Irréprochable de Sébastien Marnier

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CC : Dans La Désintégration justement, avec l’intervention du saxo et son effet jazz électrique, il y a même un rapprochement avec le film noir californien à la Hollywood Night. Finalement, dans cette BO, on retrouve un peu tout ce qui constitue votre style : le synthé minimaliste, ce beat frénétique, ce saxo vibrant et lumineux, cette touche électro techno et ces percussions tribales. Était-ce votre envie de départ ?

EJ : Bien vu! Oui, c’est exactement cela (sourire). Mais c’est notre expression, tout s’est fait spontanément. Sébastien n’avait pas prévu de saxophone au départ. Je l’ai ajouté dans la scène finale lorsqu’elle [ndlr : Marina Foïs] arrive sur le pont. C’est le moment où tout va basculer. Il fallait une tonalité sonore entre deux eaux, où tout devient glissant. Ajouter le saxo me paraissait donc nécessaire. Et évidemment, le morceau collait parfaitement avec les notes qui devenaient de plus en plus bizarres et dissonantes. Sébastien a été conquis et m’a suggéré ensuite de l’ajouter à chaque fois que le personnage de Jérémie Elkaïm apparaît ; c’est en quelque sorte devenu son instrument. Au départ, il voulait un thème qui se répète tout le temps. Nous avons préféré limiter cet aspect « thème morriconien », à savoir réarranger le morceau de différentes façons. J’aime beaucoup ce style mais je savais qu’on pouvait aller plus loin avec le saxophone, l’utilisation des expressions différentes et des morceaux plus originaux. Running est le seul titre qui se répète, mais on a voulu quand même éviter le principe. On en aurait trop dévoilé. On a préféré plutôt noyer le poisson avec des mélodies différentes.

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SAVOIR (SE) SURPRENDRE

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CC : La force de cette BO est qu’elle s’écoute avec ou sans les images. Était-ce également une volonté de départ ?

EJ : On y tenait beaucoup. Elle est disponible en digital pour cette même raison. La musique existe avec les images, mais c’est aussi un moyen pour le public de se replonger dans les scènes du film. C’est ce que j’aime dans les meilleures bandes originales. D’un autre côté, si on fait appel à nous, c’est aussi pour cette raison. On voulait qu’elle ait une véritable personnalité, c’est ce qu’on recherche toujours à faire. C’est une prise de risque pour les réalisateurs. La plupart ne souhaitent pas que la musique prenne autant de place. Pourtant, Irréprochable ne contient qu’une demi-heure de musique sur 1h30 de film, et Sébastien a su vraiment la mettre en valeur sur les images. Il a coupé une scène de dix minutes au montage car le film était trop long avec cette femme qui vient parler au personnage de Marina Foïs dans la voiture alors qu’elle est en train d’observer son ancien employeur. Il apporte une explication psychologique supplémentaire. Cette scène devrait être visible dans les bonus DVD avec une musique inédite que nous avons composée. Nous avons également prévu de sortir un objet en 45 tours à la rentrée, qui concordera avec la sortie en vidéo.

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CC : Quels sont les réalisateurs qui vous inspirent aujourd’hui, comme par exemple Nicolas Winding Refn ?

EJ : J’adorerais, mais il doit continuer à réaliser de bons films. Je suis surtout un fan absolu de Cronenberg. Mais j’aime aussi certains réalisateurs français comme Alain Guiraudie et Bruno Dumont. J’ignore si ça collerait, mais c’est une autre histoire. J’ai surtout envie de me surprendre et que les gens soient surpris. Je ne veux pas reproduire ce que je sais déjà faire. Ce qui m’intéresse, c’est d’être là où personne ne m’attend et où je ne m’attends pas moi-même d’ailleurs. La créativité se provoque. La musique n’est pas un savoir-faire, il faut aller au-delà de ce qu’on peut imaginer. L’étincelle créatrice se trouve à cet endroit et non pas dans nos habitudes. Cela ne veut pas dire que je vais jouer demain de la musique avec du pipeau… Ce qui me plairait, c’est de composer une musique totalement acoustique. J’espère qu’on me laissera cette chance.

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Irréprochable de Sébastien Marnier

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CC : Avez-vous atteint vos objectifs de carrière ?

EJ : Oui, j’ai complètement explosé mes espérances dans la musique. En démarrant en tant qu’ingénieur du son, je ne pensais pas que je deviendrai musicien ni compositeur. J’ai du simplement trouver une bonne façon de faire. J’ai vite découvert que j’avais des aptitudes, notamment dans l’improvisation. J’ai ainsi adapté ma façon de composer. Je joue de la musique dans le premier sens du terme, avec les éléments, les émotions. Je ne suis pas dans une reproduction du savoir-faire. J’ai étudié également à l’école Louis Lumière, mon rapport à l’image reste quand même très important.

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CC: Pensez-vous que cette BO est un moyen de libérer Zombie Zombie de ses premières influences ?

EJ : Il y a des chances que ce film nous emmène ailleurs. Il touche un plus large public que le nôtre lorsqu’on sort nos disques. Je me suis rendu compte que j’avais un potentiel commercial. Pourtant, je n’ai jamais cherché à composer une musique qui vende ou non. Il y a des choses extrêmement inventives dans l’art populaire et d’autres parfaitement conventionnelles dans l’art dit expérimental. J’ai toujours souhaité qu’on s’intéresse à ma musique. J’ai toujours pensé qu’on pourrait toucher une cible large même si on compose ce type de musique étrange. Irréprochable va montrer qu’on est capable d’être plus accessible. Les retours ont été très positifs et les critiques très bonnes ; c’est le pouvoir de la musique sur les images.

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CC : Après trois albums, une dizaine de EP et des ciné-concerts. Quels sont vos prochains projets ?

EJ : Nous allons poursuivre avec l’artiste Xavier Veillant autour de performances musicales au milieu de sculptures. On va également continuer la tournée européenne de Slow Futur en novembre/décembre, avec et sans les jongleurs. De mon côté, j’ai mes projets personnels, des concerts en solo. Je travaille aussi actuellement sur des musiques de courts métrages d’animation. Le premier va s’appeler Le Diamanteur de Chloé Mazlo, qui a remporté le César du meilleur court métrage l’année dernière [ndlr : Les Petits Cailloux]. Le second est La Nuit des Sacs Plastiques. Je suis très content d’avoir cette chance de continuer dans le cinéma. Je pense qu’on devrait aussi retrouver Sébastien Marnier pour son prochain long métrage qu’il est en train d’écrire ; il était tellement content du résultat avec Irréprochable.

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• IRRÉPROCHABLE de Sébastien Marnier en salles depuis le 6 juillet 2016.
• Avec : Marina Foïs, Jérémie Elkaïm, Joséphine Japyn Benjamin Biolay, Jean-Luc Vincent, Jeanne Rosa, Véronique Ruggia Saura…
• Scénario : Sébastien Marnier avec la collaboration de Samuel Doux
• Production : Caroline Bonmarchand
• Photographie : Laurent Brunet
• Montage : Laurence Bawedin
• Décors : Mathieu Menut
• Costumes : Marité Coutard
• Musique : Zombie Zombie
• Distribution : Memento Films
• Durée : 1h43

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BO à l’écoute

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Bande annonce de Irréprochable

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