Phantom Thread de Paul Thomas Anderson : critique

Publié par Lucia Miguel le 14 février 2018

Synopsis: Dans le Londres des années 50, juste après la guerre, le couturier de renom Reynolds Woodcock et sa sœur Cyril règnent sur le monde de la mode anglaise. Ils habillent aussi bien les familles royales que les stars de cinéma, les riches héritières ou le gratin de la haute société avec le style inimitable de la maison Woodcock. Les femmes vont et viennent dans la vie de ce célibataire aussi célèbre qu’endurci, lui servant à la fois de muses et de compagnes jusqu’au jour où la jeune et très déterminée Alma ne les supplante toutes pour y prendre une place centrale. Mais cet amour va bouleverser une routine jusque-là ordonnée et organisée au millimètre près.

 

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Phantom Thread - affiche

Phantom Thread – affiche

Depuis sa consécration avec Magnolia et There will be blood, Paul Thomas Anderson s’est imposé comme l’un des réalisateurs américains les plus personnels et originaux. Avec son dernier film, Phantom Thread, un drame aussi excentrique que son personnage principal, il livre un chef-d’œuvre puissant et envoûtant. Les années 1950 effacent peu à peu l’horreur de la Seconde Guerre mondiale. La bourgeoisie des quartiers résidentiels de Londres recommence à vivre naturellement, partageant des dîners, des fêtes et des soirées mondaines. Entre eux, le grand couturier Reynolds W. Woodcock (Daniel Day Lewis), personnage raffiné et extravagant, à la tête d’une des plus grandes maisons de Haute Couture d’Angleterre. Avec sa sœur, il vêt l’aristocratie et la royauté anglaise ; ses tenues composent avec le respect de la tradition victorienne et le désir de modernité. Puis, Woodcock rencontre Alma (Vicky Krieps), une serveuse à l’image fragile qui va bouleverser sa vie et ses certitudes. La première partie dévoile délicatement des indices qui ne font que développer le mystère de ce récit à la fois drôle et tragique. La rencontre entre la personnalité forte de Woodcock et cette femme énigmatique et frêle évoque Pygmalion, établissant le lien entre le créateur et sa créature. Le couturier tombe éperdument amoureux de cette jeune fille sans passé, qui devient sa muse, sa maîtresse, sa servante, son souffre-douleur. Elle, de son côté, voue une adoration absolue à cet homme plus âgé qui lui offre une vie aisée. Tout semble idyllique, sans tâches. Or, peu à peu, l’histoire d’amour bascule en relation perverse, Woodcock prenant le rôle de dominateur, créant une dépendance soumise sur Alma, qui subit les vexations et humiliations sans protester. Il s’agit d’un rapport de dominant-dominée. Alma devient progressivement le fantôme du titre, vouée à disparaître sous le rayonnement de son partenaire avant de réussir à invertir les rapports.

 

Phantom Thread

Phantom Thread

 

Phantom Thread est une œuvre totale. Paul Thomas Anderson est derrière toute cette conception, l’écriture, la production, la photographie. Il est en quelque sorte le double de ce personnage, cet artiste cherchant à contrôler jusqu’au plus petit détail son œuvre. Le film joue également avec les genres, les mélangeant, les détournant, les subvertissant ; entre romance gothique, comédie noire, thriller psychologique, drame naturaliste. Il est un tranche de vie de deux êtres instables et tourmentés, qui essaient d’avancer ensemble malgré leurs propres démons. La photographie et la mise en scène évoquent bien sûr Hitchcock, et même Kubrick (les séquences en intérieur tournées à la bougie, comme Barry Lyndon), par l’alternance de gros plans et de plans d’ensemble, par leur longueur aussi et la couleur froide des décors et des visages. Par ailleurs, Alma ressemble à bien des égards à cette Rebecca hitchcockienne, cette femme fragile tyrannisée par son mari et la gouvernante évoluant dans une grande mansion devenue prison.

 

Le parti pris de tourner en 35mm va aussi dans le même sens, avec cette volonté de rendre hommage au cinéma classique, aux maîtres, aux œuvres. Le casting est à la hauteur du résultat ; les deux acteurs portent la force du récit dont la relation duplique celle des personnages. : Un homme puissant, Daniel Day Lewis, face à une actrice inconnue à l’aspect fragile, Vicky Krieps. L’alchimie entre les deux accapare l’écran, devenant l’une des grandes réussites du film. L’acteur, gagnant de trois Oscars, offre en plus ici son dernier rôle au cinéma. Ainsi, entre romance gothique et thriller psychologique, Phantom Thread, rythmé par la belle partition de Jonny Greenwood, est bien plus qu’un film sur la mode inspiré de la carrière de Cristóbal Balenciaga et de Charles James. Il est complexe offrant plusieurs niveaux de lecture, sur la survie de l’amour, la perversité des liens humains, le cinéma, la pulsion créatrice.

 

 

 

  • PHANTOM THREAD
  • Sortie en salles : 14 février 2018
  • Réalisation et Scénario : Paul Thomas Anderson
  • Avec: Daniel Day-Lewis, Vicky Krieps, Lesley Manville, Harriet Sansom Harris, Camilla Rutherford, Brian Gleeson, Julia Davis, Luiza Richter…
  • Production: Daniel Lupi, Megan Ellison, Paul Thomas Anderson, Joanne Sellar
  • Photographie: Paul Thomas Anderson
  • Montage: Dylan Tichenor
  • Décors: Mark Tildesely
  • Costumes: Mark Bridges
  • Musique: Jonny Greenwood
  • Distribution: Universal Pictures International France
  • Durée: 2h11

 

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