Synopsis : Anna arrive sur la Côte d’Azur pour les vacances. Au milieu de sa famille, des amis et employés, elle doit gérer sa rupture et l’écriture de son prochain film. Derrière les rires, les colères, les secrets, naissent des rapports de dominations, des peurs et des désirs.
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Les Estivants, quatrième long-métrage de Valeria Bruni Tedeschi projeté hors compétition à la dernière Mostra de Venise, décrit les relations d’une famille réunie dans une superbe villa au cours d’un séjour estival sur la côte d’Azur. Dans cet endroit hors du temps, de vieilles rancoeurs refont surface. Chacun pensait pouvoir oublier ses soucis le temps d’un été mais doit se débrouiller avec le mystère de sa propre existence. Anna, interprétée par une convaincante Valeria Bruni Tedeschi (Les Opportunistes, Asphalte, Ma Loute), venue voir Célia, sa fille adoptive, doit gérer sa rupture toute fraîche avec Luca (Riccardo Scamarcio) —lequel fait directement écho à l’ex-compagnon de la réalisatrice, Louis Garrel— et l’écriture de son prochain film. Il s’agit là d’une autobiographie imaginaire, terme que la réalisatrice emploie pour définir son cinéma si personnel. Les similitudes sont nombreuses, troublantes. Comme dans la réalité de la famille Bruni Tedeschi, il existe une mère pianiste, une fille adoptive, un frère décédé du sida. De nombreux visages familiers jalonnent cette comédie divisée en trois actes et un épilogue, notamment ceux de Pierre Arditi, Valeria Golino, Noémie Lvovsky, Yolande Moreau, Bruno Raffaelli ou encore Frederick Wiseman. L’italianité est brossée par petites touches : de l’évocation du Rinascimento, jusqu’à la Birra Perroni en passant par le Va Pensiero de Verdi ou encore le fameux air de Ma che freddo fa de Claudio Mattone. Dans Les Estivants, la mise en abyme est totale, souvent auto-parodique. L’idée du double pirandellien définit ces « villeggianti » (les « vacanciers » en italien) reclus dans cette demeure bourgeoise de la Riviera. La patte est caustique. Riches et domestiques connaissent des problèmes similaires mais sont pourtant diamétralement antithétiques. Le film est donc un va-et-vient de personnages (qui « s’enterrent » sous leur désespoir), une sarabande de mots, un manège d’ambiances et de névroses à la fois câlinées et exhibées. Il raconte la multiplicité des solitudes et traite également de la séparation, du divorce, de la faillite et du deuil. Cette dramatique décadence emplie de digressions embrasse pourtant la vie, se transformant en une comédie —peut-être un peu bancale— à la manière de Fellini ou en une version plus chic de A Casa tutti bene de Gabriele Muccino, et dans laquelle la vulgarité des uns se mélange à la nonchalance des autres. Portrait introspectif et méta-cinématographique construit, rythmé, sincère, Les Estivants demeure un gigantesque règlement de comptes au discours socio-politique quelque peu embrumé. Valeria Bruni Tesdeschi, qui passe du rire aux larmes, montre cependant tout son talent d’actrice. Une comédie est une histoire qui s’arrête au bon moment.
- LES ESTIVANTS (I Villeggianti)
- Sortie salles : 30 janvier 2019
- Réalisation : Valeria Bruni Tedeschi
- Avec : Valeria Bruni Tedeschi, Pierre Arditi, Valeria Golino, Noémie Lvovsky, Yolande Moreau, Laurent Stocker, Riccardo Scamaracio, Bruno Raffaelli, Marisa Borini…
- Scénario : Valeria Bruni Tedeschi, Agnès De Sacy, Noémie Lvovsky, Caroline Deruas
- Production : Alexandra Henoschberg, Patrick Sobelman
- Photographie : Jeanne Lapoirie
- Montage : Anne Weil
- Décors : Emmanuelle Duplay
- Costumes : Caroline de Vivaise
- Musique : Paolo Buonvino
- Distribution : Ad Vitam
- Durée : 2h08