Synopsis : Le 27 mars 1995, Maurizio Gucci, petit-fils et héritier du fondateur de la marque de luxe italienne Gucci se fait assassiner. Sa future ex-femme, Patrizia Reggiani, a commandité son meurtre avant qu’il ne se remarie avec Paola Franchi afin de toucher une part de son héritage. L’affaire fait scandale et le procès, très médiatisé, voit Patrizia Reggiani se faire surnommer la « Veuve Noire » par les « tabloïds ».
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Seulement un mois après la sortie du Dernier Duel, Ridley Scott livre son nouveau film dont le casting cinq étoiles (Al Pacino, Lady Gaga, Adam Driver, Jared Leto, Salma Hayek) n’a cessé d’attiser l’attente des spectateurs et cinéphiles, encore renforcée par la multiplication des bandes-annonces précédant sa sortie. Patience récompensée ? En choisissant d’adapter l’ouvrage de Sara Gay Forden, The House of Gucci : A Sensational Story of Murder, Madness, Glamour and Greed, le réalisateur a choisi de prendre le risque de sacrifier le réalisme au profit du fantasme et de l’imaginaire. Pour notre plus grand plaisir. C’est le grotesque que vise Scott, idée que prend directement en charge la représentation de ses personnages. De l’air benêt de Maurizio (Adam Driver) à l’autoritarisme ambiguë de Aldo (Al Pacino) en passant par la vulgarité de Patrizia (Lady Gaga), Scott livre un portrait de famille qui fait coïncider le fond et la forme, la psychologie et l’apparence. Sur ce point, le mérite est double. Le réalisateur évite sciemment le ton moralisateur qui pouvait encore entacher ses productions précédentes (Tout l’argent du monde dont le scénario pêchait par sa déontologie un peu creuse), tandis que ses acteurs s’en donnent à cœur joie.
Lady Gaga confirme le bien que l’on pouvait penser d’elle après son interprétation dans A Star is Born (Bradley Cooper, 2018), Adam Driver continue de prouver sa capacité à s’adapter à des registres divers et au semblant opposés (la différence entre son interprétation du personnage de Maurizio et celle de Jacques Le Gris dans Le Dernier Duel est stupéfiante), tandis que Al Pacino continue à renouer avec le tempérament théâtral qui fit la force de ses rôles d’antan (son personnage s’inscrivant dans la lignée de ces nouveaux patriarches que l’acteur s’emploie désormais à incarner). Jared Leto, de son côté, prolonge son goût pour le travestissement et les transformations totales, apparaissant transfiguré à l’écran, ses traits dissimulés sous un lourd maquillage qui confère une aura inquiétante à son rôle.
Si la mise en scène souffre par moments d’un manque d’inventivité (un reproche qui pourrait être fait à un certain nombre de réalisateurs de sa génération, Clint Eastwood et Martin Scorsese en tête), la démarche demeure maîtrisée de bout en bout. Bien que se moquant ouvertement du clan Gucci, le cinéaste n’en parvient pas moins à maintenir l’attention du spectateur en éveil. C’est à une sorte de spectacle baroque que nous convie Scott, un opéra bouffe prenant place dans l’arène d’un mauvais goût suintant l’hypocrisie et la malveillance. House of Gucci n’est certes pas une leçon de cinéma, mais prouve la polyvalence d’un cinéaste qui cette année renoue avec le meilleur de son œuvre passée.
- HOUSE OF GUCCI
- Sortie salles : 24 novembre 2021
- Réalisation : Ridley Scott
- Avec : Lady Gaga, Adam Driver, Jared Leto, Salma Hayek, Jeremy Irons, Al Pacino, Mădălina Ghenea, Jack Huston, Reeve Carney, Camille Cottin
- Scénario : Becky Johnston et Roberto Bentivegna, d’après le livre The House of Gucci: A Sensational Story of Murder, Madness, Glamour, and Greed de Sara Gay Forden
- Production : Ridley Scott, Kevin Walsh, Mark Huffam, Giannina Scott
- Photographie : Dariusz Wolski
- Montage : Claire Simpson
- Décors : Arthur Max
- Costumes : Stefano De Nardis
- Musique : Harry Gregson-Williams
- Distribution : Universal Pictures
- Durée : 2 h 37