Synopsis : La Terre a été détruite par une guerre de religion. Pour sauvegarder l’espèce humaine, deux robots et des embryons humains sont envoyés sur une planète vierge Kepler 22b, afin d’y reconstruire une nouvelle civilisation.
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Pour cette série dystopique aux accents bibliques et métaphysiques, Ridley Scott entame sa première incursion dans l’univers sériel. Producteur et réalisateur de deux épisodes, il s’entoure ici du scénariste Aaron Guzikowski, qui a notamment collaboré avec Denis Villeneuve pour le scénario de Prisoners en 2013. Celui-ci n’est pas à sa première série, on lui doit déjà The Red Road, genre policier écologique sur fond de drame personnel et d’héritage ancestral. Dans Raised by Wolves, on retrouve les grands thèmes chers au réalisateur de Blade Runner et d’Alien. Le récit se concentre sur deux androïdes, Père et Mère, envoyés sur la planète vierge Kepler 22b, avec à leur bord des embryons humains. Ils sont en charge d’élever des enfants et de recréer une civilisation dans un univers austère et aride. Parallèlement sur la Terre, Marcus et Sue, persécutés pour leur athéisme, sont à la recherche de leur fils Paul, enlevé par les nouveaux dirigeants religieux appelés les mithraïques. Dès le premier épisode, les problématiques sont posées via les ravages de la religion et de la persécution par les fanatiques pour gagner les non croyants à leur cause. Le pouvoir des technologies remplace ici peu à peu l’humain, même dans ce qu’il a de plus intrinsèque, entre l’affectif et le rôle de modèle. La parentalité est utilisée comme un vecteur d’humanisation qui semble influencer Mère. Elle attribue d’ailleurs ses élans émotionnels à des dysfonctionnements.
Le robot deviendrait-il sensible et doué d’émotion au contact de l’homme ? Sempiternelle question. Et c’est symboliquement montré lors de la scène de la naissance du premier enfant. L’androïde verse une larme et réagit comme le ferait une mère humaine sous l’œil étonné de son binôme masculin. Mais la technologie la rattrape et ses maîtres brident ses nouvelles sensations afin de garder la mainmise sur son fonctionnement et ne pas perdre de vue leur cap. Elle doit se contenter de remplir sa mission : cultiver leur nouvelle terre promise et la repeupler régulièrement.
Le casting international est très bien choisi. Dans le rôle de Mère, on découvre l’actrice danoise Amanda Collin, vue dans la série Délivrance, Les Enquêtes du département V ou encore Darkland. Elle offre un jeu tout en justesse et en automatisme qui s’équilibre parfaitement entre froideur et empathie. Sa palette nuancée surprend tout au long, avec subtilité, pudeur et rage affirmée. D’autres belles surprises aussi, avec les interprétations de l’Anglais Abubakar Salim (Père), aperçu dans la série historique Jamestown, de l’Australien Travis Fimmel (Marcus), rendu populaire dans Vikings, et de l’Irlandaise Niamh Algar (Sue), venue du cinéma indépendant et qui a récemment incarné le rôle principal dans le drame Calm with Horses. Force, présence et charisme nourrissent ainsi la dimension de leurs personnages.
La violence est aussi omniprésente, dans la répression et la persécution des païens. Croire ou mourir. Mais également dans la possessivité entre les machines et leurs précepteurs. Ici, il est question de se soumettre pour éviter des punitions corporelles et mentales. Un cercle vicieux et sans fin prend dès lors place. Si l’humain n’obéit pas à son semblable, les technologies appliquent la manière forte. Belle illustration d’ailleurs de l’adage selon lequel l’homme est un loup pour l’homme. La série achève son esthétisme en injectant de l’onirisme à travers le personnage de Sol dans les derniers épisodes, qui apporte une touche de mysticisme et de mystérieux.
Face au succès de cette première saison, et à l’instar de sa précédente série Westworld, qui explorait l’intelligence artificielle et la fin de l’humanité, HBO a naturellement annoncé une nouvelle salve d’épisodes. Mais en raison des longs délais de production de la chaîne câblée, réputée pour ses créations ambitieuses, et de la pandémie de Covid-19, la suite n’arrivera pas avant 2022. Aaron Guzikowski a cependant révélé dans une récente interview que cinq saisons seraient au moins prévues et qu’il connaît déjà le fin mot de l’histoire.
Lydie Hans
- RAISED BY WOLVES
- Date de diffusion : depuis le 3 septembre 2020 (HBO Max) – depuis le 7 décembre 2020 (Warner TV)
- Création : Aaron Guzikowski
- Réalisation : Ridley Scott, Luke Scott, Alex Gabassi, Sergio Mimica-Gezzan, James Hawes
- Avec : Amanda Collin, Abubakar Salim, Winta McGrath, Travis Fimmel, Niamh Algar, Jordan Loughran, Ethan Hazzard, Felix Jamieson, Aasiya Shah, Ivy Wong, Matias Varela…
- Scénario : Aaron Guzikowski, Heather Bellson, Karen Campbell, Sinead Daly, Donald Joh
- Production : Ridley Scott, John Kuyper, Cheryl Eatock
- Durée : 10 épisodes de 42 à 55 minutes