Synopsis : Lors d’une livraison, Jongsu, un jeune coursier, tombe par hasard sur Haemi, une jeune fille qui habitait auparavant son quartier. Elle lui demande de s’occuper de son chat pendant un voyage en Afrique. À son retour, Haemi lui présente Ben, un garçon mystérieux qu’elle a rencontré là-bas. Un jour, Ben leur révèle un bien étrange passe-temps…
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Le réalisateur sud-coréen Lee Chang-dong revient en Compétition officielle huit ans après Poetry, prix du scénario à Cannes. Avec Burning, il signe un drame immersif percutant inspiré de la nouvelle Barn Burning de Haruki Murakami, publié dans le New Yorker en 1992. On suit ainsi la trajectoire d’un jeune homme réservé et silencieux en milieu rural, passionné de Faulkner et qui aspire à devenir écrivain. Il retrouve une ancienne camarade de lycée dont il tombe amoureux, jusqu’au jour où elle part en vacances au Kenya pour revenir deux semaines plus tard accompagnée d’un riche coréen mystérieux avec une Porsche Carrera et un curieux passe-temps ; celui de brûler des serres abandonnées tous les deux mois. Cela lui permet d’évacuer sa colère et sa rage réprimée envers cette société. Commence alors une relation ambiguë et étrange, centrée sur un triangle amoureux singulier. Le malaise s’installe d’emblée pour ce jeune garçon apathique, invité à un dîner par son (ex-)petite amie dans l’appartement luxueux du nouveau compagnon. Il continue de garder le silence lorsqu’ils viennent à leur tour dans sa ferme pour fumer un joint. Lee Chang-dong filme au plus près ses personnages dans cette Corée contemporaine où se creuse de plus en plus le fossé des classes sociales. Il capte avec intérêt l’intimité de ces échanges où chacun dévoile une part de sa vie, de ses sentiments, de ses peurs et de ses craintes. Tout bascule lorsque la jeune femme se volatilise mystérieusement. Cette disparition soudaine de l’être aimé provoque un bouleversement notoire chez ce garçon. Il se lance alors dans une quête obsessionnelle pour la retrouver à travers cet homme séduisant et énigmatique, qui reste totalement étranger à la situation, soulignant avec ironie qu’elle est comme partie « en fumée ». La caméra de Chang-Dong joue astucieusement avec cette ambiguïté qui entoure ce personnage, nous laissant envisager plusieurs pistes possibles. Cette ironie et cette distance vont aussi servir de catalyseur pour notre garçon affable et silencieux, consumé par l’incompréhension, la frustration et la colère. Rattrapé par son obsession, il va progressivement s’extirper de son apathie pour s’exprimer trouver un sens à ce monde rempli de mystères. Chang-Dong signe ainsi un drame incandescent qui explore les thèmes de la frustration, des émotions réprimées, de la jalousie et du statut social. Burning est comme un volcan en éruption, trop longtemps resté en sommeil, esquissant un portrait saisissant de la jeunesse coréenne.
- BURNING (Buh-Ning)
- Sortie salles : 29 août 2018
- Réalisation : Lee Chang-dong
- Avec : Yoo Ah-In, Steven Yeun, Jeon Jong-seo
- Scénario : Lee Chang-dong, Oh Jung-mi d’après l’oeuvre de Karuki Murakami
- Production : Lee Chang-dong
- Photographie : Alex Hong Kyung-Pyo
- Montage : Da-won, Kim Hyun
- Décors : Shin Jum-hee
- Costumes : Chung-yeon Yi
- Musique : Moog
- Distribution : Diaphana
- Durée : 2h28