À Beecham House, paisible pension au cÅ“ur de la campagne anglaise qui accueille des musiciens et chanteurs d’opéra à la retraite, le bruit court qu’une nouvelle pensionnaire arriverait sous peu. Pour Reginald – dit Reggie – Wilfred et Cissy, le choc est grand lorsqu’ils voient débarquer l’impétueuse Jean Horton, avec laquelle ils triomphaient sur les scènes internationales des années auparavant. L’ambition et l’orgueil de Jean et son ego avaient alors ruiné leur amitié et mis un terme au mariage qui la liait à Reginald. Malgré les vieilles blessures, Reggie, Wilfred et Cissy devront convaincre Jean de reformer leur célèbre quatuor à l’occasion du gala annuel de Beecham House.

 

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Quel défi, avec une telle carrière, pouvait encore réaliser l’immense Dustin Hoffman si ce n’est une première réalisation. C’est chose faite avec Quartet, film britannique inspiré de la pièce éponyme de Ronald Harwood qui en a signé lui-même le scénario, dix ans après l’Oscar obtenu pour son adaptation du Pianiste de Roman Polanski. L’univers de prédilection demeure celui des arts et de la scène, à travers cette histoire de musiciens et chanteurs d’opéra vieillissants coulant des jours paisibles dans la pension de Beecham House. L’arrivée de la cantatrice Jean Horton va justement raviver bien des souvenirs et des blessures à ses amis Wilf et Cissy et à son ex-mari Reggie, avec lesquels elle formait un quartet légendaire durant leur jeunesse. Le groupe va cependant devoir mettre les différends de côté pour un ultime concert qui permettrait d’aider l’établissement en mal d’argent. Qui dit retrouvailles, dit donc heure des remises en causes et des secondes chances. Assez bavarde et bruyante, la première partie met en scène des individus cloisonnés dans leurs illusions d’éternelle jeunesse ou leur refus du temps qui passe. Quartet s’approche alors de la comédie romantique ‘‘so british’’ de bonne facture, avec son lot de seconds rôles hauts en couleurs, comme ce chef d’orchestre à la retraite assez irritant campé par Michael Gambon. Le long-métrage souffre temporairement d’une sorte de flottement, entre drame et drôlerie, parole libérée et contemplation. Tout devient heureusement plus clair quand Jean, l’ancienne grande soprano fait son entrée de reine, à la fois adorée et maudite, suspendant l’agitation naissante autour du spectacle annuel censé renflouer les caisses de Beecham House.

 

 

A partir de là, seuls les sentiments conduisent le quatuor central jusqu’à la fin de la partition, avec l’opéra en guise d’instrument. La fin justifie les moyens comme le dit l’adage. En attendant le climax espéré face au public, les coulisses supplantent par conséquent la scène, et il y a au final assez peu de ‘‘répétitions’’ chantées. Tant mieux, puisque Quartet ne s’avère jamais aussi émouvant et efficace que lorsque Dustin Hoffman privilégie les scènes intimistes de ses vedettes, en particulier celles entre les ex-époux Jean et Reggie, superbement incarnés par Maggie Smith et Tom Courtenay. Merveilleux de sensibilité, ces derniers trouvent en Billy Connolly et Pauline Collins, dans les rôles de Wilf et Cissy, un double idéal plus léger mais tout aussi touchant. Les deux duos se répondent et se retrouvent comme les jeunes héros de Beaucoup de bruit pour rien de William Shakespeare, car c’est de bien de mariage et d’amour qu’il s’agit. En somme vieillesse et musique, sans être reléguées au second plan, recontextualisent les maux d’hier et les espoirs d’aujourd’hui qui habitent le quatuor central, et préparent le terrain des retrouvailles. Passé et présent ne sont d’ailleurs jamais distincts, Hoffman ayant la bonne idée de ne pas en rajouter avec des flashback inutiles. Une trentaine de titres, dont les classiques de Verdi Bach et Rossini, suffisent à raviver la flamme ou à traduire l’état d’esprit des protagonistes. Le personnage de Cissy (merveilleuse Pauline Collins) lui-même présente cette alliance de deux époques, son regard et sa naïveté d’éternelle enfant se mêlant à son état sénile lorsqu’elle évoque ses parents dans ses moments d’absence.

 

 

Si Quartet ne semble viser rien de plus que la simplicité de son récit, certains parleront d’un classicisme excessif dans sa mise en scène, voire de théâtre filmé parce que le cadre ne s’éloigne presque jamais de Beecham House. Pourtant, la belle photographie de John De Borman donne une atmosphère à la fois automnale et lumineuse à ce joli conte dans lequel le troisième acte de deux vies constitue un tournant majeur. Dustin Hoffman n’oublie pas non plus de rappeler la difficulté de vieillir décuplée par celle de voir son nom tomber du haut de l’affiche. Il le fait sans complainte excessive, mettant Maggie Smith et ses compagnons face à leurs célébrités respectives. Et si les difficultés financières de Beecham House et ses résidents disparaissent derrière le glamour et la propreté ambiants, c’est pour mieux permettre à ses stars de garder toute leur superbe. Comme quoi, grandeur du spectacle et grandeur des sentiments, pour peu que la justesse et la sobriété soient au rendez-vous, font souvent bon ménage.

 

 

 

QUARTET de Dustin Hoffman en salles le 3 avril 2013 avec Maggie Smith, Tom Courtenay, Billy Connolly, Pauline Collins, Michael Gambon. Scénario : Ronald Harwood, d’après sa pièce éponyme. Producteurs : Nick O’Hagan, Finola Dwyer, Stewart Mackinnon. Producteurs exécutifs : Dickon Stainer, Xavier Marchand, Dustin Hoffman. Producteurs délégués : Jamie Laurenson, Dario Suter, Christoph Daniel, Marc Schmidheiny. Image : John De Borman. Musique : Dario Marianellin, supervision de Kle Savidge. Décors : Andrew McAlpine. Montage : Barney Pilling. Costumes : Odile Dick-Mireaux. Maquillages et coiffures : Daniel Phillips. Distribution : Pyramide. Durée : 1h38.

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