Synopsis : Adela et son mari Juan habitent au Texas, où Juan travaille dans le ranch de la très aisée famille Tucker. Juan gagne l’estime du patriarche Caleb Tucker, ce qui déclenche la jalousie de Dylan, son fils. La matinée suivant le déchainement nocturne de violence annuelle, un groupe masqué attaque la famille Tucker alors que le pays entier sombre dans la spirale du chaos et que les États-Unis se désagrègent petit à petit autour d’eux.
♥♥♥♥♥
Difficile de savoir ce qu’il adviendra de American Nightmare, franchise horrifique qui dès son premier opus avait décidé d’enrichir son argument narratif d’un discours critique prenant pour cible la violence qui agite la civilisation américaine. Son idée de base était à la fois simple et efficace : afin de lutter contre la recrudescence de la criminalité et purger la société de ses vices, le gouvernement américain a instauré une journée durant laquelle pillage, meurtre et autres sévices peuvent être exécutés en toute impunité. L’intérêt du film était d’être parvenu à prendre à bras le corps ce concept en exploitant à la fois le suspense de son dispositif (une journée de survie) et ses problématiques politiques sous-jacentes (le jour de la Purge révélant la fracture sociale entre les très riches se réfugiant dans leurs vastes demeures transformés en bunkers et les classes laborieuses prises au piège à l’intérieur de leurs vétustes appartements). Si le troisième film de la saga avait réussi à prolonger cette idée en entérinant son propos (l’accès au pouvoir d’un gouvernement démocratique mettant fin au massacre), le quatrième opus prenait la forme d’un préquel un peu poussif qui signalait la présence d’un inévitable essoufflement. L’annonce d’un cinquième épisode laissait donc présager le pire, et pourtant… En se nourrissant de l’actualité politique la plus récente (du mouvement Black Lives Matter à l’invasion du Capitole par les partisans de Trump), American Nightmare 5 parvient en partie à régénérer l’esprit de la franchise. Le choix du Texas comme nouveau territoire fictionnel permet ainsi de broder une réflexion sur l’immigration et le racisme qui évite assez habilement les facilités du moralisme ronflant pour aboutir à un dénouement joliment ironique (le Mexique devenant la nouvelle terre de Liberté, inversant l’orientation du flux migratoire).
La subtilité de cette idée demeure malheureusement desservie par la caractérisation archétypale des personnages et des séquences d’action. Le folklore horrifique déployé par les précédents opus et qui empruntait à certains classiques du genre (The Warriors [1979] de Walter Hill en premier lieu, mais aussi Orange mécanique et Mad Max) ne subsiste qu’à travers quelques plans qui prennent valeur de vestiges un peu creux. Si la fiction de la saga semble avoir regagné en profondeur, sa mise en scène demeure à la surface, ne parvenant à aménager efficacement ses effets et faisant préférer au spectateur les moments de halte aux temps forts.
Victoire du fond sur la forme, du contenu sur le style ? Sans doute, et la franchise ne devrait pouvoir trouver son Salut qu’en se plaçant entre les mains d’un réalisateur capable de concilier l’efficience du propos à la sidération des images. Alors que James DeMonaco (réalisateur des trois premiers opus et scénariste de l’ensemble des productions de la franchise) avait envisagé de clore sa saga avec le présent film, l’annonce de la mise en chantier d’une nouvelle suite vient relancer l’interrogation quant à la destinée du cauchemar américain. Suite au prochain épisode, donc.
- AMERICAN NIGHTMARE 5 : SANS LIMITES (The Forever Purge)
- Sortie salles : 4 août 2021
- Réalisation : Everardo Gout
- Avec : Ana de la Reguera, Josh Lucas, Cassidy Freeman, Veronica Falcon, Leven Rambin, Will Patton, Susie Abromeit, Tenoch Huerta, Alejandro Edda, Will Brittain, Anthony Molinari, Antwan Eilish, Brett Edwards, Edward Gelhaus, Gregory Zaragoza, Sammi Rotibi
- Scénario : James DeMonaco
- Producteurs : Michael Bay, Jason Blum, Andrew Form, Brad Fuller, Sébastien K. Lemercier
- Photographie : Luis David Sansans
- Montage : Todd E. Miller et Vincent Tabaillon
- Décors : Jennifer Spence
- Costumes : Leah Butler
- Musique : The Newton Brothers
- Distribution : Universal Pictures
- Durée : 1 h 44