Synopsis : Un poste de police. Un tête-à-tête, en garde à vue, entre un commissaire et son suspect.

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Au Poste – affiche

Artiste aux multiples casquettes, Quentin Dupieux, alias Mr Oizo, réalise toujours des œuvres cinématographiques surréalistes et décalées. Il continue dans cette voie avec Au Poste !, une comédie délirante brillamment portée par le duo Benoît Poelvoorde/Grégoire Ludig (émission Palmashow). Comme à son habitude, le cinéaste-musicien exprime ses nombreux talents en assurant plusieurs fonctions pour l’élaboration de son long-métrage, il en est non seulement le réalisateur, mais aussi le scénariste, directeur de la photographie et monteur. Le pitch est simple : un interrogatoire pour résoudre une affaire de meurtre dans un poste de police. Le témoignage du suspect (Grégoire Ludig) est tellement ordinaire que le commissaire Buron (Benoît Poelvoorde) s’ennuie. Les attentes induites par cette apparente banalité sont déjouées par des dialogues invraisemblables, des gags visuels et des répétitions comiques. Le huis clos du commissariat sans fenêtre au décor minimaliste et austère, élaboré par Joan Le Boru, compagne du réalisateur, libère cet endroit de toute logique qui s’applique normalement au monde réel. Au Poste ! détourne également les repères classiques des thrillers policiers, qui y sont utilisés pour prendre une tournure à l’encontre de toute raison, comme lorsque Buron demande à Fugain de lui décrire le cadavre. L’illogisme est amplifié par l’époque indéfinie, des objets tout droit sortis des années 1970 : la machine à écrire de Buron côtoie la Game Boy des années 1990 de son fils (Orelsan) et le portable à clapet des années 2000 avec lequel Fugain appelle les secours.

Benǫt Poelvoorde et Gr̩goire Ludig РAu Poste!

Pour son sixième long-métrage, le cinéaste réunit un casting éclectique, Poelvoorde et Ludig sont rejoints par des humoristes (Marc Fraize, Philippe Duquesne…), le rappeur Orelsan et l’actrice Anaïs Demoustier. Sans oublier la présence d’Alain Chabat, ou plutôt de sa voix, pour les hurlements de la victime du meurtre, clin d’œil à Réalité, le précédent long-métrage de Dupieux, dans lequel il interprète un aspirant réalisateur qui tente de manière obsessionnelle de trouver le cri parfait pour son film d’horreur.

Au Poste ! est rythmé et structuré, en grande partie, autour des conversations entre les personnages, souvent reprises plusieurs fois de façon différente. Les mots remplacent la musique, quasiment absente, bien que la première séquence s’ouvre sur un concert. Le tic de langage « c’est pour ça » répété à l’excès, est ce qui lie Philippe (Marc Fraize), chargé de « garder un œil » sur Fugain pendant l’absence de Buron, à Fiona (Anaïs Demoustier), sa petite amie, pour finir par contaminer les autres. Une temporalité particulière, où la nuit semble éternelle, s’établit à partir des flashbacks déclenchés par les « allers-retours », et non les « va-et-vient », de Fugain le soir du crime. L’éventualité que le soleil se lève à un moment semble tellement insensée que seules les séquences représentant des souvenirs inventés se passent de jour. L’absurdité des dialogues fait écho à celle de l’image et à la loufoquerie des personnages. 

Avec Au Poste !, Dupieux signe une comédie excentrique et délirante qui s’inscrit dans le registre du nonsense.

Erica Farges

• AU POSTE !
• Sortie salles : 4 juillet 2018
• Réalisation : Quentin Dupieux
• Avec : Benoît Poelvoorde, Grégoire Ludig, Marc Fraize, Anaïs Demoustier, Orelsan, Philippe Duquesne, John Sehil, Jeanne Rosa, July Messéan, Michel Hazanavicius, Pedro Winter, Alain Chabat
• Scénario : Quentin Dupieux
• Production : Thomas Verhaeghe et Mathieu Verhaeghe
• Photographie : Quentin Dupieux
• Montage : Quentin Dupieux
• Décors : Joan Le Boru
• Costumes : Isabelle Pannetier
• Musique : David Sztanke
• Distribution : Diaphana
• Durée : 1h13