Ressortie / Chromosome 3 de David Cronenberg : critique

Publié par Jacques Demange le 2 novembre 2021

Synopsis : En instance de divorce, Nola Carveth est placée sous la surveillance du Dr. Raglan qui a développé une nouvelle méthode controversée pour soigner les troubles mentaux. Lorsque Frank, le mari de Nola, découvre des ecchymoses sur le corps de Candice, leur petite fille, il informe Raglan de son intention de mettre fin au droit de visite. Soudain, de mystérieuses créatures s’en prennent à Frank et à Candice.

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Chromosome 3 -affiche ressortie

Chromosome 3 – affiche ressortie

Si au cours de la promotion du palmé Titane, la réalisatrice française Julia Ducournau est fréquemment revenue sur son amour pour le cinéma de David Cronenberg, le cinéaste canadien a pu ressentir une certaine fierté à voir certains aspects de son travail aussi brillamment repris, synthétisés, et renouvelés. Car en représentant un drame familial à partir d’une problématisation du corps à la fois perçu comme une entité menaçante et vulnérable, Ducournau a parfaitement résumé ce qui fit la force du cinéma cronenbergien des années 1980. Chromosome 3 (1979) se présente comme l’introduction de cette démarche que prolongeront par la suite Scanners (1981), Vidéodrome (1983), Dead Zone (1983), La Mouche (1986) et Faux-semblants (1988). Cette version restaurée 2K rend honneur à l’approche du réalisateur tant du point de vue de la composition de l’image que du traitement du son. La première impression que laisse le film est la singularité qui émane de sa construction dramaturgique. S’ouvrant sur ce que l’on croit être une représentation théâtrale (deux personnages échangeant un dialogue sur une scène face à un public médusé), Chromosome 3 va filer cette métaphore scénographique pour traduire l’horreur qui ne cessera de croître au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue. Se rapprocher pour mieux révéler l’envers du décor, voilà le crédo de Cronenberg qui raconte le drame très concret d’une famille déchirée par une sordide affaire de violence domestique et de manipulation sectaire.

 

Chromosome 3

Chromosome 3 de David Cronenberg

 

Le réalisateur ne cherche jamais à dépasser ces thématiques sociales mais à les approfondir pour imaginer leurs déterminismes souterrains. L’apparition d’enfants mus par un instinct de mort et la découverte d’excroissances cancéreuses sur le corps maternel recouvre la réalité morbide d’un brouillard d’inconscient que Cronenberg prend soin de ne jamais trop détailler, conscient du risque qu’il y aurait à percer le mystère de ses propres obsessions artistiques.

 

À revoir Chromosome 3, on comprend alors la cohérence que manifeste l’œuvre entière du cinéaste. Au-delà de l’âge d’or des années 1980 dans lequel il s’inscrit pleinement, le film annonce le fantasme du corps meurtri de Crash (1996), la dangerosité de l’hallucination virtuelle de eXistenZ (1999), l’implosion du cadre familial de A History of Violence (2005) et la violence faite à ses symboles que ce soit dans Les Promesses de l’ombre (2007) ou A Dangerous Method (2011).

 

Chromosome 3

Chromosome 3 de David Cronenberg

 

Surtout, la redécouverte du film permet de comprendre l’originalité qu’a pu incarner le style de Cronenberg à l’intérieur du cinéma d’horreur de l’époque. Partageant avec la nouvelle vague américaine des eighties (principalement représentée par John Carpenter et Joe Dante) un goût pour l’exposition franche, Cronenberg se distingue cependant de ses contemporains par son refus de confondre la représentation horrifique avec le spectaculaire (fusion dont l’origine remonte sans doute à L’Exorciste de Friedkin). Le réalisateur canadien ne vise pas le plan large, mais demeure le spécialiste du cadre dans le cadre. Un procédé technique qui exprime chez Cronenberg un enjeu proprement existentiel : la compréhension de l’autre ne peut s’accomplir qu’à travers une pénétration de soi-même.

 

 

 

  • CHROMOSOME 3
  • Version restaurée 2K
  • Ressortie salles : 3 novembre 2021
  • Réalisation et Scénario : David Cronenberg
  • Avec : Art Hindle, Cindy Hinds, Oliver Reed, Samantha Eggar, Henry Beckman, Nuala Fitzgerald, Susan Hogan, Gary McKeehan, Michael Magee, Joseph Shaw, Felix Silla, John Ferguson
  • Production : Claude Héroux, Pierre David, Victor Solnicki
  • Photographie : Mark Irwin
  • Musique : Howard Shore
  • Montage : Alan Collins
  • Décors : Carol Spier
  • Maquillage : Shonagh Jabour
  • Distribution : Capricci / Les Bookmakers
  • Durée : 92 minutes
  • Sortie initiale : 25 mai 1979 (États-Unis) – 10 octobre 1979 (France)

 

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