Résumé : Quand Pasolini, le réalisateur le plus controversé, adapte au cinéma le marquis de Sade, l’écrivain le plus controversé, cela donne « Salò ou les 120 journées de Sodome ». Se référant tout autant à la filmographie de Pasolini qu’à sa biographie, ce livre décrypte les éléments sur lesquels repose « Salò ou les 120 journées de Sodome ». Ce premier volume aborde tour à tour sa charge politique, sa dimension symbolique si puissante, la complexité de sa construction, les thèmes aussi bien universels qu’intemporels qui l’animent, et les coulisses du tournage afin de retracer sa genèse.
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Si Salo se présente sans doute comme l’œuvre de Pasolini la plus connue du grand public, Benjamin Berget, auteur d’articles et d’études consacrés au jeu vidéo et de « livres dont vous êtes le héros » (sous le pseudonyme de B.B. Wismerhill), prend soin de replacer la sulfureuse production au sein d’un champ contextuel élargi. C’est en effet l’ensemble de la filmographie pasolinienne qui intéresse l’auteur en premier lieu. Le retour, chapitre par chapitre, sur l’ensemble des films permet de développer en une centaine de pages de nombreux points biographiques et d’éclairer l’arrière-plan historique et politique qui ne cessa d’agiter la création du réalisateur italien. De Accattone à Fascista, Berget brasse la totalité des réalisations (documentaires et épisodes réalisés pour des films collectifs compris) pour cerner les points de raccord et de rupture qui travailleront l’ultime production de Pasolini. Aux rapports politiques les plus évidents (critique du capitalisme, relation ambigüe au communisme et plus généralement aux mouvements révolutionnaires), l’auteur rappelle les exigences personnelles du cinéaste que l’on retrouve à travers un développement plutôt approfondi du contexte de production et de réception de chaque film envisagé. Cette précision qui prend parfois le risque du trop-plein propre à toute profusion se retrouve dans la large partie consacrée à Salo. Les origines du film sont parfaitement explicitées, de même que les détails de sa réalisation (écriture du scénario, lieux de tournage, casting…). Tout cela étant déjà bien connu des inconditionnels de Pasolini, le véritable intérêt se trouve plutôt du côté des prolongements que trace Berget. L’interprétation se situe du côté des thématiques que l’auteur se propose de réunir sous la déclinaison de différentes critiques émises par le film et de grands axes transversaux (relation de la fiction à l’Histoire, apport plus ou moins concluant de la psychanalyse, singularités stylistiques).
En ressort la représentation d’un film dont l’inachèvement signe l’accomplissement et sur lequel Berget devrait encore revenir dans un second volume. Ces indéniables qualités d’écriture et de structure restent néanmoins inféodées aux inévitables écueils de l’édition indépendante. À l’austérité de la forme (quoique rehaussée par la présence de captures d’écran d’assez bonne qualité) répond la présence de coquilles qui, ici et là, entache quelque peu le plaisir pris à la lecteur, ainsi que l’absence de bibliographie (manque d’autant plus étonnant que l’auteur a pris soin de multiplier les références). Ces défauts mis à part, cet ouvrage se présente comme une excellente introduction à Salo et à l’œuvre de Pasolini en général.
- PASOLINI. MORT POUR SALO (OU LES 120 JOURNÉES DE SODOME)
- Auteur : Benjamin Berget
- Éditions : Independently published
- Date de parution : 11 octobre 2020
Langues : Français uniquement - Format : 417 pages
- Tarifs : 16,88 €