Résumé : Lorsque le maître du manga, Osamu Tezuka, donne naissance au personnage d’ASTRO en 1952, il s’inspire, entre autres, du célèbre roman de Collodi, Les Aventures de Pinocchio. Mais le destin du petit robot est bien différent du pantin de bois, le merveilleux s’étant mué en science-fiction pour explorer d’autres horizons. Rejeté par son créateur (le Dr. Tenma, chef du Ministère de la Science), vendu à un cirque, il est sauvé par un vieux scientifique idéaliste qui l’élève en champion de justice, garant de l’harmonie entre les hommes et les machines. Mais, pris entre deux mondes, Astro ne peut trouver le sien. Simulacre d’humain plus vrai que nature, créature néanmoins incomplète, orphelin ulrime condamné au syndrome de Peter Pan, le petit Astro, l’éternel enfant au coeur de fer, ne serait-il pas le dernier des Garçons Perdus?
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Personnage central, sinon matriciel, de l’univers des mangas et des anime, Astro Boy ne se limite pas à une représentation figée, celle d’un petit garçon aux bottes rouges et aux yeux aussi noirs que ses cheveux et sa culotte de métal. Dès son entrée en matière, Nicolas Tellop, critique pour différentes revues (Neuvième Art 2.0, Chronic’art, Le Magazine littéraire….), essayiste et spécialiste de la bande dessinée et du cinéma, insiste ainsi sur la place singulière occupée par le petit robot dans le monde de la science-fiction. Ses variations morphologiques sont autant le signe de changements de goûts et d’époques que le symptôme d’une modification identitaire propice à de nombreuses pistes de réflexions. De sa conception en 1952 par Osamu Tezuka à ses différentes déclinaisons graphiques et animées, l’auteur propose une véritable exploration anatomique et thématique d’une figure dont on prend conscience, page après page, de l’étonnante originalité. Ses prétendus modèles (le Pinocchio de Collodi, la créature de Frankenstein, les robots imaginés par Isaac Asimov, l’automate hantant les cauchemars de la littérature romantique) apparaissent d’abord comme des antagonistes aptes à souligner les particularités de ce héros pas comme les autres. Astro Boy se présente comme une surface réfléchissante, renvoyant le reflet de différentes problématiques que Tellop prend soin de développer longuement. L’altérité, l’hybridation de l’humain et de la machine, l’enfance sont ainsi conjointement convoquées pour interroger la question de la relation entre les genres du merveilleux (la science-fiction et le conte de fées) ou la figure de l’orphelin dans la bande dessinée. À ces analyses savantes répond un travail historique qui éclaire le contexte de production du personnage (l’après-guerre japonais) et l’identité de son créateur (Tezuka qui compte parmi ses admirateurs un certain Stanley Kubrick qui, fortement impressionné par le travail du mangaka, lui proposera de prendre en charge la direction artistique de 2001, l’Odyssée de l’espace, une collaboration qui n’aboutira finalement pas mais qui continue d’alimenter les fantasmes des cinéphiles). Face au caractère foisonnant de cette excellente exégèse, on regrette l’absence d’annexes. Une bibliographie et une filmographie auraient en effet permis de cartographier le parcours d’Astro Boy et celui emprunté par Tellop.
- ASTRO BOY, COEUR DE FER
- Auteur : Nicolas Tellop
- Éditions : Les Impressions Nouvelles
- Collection : La fabrique des héros
- Langues : Français uniquement
- Date de parution : 16 janvier 2020
- Format : 128 pages
- Tarif : 12 € (print) – 7,99 € (numérique)