L’Amour à la ville (L’amore in citta) : critique

Publié par Jacques Demange le 24 juin 2020

Résumé : L’Amour à la ville ou cinq histoires presque vraies, réalisées par cinq grands metteurs en scène italiens sur la misère de l’amour à Rome dans le ton du néoréalisme social : Suicides Manqués de Michelangelo Antonioni, Agence Matrimoniale de Federico Fellini, Les Italiens se retournent d’Alberto Lattuada, L’Histoire de Catherine de Francesco Maselli, Le Bal du samedi soir de Dino Risi.

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Lamour a la vile - affiche

L’amour à la vile – affiche

Il faut immédiatement féliciter l’initiative de la maison « Les films du Camélia » qui permet aux cinéphiles de profiter, en version restaurée, d’une production longtemps restée confidentielle (car jamais éditée en France) mais pourtant essentielle de l’Histoire du cinéma. Derrière ses atours de film à sketches (une structure très en vogue dans le cinéma italien des années 1950 et 1960), L’Amour à la ville est un authentique projet conceptuel dont l’ambition ne doit pas être minimisée. À sa tête : Cesare Zavattini, scénariste attitré de Vittorio De Sica et chantre du néoréalisme. Ses textes, conférences et scénarios (il est notamment à l’origine des premières incursions du Mouvement comme Quatre pas dans les nuages de Blasetti et Les enfants nous regardent de De Sica) ont fait de lui le chantre de la nouvelle école cinématographique italienne de l’après-guerre. Mais au début des années 1950, son idéologie, directement inspirée de la doxa réaliste instituée par le vérisme en littérature, commence à battre de l’aile. Zavattini a alors l’idée de réaliser un film-journal qui prouverait la persistance, mais aussi la probité, du néoréalisme. Les cinéastes convoqués (Carlo Lizzani, Michelangelo Antonioni, Dino Risi, Federico Fellini, Francesco Maselli en collaboration avec Zavattini, et Alberto Lattuada) doivent remplir la tâche de reporters, leurs scénarios, tirés de faits-divers, étant traités à la manière d’articles journalistiques. La caméra comme plume, la pellicule comme encre. La thèse du projet est d’emblée annoncée dans l’introduction du film : exit les artifices du cinéma hollywoodien et de ses vedettes, ce qui sera montré à l’écran n’aura pour enjeux dramatiques que ceux que la réalité voudra bien lui prêter. Et pourtant… Car le principal intérêt de L’Amour à la ville tient à la transgression de ces règles préliminaires. Cette transgression peut être involontaire, comme dans le segment réalisé par Antonioni, consacré au témoignage de jeunes femmes ayant tenté de se suicider, et durant lequel le cinéaste prend rapidement conscience que la présence de sa caméra incite ses figurants à en faire trop pour mieux apparaître à l’image.

 

 

Mais, certains cinéastes assumeront pleinement la contradiction de leur approche. Ainsi de Lizzani qui choisit de soigner au maximum la composition de ses plans, jouant sur les ombres (magnifique photographie signée par le grand Gianni Di Venanzo) et clôturant son court métrage (consacré au quotidien des prostitués romaines) par un emphatique cadre dans le cadre, ou de Dino Risi et de Lattuada qui orientent délibérément leur mise en scène vers une représentation ironique du réel capturé. Mais c’est sans doute le segment réalisé par Fellini qui se présente comme le plus intéressant.Racontant l’infiltration d’une agence matrimoniale par un jeune journaliste, le réalisateur a recours à la voix off pour déconstruire le projet initial en en révélant les coutures. Cette mise en abyme annonce les productions ultérieures du cinéaste et souligne sans doute la principale qualité de L’Amour à la ville.

 

 

Véritable terreau du cinéma d’auteur italien, le film contient en germe les formes stylistiques des grands auteurs des années 1960. Si L’Amour à la ville échoue à raviver les braises du néoréalisme, la flamme prend bel et bien. Le chant du cygne se transforme alors en un chant d’espoir(s) à la puissance échoïque. Cette sortie assure donc une découverte multiple et inédite. La restauration confirme la valeur de témoignage de cette œuvre. De tonalités diverses, le noir et blanc décalque la beauté nocturne des rues ou la puissance solaire des paysages transalpins. À la fois film-limite et production matricielle, L’Amour à la ville peut à présent être apprécié à ses justes valeurs.

 

 

 

  • L’AMOUR À LA VILLE (L’amore in citta)
  • Sortie salles : 22 juin 2020
  • Réalisations : L’Amour qu’on paie de Carlo Lizzani, Tentative de suicide de Michelangelo Antonioni, Une agence matrimoniale de Federico Fellini, Les Italiens se retournent d’Alberto Lattuada, L’Histoire de Catherine de Francesco Maselli et Cesare Zavattini, Le Bal du samedi soir de Dino Risi
  • Avec : Rita Josa, Donatella Marrosu, Paolo Pacetti…
  • Scénario : Aldo Buzzi, Luigi Chiarini, Luigi Malerba, Tullio Pinelli, Dino Risi, Vittorio Veltroni, Cesare Zavattini, Michelangelo Antonioni, Federico Fellini, Alberto Lattuada, Marco Ferreri.
  • Production : Marco Ferreri, Riccardo Ghione, Cesare Zavattini
  • Photographie : Gianni Di Venanzo
  • Montage : Eraldo Da Roma
  • Décors : Gianni Polidori
  • Musique : Mario Nascimbene
  • Distribution : Les films du Camélia
  • Durée : 1h49
  • Sortie initiale : 26 novembre 1953 (Italie)

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