaltation des sentiments, la noirceur, la verve des dialogues et la fougue des personnages.
.
Christophe Binet
.
.
.
- MAUVAISE GRAINE (Non Essere Cattivo) réalisé par Claudio Caligari en salles le 11 mai 2016.
- Avec : Luca Marinelli, Alessandro Borghi, Silvia D’Amico, Roberta Mattei, Alessandro Bernardini, Valentino Campitelli, Danilo Cappanelli, Manuel Rulli, Elisabetta De Vito, Alice Clementi…
- Scénario : Claudio Caligari, Francesca Serafini, Giordano Meacci
- Production : Paolo Bogna, Simone Isola, Valerio Mastandrea
- Photographie : Maurizio Calvesi
- Montage : Mauro Bonanni
- Décors : Giada Calabria
- Costumes : Chiara Ferrantini
- Musique : Paolo Vivaldi
- Distribution : Bellissima Films
- Durée : 1h40
.