Synopsis : La musique est le secret de Mathieu Malinski, un sujet dont il n’ose pas parler dans sa banlieue où il traîne avec ses potes. Alors qu’un des petits cambriolages qu’il entreprend avec ces derniers le mène aux portes de la prison, Pierre Geithner, directeur du Conservatoire National Supérieur de Musique l’en sort en échange d’heures d’intérêt général. Mais Pierre a décelé en Mathieu un futur très grand pianiste qu’il inscrit au concours national de piano. Mathieu entre dans un nouveau monde dont il ignore les codes, suit les cours de l’intransigeante « Comtesse » et rencontre Anna dont il tombe amoureux. Pour réussir ce concours pour lequel tous jouent leur destin, Mathieu, Pierre et la Comtesse devront apprendre à dépasser leurs préjugés.
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Au bout des doigts, troisième long-métrage de Ludovic Bernard, réalisateur de L’Ascension et de Mission Pays basque, rappelle que les rêves les plus fous sont réalisables. Le cinéaste, qui signe aussi le scénario, raconte l’histoire de Mathieu Malinski, interprété par le jeune Jules Benchetrit (Chez Gino, Une rencontre, Asphalte), délinquant de vingt ans vivant en banlieue parisienne et qui n’a en secret qu’une seule passion : le piano. Sa rencontre avec Pierre Geithner, le directeur du Conservatoire National Supérieur de Musique incarné par Lambert Wilson (Rendez-vous, Imogène McCarthery, Sur la piste du Marsupilami), lui offre une chance inouïe qu’il peine pourtant à saisir. Un drame à la fois rythmé et touchant sur le dépassement de soi, traçant le parcours d’un jeune garçon talentueux condamné par ses origines sociales. Au bout des doigts s’élève contre les préjugés et promeut de belles valeurs. Parmi elles, se donner les moyens de réussir, croire en ses capacités, et surtout, aller au bout de ses rêves. À la manière de Billy Elliot de Stephen Daldry ou Will Hunting de Gus Van Sant, cette touchante trajectoire ressemble à un conte, à une histoire fantasmée, comme celle des films américains de la grande époque dans lesquels un pauvre voyou parvient à s’extirper de son ghetto pour devenir le parfait boy next door. Tandis que Mathieu, en pleine « ascension », s’élève au rang de virtuose et doit faire face à Sébastien, son rival du Conservatoire interprété par Gaspard Meier-Chaurand (La Rafle, Monsieur Papa, Des nouvelles de la planète Mars), la musique relie les destinées, transmet et envahit les êtres. Salvatrice, capable de transcender l’intériorité des protagonistes, elle est aussi vecteur d’émotions.
Les trois personnages principaux composent un triangle dont Mathieu —refusant le rôle du pantin— est le pilier, la dynamique. Ludovic Bernard met également en scène un rapport paternel et filial —avec un fort ressort dramatique— dans toute sa brutalité, sa tendresse voire un certain jusqu’au-boutisme avant d’esquisser la naissance d’un premier amour compromis par les différences. Dès l’ouverture, les corps se heurtent au tumulte de la Gare du Nord puis arpentent plus calmement Paris, notamment Notre-Dame, le canal Saint-Martin ou encore la Seine Musicale sur l’île Seguin. Si les rebondissements très alignés sont attendus —la structure de l’intrigue, jusqu’à l’inévitable happy end, étant propre au classicisme—, Au bout des doigts s’apparente à un acte de foi, une véritable déclaration d’amour à la musique classique, laquelle accompagne les séquences en redevenant universelle et non plus seulement un art destiné aux élites. Chopin, Bach, Chostakovitch sont ici remis au goût du jour et se fondent dans la partition originale composée par Harry Allouche.
Côté performance, Jules Benchetrit, retenu parmi les 34 révélations des César 2019, se montre à la fois timide, gracieux et magnétique. Ludovic Bernard parvient à magnifier la présence du jeune comédien. De son côté, Wilson, droit comme un I, campe un homme brisé, fragile, dissimulé sous son statut de directeur musical de la prestigieuse école. Enfin, le jeu tout en finesse de Kristin Scott Thomas (Les Heures sombres, The Party) attendrit le spectateur. L’humilité demeure la vertu essentielle du musicien.
- AU BOUT DES DOIGTS
- Sortie salles : 26 décembre 2018
- Réalisation : Ludovic Bernard
- Avec : Lambert Wilson, Kristin Scott Thomas, Jules Benchetrit, Karidja Touré, Elsa Lepoivre, André Marcon, Michel Jonasz…
- Scénario : Ludovic Bernard, Johanne Bernard
- Production : Mathias Rubin, Éric Juherian
- Photographie : Thomas Hardmeier
- Montage : Romain Rioult
- Décors : Philippe Chiffre
- Costumes : Marylin Fitoussi
- Musique : Harry Allouche
- Distribution : Mars Films
- Durée : 1h46