Synopsis : L’attraction n’est-elle que le côté divertissant du cinéma ? Comment, dès lors, justifier sa présence manifeste dans les oeuvres des très grands cinéastes ? À commencer par trois films puissants de Kubrick : 2001, Orange mécanique et Barry Lyndon qui viennent respectivement, capter, capturer, captiver le spectateur pour le transporter jusqu’au seuil d’un ailleurs où il vibrera d’émotions. Cet essai veut forger théoriquement ces trois modalités de l’attraction et montrer comment elles nous permettent de mieux appréhender le phénomène de la fiction et la question de l’art au cinéma.
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La question de l’attraction (entre motif narratif et dynamique formelle) est devenue l’une des clés d’entrée pour comprendre les enjeux historiques et esthétique du cinéma des premiers temps. Sous l’impulsion de différentes recherches (et en particulier celles d’André Gaudreault), la problématique de l’attraction est donc revenue au premier plan, entraînant dans son sillage de nouvelles publications à l’image du présent ouvrage qui cherche à élargir les limites historiques de son objet d’étude. En reprenant à son compte le caractère spectaculaire propre à la forme attractionnelle, Patrick Brun, docteur en Arts et sciences de l’Art, psychologue-clinicien, et déjà auteur de Poétique(s) du cinéma (L’Harmattan, 2003), propose une analyse marquée par son orientation ouvertement esthétique. La formulation de deux concepts généraux (« l’attraction centrifuge » et « l’attraction centripète » articulées autour de trois puissances agissantes :capter, capturer et captiver) permet le décryptage de plans (La Jetée), de séquences (2001, l’Odyssée de l’Espace ; Orange mécanique ; Barry Lindon ; Shining ; Psychose) ou de films entiers (Gerry ; Birdman) communément marqués par une dimension sensorielle. Car c’est la posture du spectateur qu’interroge principalement l’auteur. Porté par une volonté impressionniste, l’écrit cherche à décrire les émotions primaires produites par la mise en scène filmique sur l’intellect et la sensibilité du public. Si la valeur conceptuelle de l’ouvrage est certaine, on regrettera que le corpus choisi, s’étendant des années 1960 à nos jours, se réduise principalement à des productions proches du cinéma expérimental. À l’exception de la mention de Spectre et des films de Kubrick, qui occupent ici une place centrale, l’auteur aurait pu élargir son champ d’expertise à des œuvres ou à des genres plus populaires (le film d’action par exemple qui aurait parfaitement illustré les qualités de l’ « attraction centrifuge »). De la même manière, on aurait souhaité la présence de plus longs développements sur l’évolution technologique du cinéma, notamment ceux du numérique qui ont indéniablement transformé le spectacle cinématographique et les attractions qui lui sont consubstantiellement attachées. Ces petites lacunes n’enlèvent pourtant rien à la réussite de cet essai qui par son érudition et sa volonté de (re)découverte présente un indéniable intérêt théorique.
- ÉLOGE DE L’ATTRACTION. CAPTER, CAPTURER, CAPTIVER
- Auteur : Patrick Brun
- Éditions : L’Harmattan
- Collection : Champs visuels
- Date de parution : 27 mai 2019
- Format : 166 pages
- Tarif : 18 €