Synopsis : La Méditerranée, l’été : une mer d’azur, un soleil de plomb… et 250 kilos d’or volés par Rhino et sa bande ! Ils ont trouvé la planque idéale : un village abandonné, coupé de tout, investi par une artiste en manque d’inspiration. Hélas, quelques invités surprises et deux flics vont contrecarrer leur plan : ce lieu paradisiaque, autrefois théâtre d’orgies et de happenings sauvages, va se transformer en un véritable champ de bataille… impitoyable et hallucinatoire !

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Laissez Bronzer les Cadavres - affiche

Laissez Bronzer les Cadavres – affiche

Cinéastes français basés à Bruxelles, Hélène Cattet et Bruno Forzani sont à l’origine de deux longs métrages (Amer, L’Etrange Couleur des Larmes de ton Corps) à l’univers halluciné et baroque. Reprenant les codes du giallo, ces deux œuvres, qui relevaient davantage d’une expérimentation visuelle et sonore que d’une fiction à proprement parler, avaient divisé les cinéphiles : génial hommage pour les uns, exercice de style virant au fétichisme pour les autres. A contrario de ce Laissez bronzer les cadavres, qui profite de son statut d’adaptation de roman pour offrir une véritable unité scénaristique. De l’œuvre éponyme de Jean-Pierre Bastid et Jean-Patrick Manchette, roman noir se déroulant au bord de la Méditerranée, Cattet et Forzani conservent l’ambiance viscérale et poisseuse tout en faisant à nouveau preuve d’une impressionnante créativité formelle, d’autant plus précieuse qu’elle est rare dans le paysage cinématographique français. Le récit propose une unité de temps (une journée complète), de lieu (un huis clos à ciel ouvert) et d’action (le sort de quelques individus ameutés par un pactole). Fidèle au roman, l’heure précise est régulièrement indiquée, avec quelques retours en arrière pour revoir un temps fort différemment, au travers des yeux d’un autre personnage. De cette construction, il ressort une impression de folie contenue qui explose sporadiquement lors de scènes faisant preuve d’une violence jouissive. L’action peut se montrer confuse, car on a parfois du mal à comprendre où se situent certains personnages et qui leur tirent dessus. Mais cet aspect reste néanmoins secondaire, tant l’intérêt du film repose avant tout sur le voyage sensoriel qu’il propose.

 

Laissez bronzer les Cadavres

Laissez bronzer les Cadavres

 

Cattet et Forzani nous offrent une réalisation ultra-référencée, invoquant le cinéma bis italien et l’esthétique pulp sans pour autant les pasticher, dans un déluge d’images qui réjouissent la rétine des cinéphiles. Si l’on retrouve certains codes du giallo (érotisation saturée, usage de l’hémoglobine), les réalisateurs les couplent avec une célébration du western spaghetti à la Sergio Leone : de la maison isolée aux duels de regards lors de scènes de repas tendus, traversées de gros plans et d’inserts, en passant par la réutilisation de certains thèmes d’Ennio Morricone. Tournée au format 16mm, l’image a ce grain particulier propre au cinéma d’exploitation, mais cela n’empêche pas une stylisation poussée de chaque plan qui évoquent autant de compositions picturales. Cette impression est renforcée par le travail constant sur la couleur, avec une alternance des teintes primaires dans un usage monochromique, symbolisant la mer, le sang, la terre et l’or ; éléments au cœur de la photographie. Le travail sur le design sonore vient compléter cette expérience sensorielle avec une amplification du moindre coup de feu, du moindre mouvement brusque. Le tout crée une véritable synesthésie, un tourbillon de sons et de couleurs où se mélangent le sang et l’or fondu, le corps sexualisé d’Elina Löwensohn et la carcasse d’une chèvre qu’on dépèce. L’impression de vertige est complétée par un montage saccadé, parfois à la limite de l’épileptique.

 

Laissez bronzer les cadavres

Laissez bronzer les cadavres

 

Les acteurs s’en donnent à cœur joie, et il est plaisant de retrouver ici Stéphane Ferrara ou encore le chanteur de Trust, Bernie Bonvoisin. Mais le choc vient d’Elina Löwensohn, égérie du réalisateur Bertrand Mandico. Tour à tour artiste barrée, objet sexuel, elle se meut en idole païenne du désir, dans des scènes oniriques qui poussent très loin l’expérimentation visuelle autour du bondage (et autres paraphilies…), avant de se transformer en figure mystique d’une vengeance implacable, à la frontière du surnaturel. Terrassant mais euphorisant, Laissez Bronzer les Cadavres est une louange adressée au cinéma de genre, venant de deux cinéastes prometteurs qui, œuvre après œuvre, développent un univers cohérent et de plus en plus maîtrisé. Il est important de soutenir cette forme de cinéma, véritablement audacieuse dans le paysage français.

 

Paul Laborde

 

 

 

  • LAISSEZ BRONZER LES CADAVRES
  • Sortie salles : 18 octobre 2017
  • Réalisation : Hélène Cattet et Bruno Forzani 
  • Avec : Elina Löwensohn, Stéphane Ferrara, Bernie Bonvoisin, Marc Barbé, Marine Sainsily, Hervé Sogne, Pierre Nisse, Michelangelo Marchese…
  • Scénario : Hélène Cattet et Bruno Forzani, d’après le roman de Jean-Pierre Bastid et Jean-Patrick Manchette
  • Production : Eve Commenge, François Cognard
  • Photographie : Manuel Dacosse
  • Montage : Bernard Beets
  • Décors : Alina Santos
  • Musique : Yves Bemelmans, Benoît Biral, Dan Bruylandt, réutilisation de thèmes de Ennio Morricone
  • Distribution : Shellac 
  • Durée : 1h30

 

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