Synopsis : Bruce Wayne est déterminé à faire en sorte que le sacrifice ultime de Superman ne soit pas vain; pour cela, avec l’aide de Diana Prince, il met en place un plan pour recruter une équipe de métahumains afin de protéger le monde d’une menace apocalyptique imminente. Désormais unis, Batman, Wonder Woman, Aquaman, Cyborg et Flash réussiront-ils à sauver la planète de Steppenwolf, DeSaad, Darkseid et de leurs terribles intentions ?
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Sans doute inquiété par le sort réservé à Tenet, la Warner a jugé plus profitable de se focaliser sur les écrans domestiques, diffusant sur sa plateforme VOD, HBO Max, des films à l’origine destinés à une sortie en salles. Souvent critiquée pour son opportunisme et son prosaïsme, cette stratégie n’a pourtant pas que des mauvais côtés. Ainsi, de la possibilité qui nous est aujourd’hui offerte de découvrir la version de Justice League imaginée par Zack Snyder. Remplacé au moment du montage par Joss Whedon, le réalisateur avait désavoué le film lors de sa projection sur grand écran en 2017, rappelant qu’un certain nombre de scènes n’avaient pas été tournées par ses soins et que l’atmosphère générale du film avait largement pâti de cette reprise en main. Cet aveu faisait suite à la réception mitigée de la production auprès de la critique et des fans. Sur bien des points, le Justice League de Whedon soufrait en effet d’un décalage profond avec l’univers obscur qui caractérise l’identité de la maison DC Comics pour se proposer comme une variation maladroite autour de l’esthétique pop des films Marvel. Justice est donc rendue avec la diffusion de cette version qui vient redéfinir l’étiquette même de « Director’s cut ». Car entre le Justice League projeté en salles et celui diffusé sur HBO Max, rien, ou presque, ne subsiste. Totalement refondu pour atteindre une durée de quatre heures, le montage supervisé par Snyder ne propose pas seulement l’intégration de scènes coupées, mais la présence de séquences qui furent tournées au courant de l’année 2020 afin de respecter au maximum la vision originelle du cinéaste qui peut se réjouir d’avoir pu imposer la totalité de ses choix artistiques (jusqu’à la musique, la présence d’une bande-musicale composée par Junkie XL venant remplacer celle de Danny Elfman).
Qu’apporte alors ce nouveau Justice League par rapport à l’ancien ? D’abord et principalement un caractère contemplatif naturellement favorisé par la longueur de cette version. Les scènes d’action respectent bien la coda du film de super-héros en fragmentant au maximum le découpage, mais le soin apporté à la photographie et l’intérêt que porte Snyder à l’environnement visuel de son film frappe l’esprit du spectateur. La lumière grisâtre qui parcourt le film favorise le rapprochement entre les différents héros dont le caractère léthargique accompagne l’ambiance générale du récit.
L’approche de Snyder se situe à la croisée de deux attitudes plus ou moins opposées et dont le rassemblement se présente comme un authentique tour de force. D’abord, la tendance artistique que Christopher Nolan avait su inscrire à l’intérieur de la mythologie du super-héros cinématographique avec sa trilogie The Dark Knight (2005-2012) ; ensuite, le respect des codes institués par le blockbuster contemporain à travers le recours à des effets visuels voyants et quelque peu tapageurs.
Car au-delà de la réhabilitation de certains personnages qui avaient été abandonnés par la version officielle (Iris West et surtout Cyborg dont le rôle devient ici central), c’est bien cette forme synthétique qui saura captiver les cinéphiles. Snyder reprend à son compte le cahier des charges techniques institués par le film de super-héros (vues aériennes, décors et personnages de synthèse, virtualisation des mouvements d’appareil) pour les investir d’un tempo plus profond qui enrichit l’impératif de l’action d’une authentique volonté de description.
Cet dimension descriptive permet en définitive d’inscrire ce Justice League comme un jalon essentiel de l’œuvre de Snyder. C’est en effet la personnalité de l’auteur qui profite le plus de la sortie de cette nouvelle version. Plus qu’à Man of Steel (2013) et Batman v Superman (2016), ses précédentes productions DC Comics, c’est à 300 (2006), Watchmen (2009) et Sucker Punch (2011) que ce Zack Snyder’s Justice League fait penser. Même volonté de décomposer l’action à travers un creusement de la surface du cadre, même intérêt pour les rapports métaphoriques et visuels institués par le montage parallèle, même focalisation sur l’élément naturel dont le cinéaste s’emploie à recomposer l’essence à travers sa recomposition de synthèse.
Les fans de la Justice League comme ceux de Snyder peuvent donc se montrer enthousiastes : la vision du cinéaste respecte la tradition DC tout en retrouvant la superbe qui caractérise sa propre manière.
- ZACK SNYDER’S JUSTICE LEAGUE
- Diffusion : depuis le 18 mars 2021
- Plateforme / Chaîne : HBO Max
- Réalisation : Zack Snyder
- Avec : Ben Affleck, Henry Cavill, Gal Gadot, Jason Momoa, Ezra Miller, Ray Fisher, Amy Adams, Jeremy Irons, Diane Lane, Joe Morton, Ciaran Hinds, Connie Nelsen, Ray Porter, J.K. Simmons, Robin Wright, Jared Leto, Joe Manganiello…
- Scénario : Chris Terrio, d’après une histoire de Chris Terrio, Will Beall et Zack Snyder
- Producteurs : Deborah Snyder et Charles Roven
- Photographie : Fabian Wagner
- Montage : David Brenner, Carlos M. Castillon et Dody Dorn
- Musique : Junkie XL
- Durée : 4h02 (242 minutes)