Série / The Glory (partie 1) : critique

Publié par CineChronicle le 12 janvier 2023

Synopsis : Une femme cherche à se venger d’un groupe d’anciens camarades d’école qui l’a brutalisé enfant.

♥♥♥♥

 

The Glory - affiche

The Glory – affiche

Le conte de vengeance, dans l’excès et l’oubli de soi, est presque devenu un classique du cinéma sud-coréen : La Trilogie de la Vengeance de Park Chan-wook, J’ai rencontré le Diable de Kim Jee-Woon, The Chaser de Na Hong-Jin, etc. La scénariste et créatrice de série Kim Eun-sook (Goblin, Mr. Sunshine) propose à présent de décliner le genre dans un drama haletant qui mélange des thèmes bien connus pour mieux les renouveler. Elle est assistée à la réalisation par le réalisateur Ahn Gil-Ho, déjà à l’œuvre sur Stranger (Bimilui Soop), également diffusée sur Netflix entre 2017 et 2020. Avec The Glory, ce dernier réussit une fois encore haut la main à instaurer une atmosphère glaçante et à mettre en scène des personnages aux multiples facettes. Aussi méticuleux que le vengeance imaginée par notre protagoniste Dong-Eun, les huit épisodes distillent savamment les éléments de compréhension, oscillant sans arrêt entre passé et présent. Les années lycée de Dong-Eun et ses bourreaux ne sont pas sans rappeler The King of Pigs (film d’animation récemment adapté en série par la plateforme coréenne Tving). La violence s’y révèle implacable, gratuite, et les remords noyés par le jeu des apparences. Il est aussi question de réussite sociale, du rôle que joue l’école là-dedans, ainsi que du favoritisme corrompu du corps enseignant. Un contexte scolaire déjà abordé par des films coup de poing tels que La Frappe (2010) ou Pluto (2013), ici renouvelé à travers un casting plus largement féminin et une victime qui renaît de ses cendres.

 

Song Hye-Kyo - The Glory - Netflix

Song Hye-Kyo, The Glory – Crédit Netflix

 

Devenue l’archétype rigide de la vengeresse, la Dong-Eun du présent se donne comme une version moins glamourisée de Lady Vengeance, qui mûrit depuis dix-huit ans, étape par étape, la sentence de ses anciens camarades et noue des alliances avec d’autres victimes. Gagner sa vie, devenir institutrice, apprendre à jouer au Go, se trouver un logis : les conditions de la vengeance de Dong-Eun prennent toutes l’aspect de réussites personnelles ; d’accomplissements ordinaires dont toute personne se réjouirait, mais qui à ses yeux ne constituent qu’un pas de plus dans l’accomplissement de « son rêve ». Ce rêve, Dong-Eun le résume à un nom : Yeon-Jin, l’instigatrice du harcèlement.

 

La continuité, parfois déstabilisante, entre les scènes passées et présentes, ne vise pas uniquement à expliciter les agissements de Dong-Eun. Au-delà de cet aspect pratique, cette confusion temporelle met en images une vision du monde où le devenir de chacun est fatalement lié à ses actions passées. Les gens changent mais n’oublient pas. Ces doubles portraits, à dix-huit ans d’intervalle, rendent aussi justice à la bande des harceleurs.

 

Soutenus par un casting d’une belle justesse, ils se dévoilent progressivement moins caricaturaux qu’ils pourraient le sembler au premier abord. C’est ici que le format série se révèle particulièrement pertinent, car il permet de créer dans la durée un attachement singulier envers des personnages en tout point antipathiques. Tous sont persuadés d’avoir accompli leurs rêves de lycéens. Tous pourtant sont déstabilisés par le retour de leur ancienne victime. Et c’est finalement moins les complots de cette dernière que leurs propres failles, jusqu’alors déguisées par le luxe, qui leur fait perdre pied, l’un après l’autre.

 

Jung Ji-So - The Glory - Netflix

Jung Ji-So, The Glory – Crédit Netflix

 

The Glory, c’est également l’histoire d’obsessions qui se croisent. La plus évidente, celle qui pousse Dong-Eun à sacrifier sa propre vie pour assouvir sa vengeance, catalyse finalement toutes les autres. Chacun de ses ennemis est mû par un objet de convoitise : la drogue, l’argent, un statut social, la parentalité. Deux d’entre eux se révèlent paradoxalement extrêmement proches de Dong-Eun, dans leurs désirs impulsifs. Mis à l’écart par le groupe, Myeong-Oh souhaite se venger d’une affaire passée mise à jour par la vengeresse en personne. Seulement, la vengeance précipitée de Myeong-Oh se solde par la mort, et laisse planer sur Dong-Eun une menace analogue.

 

À l’inverse, ce qui obsède Yeon-Jin, c’est son ancienne victime : il ne s’agit pas de se venger, mais de conserver sur elle le contrôle absolu qu’elle exerçait au lycée et qui semble lui échapper. Si le rêve inavoué de Yeon-Jin était de briser Dong-Eun, la réussite sociale et professionnelle de cette dernière y met un frein.

 

Lee Do-Hyun et Song Hye-Kyo - The Glory - Netflix

Lee Do-Hyun et Song Hye-Kyo, The Glory – Crédit Netflix

 

Enfin, The Glory se donne comme une lutte de territoire stratégique, à la façon du jeu de Go mainte fois remis en scène. Ennemis ou alliés, les autres ne sont finalement que les pions de la vengeresse, qui tente de refouler tout sentimentalisme.  En débordant d’empathie à son égard, les personnages du médecin et de la femme battue se profilent tragiquement comme des relations manquées. La vengeance comme un jeu, Dong-Eun entreprend même de séduire le mari de sa rivale pour lui damer le pion. Seul fait regrettable : malgré une mise en scène intelligente et une écriture pleine de subtilité, la série manque d’une identité visuelle qui la rende inoubliable. La tension n’en n’est pas moins prenante et l’intérêt, réel.

 

Cette première saison se solde par un climax d’envergure qui laisse présager une lutte acharnée entre Dong-Eun et Yeon-Jin. Les révélations sur Yeo-Jeong, le médecin, ne sont pas non plus en reste. On guette donc avec impatience la sortie de la seconde partie, annoncée pour mars prochain.

 

Aésane Geeraert

 

>> Série The Glory (partie 2) – notre critique <<

 

 

 

  • THE GLORY
  • Sortie : depuis le 30 décembre 2022
  • Chaîne / Plateforme : Netflix
  • Créateur(s) : Kim Eun-Sook
  • Avec : Song Hye-Kyo, Lee Do-Hyun, Lim Ji-Yeon, Yum Hye-Ran, Park Sung-Hoon, Jung Sung-Il, Kim Hieora, Cha Joon-Young, Kim Gun-Woo, Jung Ji-So, Shin Ye-Eun, Song Byung-Geun, Bae Gang-Hee, Song Ji-Woo, Seo Woo-Hyeok, Jeon Soo-A, Park Yoon-Hee, Lee So-E, Oh Ji-Yul
  • Saison 1
  • Format épisodes : 8 x 52 minutes

 

 

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