Synopsis : D’après l’incroyable histoire vraie de la plus grande catastrophe pétrolière de l’histoire. La plateforme Deepwater Horizon tourne non-stop pour tirer profit des 800 millions de litres de pétrole présents dans les profondeurs du golfe du Mexique. Mike Williams, électricien sur la plateforme et père de famille, connaît les risques de son métier mais fait confiance au professionnalisme de son patron Jimmy Harrell. En revanche, tous se méfient de la société locataire de la plateforme dirigée par Donald Vidrine, qui ne pense qu’à son bénéfice. Lorsque cette société décide contre l’avis des techniciens de la déplacer trop rapidement, ils sont loin de se douter que les 5 millions de barils sous leurs pieds sont prêts à exploser… Le seul courage de Mike et ses collègues suffira-t-il à limiter les dégâts et sauver ce qui peut encore l’être ?
♥♥♥♥♥
Entre deux blockbusters de science-fiction plutôt bourrins (Hancock, Battleship), Peter Berg se construit une carrière de spécialiste du films tirés de faits réels (Le Royaume, Du sang et des larmes, et prochainement Traque à Boston). Si sa veine « politique » le tire parfois vers un Oliver Stone naïf, c’est bien du côté de Paul Greengrass et de Michael Mann que son cinéma trouve ses échos les plus sincères. Dans sa première partie, Deepwater est en mode reportage télé, une combinaison hyperréaliste entre montage cut et décadrages incessants. Berg filme ainsi des professionnels sur leur lieu de travail en n’omettant aucun détail superflu – du jargon technique aux blagues salaces – et délimite efficacement les enjeux et les rapports de force en présence. Sa mise en place est certes didactique, car il nous cartographie pour ainsi dire la plateforme pétrolière, mais elle s’avère des plus pertinentes pour la suite des événements. Tout dans cette première heure – de la présentation des personnages à la mise en place du cadre spatio-temporel, en passant par une montée progressive du suspense à base de bulle dans l’eau – s’avère un modèle du film catastrophe. Mais lorsque la « catastrophe » se produit, tout dérape. L’urgence de la situation n’engendre aucune idée visuelle et narrative, qui pourrait apporter une certaine fraîcheur au genre. L’approche frontale de l’événement perd de son intérêt lorsqu’il s’éparpille en multipliant les points de vue. La force du film devient pour ainsi dire sa faiblesse. À vouloir offrir le plus bel hommage à ses personnes et rendre justice à leurs actes héroïques, le trop-plein de personnages handicape la structure du récit.
.
.
Alors qu’il brillait dans sa première partie avec un cinéma plus intime, centré autour du personnage de Mark Walhberg, parfait en redneck bouffi, Deepwater finit submergé par l’envergure de son genre. Il ne sait plus quel personnage suivre, quel point de vue adopter, quelles images utiliser (numériques ? réelles ? archives ?). Les détails qui faisaient sa force au départ (les vues dans les tuyaux de forage, les conflits sur les questions techniques…) n’ont plus leur place dans la seconde partie (la très mauvaise scène de l’oiseau mazouté). Le dynamisme du récit est complètement rompu. Dans son cinéma, Berg semble souvent incapable de basculer du très grand au très petit, et inversement. Et en prenant de l’altitude – cette fameuse hauteur réflexive – Deepwater repose sur des artifices bien trop éculés. Des variations d’échelle que Mann et Greengrass maîtrisent le plus souvent. Mais ce qui le motive ici, ce n’est pas la portée économique de l’accident, voire ses répercussions écologiques, mais bien les Américains ordinaires qui risquent leur vie tous les jours sur ce « puits de l’enfer ». À la hauteur de vue du héros, le film s’avère dès lors captivant, et foisonne d’idées pour nous immerger dans le quotidien exigeant de la vie d’une plateforme. Malgré son budget considérable – 110 millions de dollars –, ce blockbuster prévaut ainsi pour ses qualités « documentarisantes » sur ce milieu méconnu, sur ses travailleurs invétérés et méticuleux, et sa capacité à construire un véritable suspense avec pour seul et unique mot : pression.
.
.
.
- DEEPWATER de Peter Berg en salles depuis le 12 octobre 2016.
- Avec : Mark Wahlberg, Kate Hudson, Kurt Russell, John Malkovitch, Dylan O’Brien, Gina Rodriguez, Brad Leland, J.D. Evernmore…
- Scénario : Matthew Sand, Matthew Michael Carnahan d’après l’œuvre de David Barstow, David Rohden, Stéphanie Saul
- Production : Lorenzo di Bonaventura, Mark Vahradian, David Womark, Stephen Levinson
- Photographie : Enrique Chediak
- Montage : Colby Parker Jr., Gabriel Fleming
- Décors : Chris Seagers, Victor J. Zolfo
- Costumes : Kasia Walicka-Maimone
- Musique : Steve Jablonsky
- Distribution : SND
- Durée : 1h47
.